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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature
Volume 137, Numéro 123

Le mardi 23 mars 1999
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mardi 23 mars 1999

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune de quelques visiteurs de marque. Il s'agit de l'honorable Joseph Sempe Lejaha, président du Sénat du Royaume du Lésotho, et de l'honorable Ntlhoi Motsamai, vice-présidente de l'Assemblée nationale du Lésotho.

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.


[Français]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L'Année de la Francophonie canadienne

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, le jeudi 18 mars dernier, lors du lancement de l'Année de la Francophonie au Canada, le gouvernement du Québec était absent de cette cérémonie. J'ai éprouvé une grande déception lorsque j'ai pris connaissance de la position du gouvernement du Québec énonçant que «le Québec ne peut être assimilé à la Francophonie canadienne au même titre que les communautés francophones minoritaires ailleurs au Canada».

Je trouve déplorable que le gouvernement du Québec, par le biais de propos tenus par M. Joseph Facal, ministre des Affaires intergouvernementales du Québec, renie de la sorte un million de ses cousins francophones qui ne peuvent que se sentir délaissés par une telle attitude.

Personne ne nie que le Québec soit le foyer de la francophonie en Amérique du Nord. Nous, les francophones de la diaspora canadienne, prions nos amis québécois de ne pas s'isoler sur leur territoire mais de se joindre à nous pour renforcer la présence francophone à travers le Canada.

Les festivités entourant l'Année internationale de la Francophonie ont pour but de rassembler les différentes communautés francophones dans une célébration de notre langue et de notre culture.

Dans ce contexte, il est dommage que l'on ait voulu imposer une tournure politique à cet événement majeur, et je prie le gouvernement du Québec de reconsidérer sa position.

[Traduction]

Le championnat de basketball de l'Union sportive interuniversitaire canadienne pour 1999

Félicitations aux Huskies de l'Université Saint Mary's

L'honorable Wilfred P. Moore: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour souligner l'exploit de l'équipe de basketball masculin de l'Université Saint Mary's à Halifax, en Nouvelle-Écosse.

Dimanche dernier, l'équipe de basketball, les Huskies, classée au septième rang au pays, a remporté le championnat de l'Union sportive interuniversitaire canadienne lors d'un match excitant qui s'est terminé en prolongation par la marque de 73 à 69, battant l'équipe no 1 de la ligue, les Golden Bears de l'Alberta, dans le cadre d'un tournoi disputé devant une foule nombreuse qui s'était rassemblée au Metro Centre de Halifax. C'était la première fois que ce titre était remporté en prolongation.

(1410)

Saint Mary's a remporté ce titre national pour la dernière fois il y a 20 ans. L'entraîneur des Huskies, Ross Quackenbush, faisait partie des équipes de 1978 et 1979. Je signale que Cory Janes, de Middleton, en Nouvelle-Écosse, joueur centre des Huskies, a été nommé le joueur le plus utile à son équipe à l'occasion du tournoi de cette année.

En tant qu'ancien étudiant et membre du bureau des gouverneurs de l'Université Saint Mary's, c'est de bonne grâce et avec beaucoup de fierté que je salue cette victoire marquante, une victoire qui en dit long sur la vigueur et l'esprit qui animent l'Association sportive interuniversitaire de l'Atlantique. Cette victoire confirme également la juste part faite à l'excellence scolaire et athlétique à l'Université Saint Mary's. Fondé en 1802, cet établissement conjugue à la fois la tradition et l'avenir. Nous félicitons sincèrement l'entraîneur, M. Quackenbush, son équipe et leur légion de partisans.

Nous offrons également nos remerciements et notre reconnaissance à Peter Halpin, ancien joueur de basketball interuniversitaire à l'Université Saint Mary's et membre de l'équipe des Huskies qui a participé au championnat national de 1973. Nous remercions également son équipe de bénévoles dévoués qui ont travaillé énergiquement à l'organisation de cet événement athlétique national de haut niveau cette année.

Les droits de la personne

La Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale

L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, je voudrais citer, à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale, qui a eu lieu le 21 mars, l'article 4 de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Aux termes de l'article 4 de la convention, sont considérées comme un délit punissable «toute propagande et toutes organisations qui s'inspirent d'idées ou de théories fondées sur la supériorité d'une race ou d'un groupe de personnes d'une certaine couleur ou d'une certaine origine ethnique, ou qui prétendent justifier ou encourager toute forme de haine et de discrimination raciale.»

Voilà un engagement important qui mérite notre attention. Le Canada, comme toutes les démocraties libérales, accorde une grande importance à la liberté de pensée et d'expression. Toutefois, des restrictions s'appliquent à toutes les libertés lorsque leur exercice représente un risque pour les autres ou est une source de diffamation injuste. C'est pourquoi nul ne peut délibérément annoncer une fausse urgence ou ternir la réputation d'un concitoyen par des mensonges. Aussi, il est non seulement acceptable mais indispensable d'avoir des lois et politiques pour empêcher la diffusion d'idées haineuses.

Honorables sénateurs, l'histoire nous a enseigné l'importance de mettre fin à la propagande fondée sur des idées ou des théories voulant qu'une race soit supérieure à une autre. Les événements qui ont marqué et suivi la Deuxième Guerre mondiale, depuis Auschwitz jusqu'à la Bosnie et au Rwanda, montrent l'importance d'empêcher la propagation de la haine dès le départ. Toute acte dicté par la haine est une atteinte non seulement à la victime, mais aussi à tous les membres du groupe et les expose à la calomnie et à un risque accru de tort physique.

Selon les statistiques, les crimes haineux sont en augmentation depuis ces dernières années. Dans son livre, Web of Hate, dont la parution ne saurait tomber plus à point, Warren Kinsella nous aide à comprendre ce genre de crimes. Selon le B'nai Brith, les actes antisémites ont augmenté de 200 p. 100 au cours des dix dernières années. Dans la ville de Toronto, les rapports de la police indiquent que les crimes haineux ont augmenté de 22 p. 100 en 1998 par rapport à l'année précédente.

La propagation de la haine vise surtout les jeunes, et si on ne met pas fin à ce problème, elle pourrait avoir des conséquences troublantes. La promotion de la haine et les crimes haineux vont totalement à l'encontre de toutes les valeurs que défend le Canada.

En servant à répandre le message de haine, Internet a une influence sinistre. Allons-nous permettre aux vendeurs de haine de répandre leur venin en utilisant en toute impunité la plus récente technologie? Il est encourageant de voir que la Commission canadienne des droits de la personne a lancé sur Internet un jeu destiné aux jeunes afin de lutter contre la haine basée sur la race, la religion ou les orientations sexuelles et que la commission utilise les pouvoirs que lui confère la loi pour poursuivre ceux qui abusent d'Internet pour soulever les passions raciales et ethniques.

Le livre de M. Kinsella nous aide à mieux comprendre que l'extrême droite n'est pas un simple groupe amorphe de gens qui nient l'existence de l'Holocauste. Il s'agit de savoir ce qu'on peut faire à ce sujet. Dans ce contexte, je félicite la Fédération canadienne des municipalités, un organisme important représentant environ 600 municipalités et 70 p. 100 de la population canadienne, pour ses résolutions très fermes sur cette question. Je veux féliciter en particulier les maires de Toronto, de Regina, de Halifax et d'autres villes de leur franc-parler.

Le gouvernement du Canada n'a pas toujours donné l'exemple sur ce plan, surtout depuis quelques années, même si c'est le gouvernement Trudeau qui a adopté et promu l'idée du multiculturalisme et que c'est le gouvernement Mulroney qui a promulgué la Loi sur le multiculturalisme canadien en 1988. Cependant, le gouvernement actuel a fait beaucoup moins pour promouvoir le multiculturalisme, et cela est peut-être lié aux sondages qui montrent que la population ne comprend pas très bien cette notion et ne l'appuie pas fortement. Si c'est le cas, on sacrifie des principes par opportunisme.

Honorables sénateurs, un bon gouvernement a un rôle à jouer pour ce qui est de sensibiliser et de donner l'exemple, sans être influencé par les sondages. Le multiculturalisme est une bonne politique publique pour un pays aussi diversifié que le Canada et une façon importante de respecter nos engagements aux termes de la convention que nous avons signée en 1966 et qui est entrée en vigueur en 1970.

[Français]

Le Québec

L'honorable Lise Bacon: Honorables sénateurs, je me retiens depuis plusieurs mois pour ne pas exprimer publiquement le profond malaise que me cause le spectacle désolant qu'offrent le gouvernement du Parti québécois et son chef, Lucien Bouchard, mais certains propos tenus la semaine dernière par le premier ministre du Québec à Paris m'obligent à mettre de côté ma réserve.

Incapable d'offrir un projet nouveau et stimulant aux Québécois et pour masquer l'incurie de son gouvernement, le premier ministre ne cesse, depuis des mois, d'évoquer la mémoire de politiciens québécois maintenant décédés, et qui donc ne peuvent s'objecter à l'utilisation que l'on fait de leur nom. Tour à tour, les anciens premiers ministres du Québec sont appelés à défendre une cause que le premier ministre actuel arrive lui-même difficilement à promouvoir. Le dernier conscrit de force, évidemment, est Robert Bourassa.

Cette tentative de récupération d'un homme que j'ai côtoyé pendant 30 ans me répugne, d'autant plus qu'elle vient de la bouche d'un premier ministre qui a comme principal conseiller un individu qui n'a pas hésité à calomnier Robert Bourassa.

Mais au-delà de ce détournement de mémoire, toute cette opération témoigne d'un certain malaise à Québec. Lucien Bouchard utilise la nostalgie que ressentent les Québécois pour Robert Bourassa, nostalgie que l'on ne peut que partager devant le piètre spectacle qu'offre le gouvernement, pour masquer le manque d'idées et de vision de l'administration péquiste.

Au lieu de résoudre les problèmes dans les réseaux de la santé et de l'éducation autrement qu'en versant quelques rares millions supplémentaires à des institutions épuisées, le premier ministre préfère promouvoir son option souverainiste à l'étranger en se faisant passer pour le chevalier de la diversité culturelle. Personne n'est dupe de cette mascarade. Si le gouvernement Bouchard était réellement intéressé à protéger la diversité culturelle, il aurait été présent la semaine dernière à Hull pour le lancement de l'Année de la Francophonie. Comment peut-on croire un gouvernement qui se targue de célébrer la diversité à l'étranger, mais qui se montre incapable de la prôner aux côtés des communautés francophones du Canada?

Robert Bourassa n'aurait pas fait cet affront aux francophones du Canada. Il n'aurait pas non plus utilisé les tribunes internationales pour détourner l'attention des Québécois des véritables problèmes qui les préoccupent.

[Traduction]

Le juge James Igloliorte

Le premier juge inuit de Terre-neuve et du Labrador-Félicitations pour l'obtention du prix de grand mérite

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, le 1er mars dernier, à Toronto, quatorze distingués autochtones canadiens ont été honorés pour leur grand talent et leurs réalisations importantes dans les collectivités autochtones du Canada. La Banque Canadienne Impériale de Commerce est la fondatrice et commanditaire du prix.

Si j'interviens à ce sujet, c'est parce qu'un des lauréats était le juge James Igloliorte, le premier juge inuk nommé à la magistrature provinciale de Terre-Neuve et du Labrador. Le juge Igloliorte est un de mes anciens étudiants, et ceux et celles d'entre vous qui ont déjà enseigné ou qui le font actuellement comprendront la joie toute particulière que l'on ressent quand un de ses anciens élèves se distingue. Le juge Igloliorte est un jeune homme compétent, intègre et plein de caractère qui a déjà rendu des jugements sans précédent au nom des peuples autochtones du Canada. Je tiens à lui faire mes plus sincères félicitations non seulement pour sa nomination à la magistrature et parce qu'il est un des rares juges autochtones que compte notre pays, mais parce qu'il constitue un modèle à imiter pour tous les jeunes de la côte du Labrador qui viendront après lui.

Les droits de la personne

La Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je tiens à faire suite à la déclaration du sénateur Cohen. Les signataires de la convention se sont engagés à adopter des mesures immédiates et efficaces, surtout dans les domaines de la technologie, de l'éducation, de la culture et de l'information, pour combattre les injustices qui mènent à la discrimination raciale et pour promouvoir la compréhension, la tolérance et l'amitié entre les nations et les groupes raciaux ou ethniques.

(1420)

Nous sommes heureux de constater que le Canada a pris plusieurs initiatives dans le cadre de ses programmes multiculturels, comme le permet la Loi sur le multiculturalisme canadien adoptée en 1988 à l'initiative de Brian Mulroney, essentiellement pour ce qu'on pourrait qualifier de «sensibilisation de la population». La campagne du 21 mars en est un exemple important et semble atteindre de plus en plus de Canadiens, et même un certain public à l'étranger.

Le travail de la Ligue des droits de la personne de B'nai Brith Canada mérite aussi d'être souligné. L'an dernier, la ligue a organisé une conférence portant sur le problème de la haine sur Internet, sur ses conséquences en matière de droits de la personne et sur les solutions possibles pour limiter le phénomène. L'un des résultats a été l'ajout d'une section de droit sur Rescol, le Réseau scolaire canadien. Ce site Web enseigne des grands principes de droit et s'attache particulièrement aux crimes haineux. Il encourage les jeunes de tout le Canada à communiquer et à profiter de leur diversité pour apprendre les uns des autres. À partir du site, les jeunes peuvent accéder à la discussion pour aborder ces questions avec des étudiants du Canada et du monde entier.

Le symposium international de B'nai Brith Canada ayant trait à la haine sur Internet a rassemblé des policiers et d'autres intéressés ainsi que les membres des groupes qui sont les cibles de ce type de propagande. Cette organisation mérite des éloges pour les efforts qu'elle fait dans le but de diffuser l'information et d'amener les différentes parties à concevoir des moyens légaux, éducatifs et communautaires de contrer la propagande haineuse sur Internet.

Les activités de la GRC dans le domaine des crimes motivés par la haine et les préjugés valent aussi la peine d'être mentionnées. En collaboration avec d'autres corps de police du Canada, la GRC essaie de prévenir, de contrer et d'éliminer les crimes haineux. On note parmi les autres organisations l'Association canadienne des chefs de police et le Centre canadien pour les relations interraciales de la police.

Enfin, nous notons que le gouvernement actuel a pris plusieurs mesures en vue de lutter contre les crimes haineux. Citons, entre autres, l'examen des initiatives internationales en la matière et la publication des résultats de ce dernier, en 1995, sous le titre «Responding to Hate: An International Comparative Review of Program and Policy and Responses to Hate Group Activities»; la publication en janvier 1998 d'un rapport intitulé «Combating Hate on the Internet: An International Comparative Review of Policy Approaches»; la publication en septembre 1998 de la monographie «Standing up to Hate: Legal Remedies Available to Victims of Hate Motivated Activity - A Reference for Advocates»; la publication de divers documents, la diffusion sur Internet de matériel spécialisé, et l'appui à l'émission d'un timbre spécial en l'honneur du cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Ces efforts proactifs et en grande partie préventifs sont salutaires. Ils renforcent le travail des commissions fédérale et provinciales des droits de la personne chargées d'étudier les plaintes de discrimination raciale et d'incitation à la haine; ils devraient donc être intensifiés.

L'honorable Mabel M. DeWare: Honorables sénateurs, j'aimerais poursuivre la discussion au sujet de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Les premiers articles de la Convention internationale sur l'élimination de toutes le formes de discrimination raciale interdisent toute discrimination et prône, le cas échéant, l'application de mesures spéciales en vue de promouvoir l'égalité et les droits de la personne. Le Canada s'est inspiré de ces principes quand il a rédigé sa Loi sur les droits de la personne et la Charte des droits et libertés. La possibilité d'adopter des mesures spéciales à titre de solution indispensable, bien que temporaire, à une situation de désavantage très nette est prévue à l'article 15 de la Charte et à l'article 16 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Le Canada fait figure de pionnier pour sa façon d'aborder et de mettre en oeuvre des mesures spéciales contre la discrimination sur le marché du travail. La notion d'équité en matière d'emploi énoncée par la juge Rosalie Abella - expression utilisée pour différencier la variante canadienne de la version américaine appelée action positive - est maintenant loi au fédéral. L'équité en matière d'emploi, qui est basée sur la détection et la suppression des obstacles à l'égalité des chances sur le marché du travail, ainsi que sur l'adoption de mesures spéciales quand cela se justifie nettement, a pour objet de s'assurer que les causes, et non seulement les symptômes, de la discrimination sont traitées.

Le rapport de la commission Abella «L'égalité en matière d'emploi» a mené à la présentation, par l'honorable Flora MacDonald, en 1985, du premier projet de loi sur l'équité en matière d'emploi, qui a été proclamé loi en 1986. La loi établissait, pour les employeurs d'entreprises du secteur privé sous réglementation fédérale, des critères d'équité en matière d'emploi à l'égard de quatre groupes désignés: les femmes, les autochtones, les personnes handicapées et les membres des minorités visibles.

À la suite du rapport Redway, une loi élargie sur l'équité en matière d'emploi a été adoptée. Cette nouvelle loi s'étendait à la fonction publique fédérale, clarifiait les obligations des employeurs et prévoyait son application par la Commission canadienne des droits de la personne. Elle prévoyait également, le cas échéant, des décisions exécutoires de la Commission d'examen de l'équité en matière d'emploi, constituée à partir du Tribunal des droits de la personne. La nouvelle loi est entrée en vigueur en octobre 1996.

Bien qu'elles comportent des lacunes, les lois canadiennes sur l'équité en matière d'emploi ont contribué à réaliser des progrès importants. Les plus notables sont les victoires remportées par les membres des groupes désignés - surtout les membres des minorités visibles - dans des milieux du secteur privé sous réglementation fédérale comme les banques. Avec l'insertion du secteur public dans la Loi sur l'équité en matière d'emploi, les ministères fédéraux qui n'ont pas pris beaucoup de mesures de fond pour promouvoir l'égalité seront désormais tenus de le faire.

L'équité en matière d'emploi ne concerne pas et n'a jamais concerné les quotas ou la discrimination à rebours. J'admets que, comme tout plan d'entreprise raisonnable, les programmes d'équité en matière d'emploi font appel à des chiffres et à des objectifs mesurables. J'admets qu'ils permettent de déployer des efforts particuliers pour briser le cercle vicieux de l'exclusion du milieu de travail. Cependant, ce ne sont pas là des formes de discrimination. Ce sont des mesures cruciales pour parvenir à une égalité véritable.

Beaucoup de pays s'inspirent de l'expérience du Canada dans le domaine de l'équité en matière d'emploi. Nous avons raison d'être fiers de la façon dont nous, les Canadiens, avons choisi de lutter contre la discrimination tenace dans l'emploi et de réaliser la promesse faite dans la convention et dans des ententes internationales analogues.


Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune d'une délégation de dignitaires de la Chambre des lords du Royaume-Uni, qui visitent notre Parlement pour s'enquérir des systèmes d'information concernant les données parlementaires et le réseau vidéo.

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.


AFFAIRES COURANTES

Régie interne, budgets et administration

Présentation du trente-deuxième rapport du comité

L'honorable Bill Rompkey, président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le mardi 23 mars 1999

Le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son

TRENTE-DEUXIÈME RAPPORT

Votre comité recommande que le Sénat remplace sa politique actuelle sur la vérification de la fiabilité par une politique d'accréditation de la sécurité plus complète.

La nouvelle politique viserait tout le nouveau personnel du Sénat, les entrepreneurs et les fournisseurs de services de l'extérieur.

Les sénateurs sont priés de se rappeler qu'une vérification de sécurité doit être vue comme une procédure systématique de préembauche et que la décision de retenir les services d'une personne, une fois que toutes les formalités ont été suivies, leur appartient toujours en définitive.

Respectueusement soumis,

Le président,
WILLIAM ROMPKEY

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Rompkey, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

La Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces

Projet de loi modificatif-Rapport du comité

L'honorable Terry Stratton, président du comité permanent des finances nationales, présente le rapport suivant:

Le mardi 23 mars 1999

Le Comité permanent des finances nationales a l'honneur de présenter son

TREIZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-65, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 16 mars 1999, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,
TERRY STRATTON

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

(1430)

Les travaux du Sénat

Autorisation au comité des affaires juridiques et constitutionnelles et au comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, je propose:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soient autorisés à siéger pendant la séance du Sénat de demain, le mercredi 24 mars 1999, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

L'ajournement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à demain, le mercredi 24 mars 1999, à 13 h 30.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, est-ce que le leader adjoint du gouvernement peut nous expliquer l'horaire prévu pour demain? Il est possible que le Sénat siège tout l'après-midi parce que le gouvernement veut faire adopter un projet de loi concernant les relations de travail. Pourriez-vous nous donner des explications à ce sujet?

[Traduction]

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, à ce moment-ci, il nous est impossible de dire précisément sur quoi porteront nos travaux demain. Si la Chambre des communes nous renvoie le projet de loi de retour au travail concernant l'AFPC plus tard aujourd'hui, nous pourrons en débattre demain en comité plénier. Bien sûr, si elle ne nous renvoie pas le projet de loi plus tard aujourd'hui, nous l'étudierons jeudi.

De toute façon, des travaux très important sont prévus pour demain. Nous entendrons des hommages au sénateur Orville Phillips et je prévois - et j'espère - qu'ils seront très longs.

De plus, le président Arafat fera une très brève apparition à la tribune. Il sera alors présenté aux sénateurs qui sont invités à une réunion informelle avec lui demain vers 15 h 05. Je conseille aux honorables sénateurs de consulter leur courrier électronique parce que je ne peux fournir plus de détails pour l'instant.

À ce moment-ci, je ne peux dire combien de temps durera la séance demain. C'est pourquoi je demande que les deux comités soient autorisés à siéger en même temps que le Sénat.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, je remercie le leader adjoint du gouvernement de son explication. Comme les honorables sénateurs peuvent le voir, demain sera une journée très occupée. Il serait utile que l'honorable sénateur puisse obtenir le texte du projet de loi de retour au travail; je reconnais qu'il pourrait très bien ne pas correspondre à la forme définitive qu'il aura une fois adopté à l'autre endroit, mais il serait utile d'en avoir le texte pour commencer notre travail de recherche à ce sujet dès aujourd'hui.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je vais tâcher d'obtenir aussitôt que possible des exemplaires pour tous les sénateurs.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

L'Association parlementaire canadienne de l'OTAN

La séance mixte de la Commission sur la sécurité et la défense, de la Commission économique et de la Commission politique de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN-Présentation du rapport de la délégation canadienne

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter le huitième rapport de l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN, qui a représenté le Canada à la séance mixte de la Commission sur la défense et la sécurité, de la Commission économique et de la Commission politique de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, tenue à Bruxelles, en Belgique, les 14 et 15 février 1999.

Terre-Neuve et le Labrador

Le cinquantième anniversaire de l'entrée dans la Confédération-Avis d'interpellation

L'honorable Ethel Cochrane: Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 25 mars 1999, j'attirerai l'attention du Sénat sur le cinquantième anniversaire de l'entrée de Terre-Neuve et du Labrador dans la Confédération du Canada.

PÉRIODE DES QUESTIONS

La défense nationale

La commémoration de la fondation de Halifax-La possible résurrection du régiment des Halifax Rifles-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. J'ai décidé de ne plus lui poser de questions au sujet des hélicoptères, car cela ne sert à rien. Je vais passer à quelque chose qui est plus à sa portée. Soit dit en passant, je l'ai rétrogradé à premier maître de première classe. Je l'ai dépouillé de ses galons. Il lui faudra les gagner à nouveau, peut-être en voulant bien répondre à la présente question. S'il prend des mesures concrètes, avec l'appui du sénateur Moore, il pourra peut-être les ravoir avant l'été.

Ma question a trait à des affaires qui ont déjà été soulevées ici. Le ministre peut-il nous dire et, par l'intermédiaire du Sénat, dire aux Canadiens de la Nouvelle-Écosse et surtout aux habitants de Halifax, s'il va réussir à ressusciter les Halifax Rifles à temps pour les prochaines fêtes d'anniversaire de Halifax?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai discuté de cette affaire avec le ministre de la Défense nationale et avec les autorités locales de Halifax. Jusqu'à maintenant, je ne suis arrivé à rien. À l'instigation du sénateur Forrestall, je vais à nouveau renouveler mes efforts pour atteindre ce but.

Le sénateur Forrestall: J'ai donc eu tort de ne pas vous aiguillonner à cet égard.

La restructuration des unités de réserve dans le Canada atlantique-La fermeture possible du quartier général de la brigade de réserve et la disparition possible des bataillons d'infanterie-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Je crois savoir que la région canadienne de l'Atlantique est sur le point de perdre le quartier général de sa brigade de réserve et peut-être même certains bataillons d'infanterie de réserve. Si le temps le permet, le ministre usera-t-il de ses bons offices pour organiser une séance d'information à l'intention des sénateurs de la cellule consultative des forces terrestres sur la restructuration des forces de réserve dans la région canadienne de l'Atlantique et, en fait, dans l'ensemble du Canada?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): C'est une excellente idée. Je la transmettrai à mon collègue, le ministre de la Défense nationale.

Le cabinet du premier ministre

Félicitations à l'occasion de la nomination d'un ministre chargé des sans-abri-Demande de renseignements détaillés

L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, on signale dans le Toronto Star aujourd'hui que le premier ministre annoncera la nomination de l'honorable Claudette Bradshaw, ministre du Travail, au poste de ministre chargée des sans-abri.

À titre de coprésidente du groupe de travail progressiste-conservateur sur la pauvreté et de concitoyenne du Nouveau-Brunswick, je félicite Mme Bradshaw, et je félicite aussi le gouvernement de cette nomination. Étant donné sa longue expérience dans le domaine social et sa participation active au programme Nouveau départ de Moncton, Mme Bradshaw a certainement les compétences voulues pour diriger les efforts visant à résoudre le problème des sans-abri. Je suis persuadée que nous pouvons attendre de ce ministère de splendides résultats concrets.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il communiquer au Sénat le mandat de ce nouveau ministère?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Je me ferai un plaisir de le faire. J'ai en main l'annonce que le premier ministre a faite.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Lisez-la.

Le sénateur Graham: Ce sera un plaisir. Lorsque le texte aura été traduit, je le déposerai.

(1440)

Le premier ministre a annoncé aujourd'hui qu'il a confié la coordination des activités du gouvernement du Canada relativement aux sans-abri à la ministre du Travail, Mme Claudette Bradshaw.

La situation des sans-abri est un problème urgent et complexe, et tous les paliers de gouvernement - fédéral, provincial, territorial et municipal - ainsi que les collectivités doivent contribuer à le résoudre. Avec son expérience de travail dans le domaine social en milieu communautaire, la ministre est la personne tout indiquée pour s'assurer que les initiatives fédérales qui touchent directement les besoins des sans-abri s'articulent avec celles des autres gouvernements et des collectivités locales. Avant de se lancer en politique, Mme Bradshaw a représenté la région de l'Atlantique au Conseil canadien du développement social. De plus, elle a été membre du Groupe de travail du Nouveau-Brunswick sur l'habitation et de la Coalition sur l'habitation de Moncton. Elle a également fondé le programme Nouveau départ de Moncton.

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, je voudrais obtenir un éclaircissement. S'agit-il d'un poste ministériel ou est-ce simplement un rôle de coordination que la titulaire assumera dans l'exercice de ses fonctions actuelles de ministre du Travail?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je ne crois pas qu'il est question d'un poste ministériel. Je pense qu'il s'agit essentiellement d'un rôle de coordination. Je crois savoir que, plus tard cette semaine, la ministre Bradshaw et d'autres ministres participeront à une conférence qui aura lieu à Toronto et qui traitera du problème des sans-abri.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, il s'agit d'une excellente nomination, et j'en félicite le gouvernement et le premier ministre. Mme Bradshaw est la personne idéale pour assumer cette tâche.

Pouvons-nous supposer que son poste sera celui de «ministre responsable de l'élimination de l'itinérance»?

Le sénateur Graham: Je ne sais pas. C'est la prérogative du premier ministre de désigner les fonctions de façon officielle.

D'ailleurs, la ministre Bradshaw sera accompagnée du ministre des Transports, M. Collenette, à la conférence qui se tiendra le 25 mars à Toronto. Je présume que le gouvernement fera une déclaration sur ce qu'il appelle le sommet sur les sans-abri, qui se tiendra à la demande du maire de Toronto, Mel Lastman.

Le Conseil du Trésor

L'équité en matière d'emploi au Sénat-La position du gouvernement

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, depuis deux ou trois sessions, il est question de l'élimination de la discrimination raciale, et cela prend diverses formes. À mon avis, cela comprend des choses comme l'équité en matière d'emploi, la justice et l'égalité des chances pour tous. J'estime que le meilleur programme d'équité en matière d'emploi jamais entrepris par le gouvernement du Canada, et je félicite ce dernier d'avoir adopté un tel programme, a été le programme d'utilisation des deux langues officielles sur la colline. Je pense que son succès a dépassé les attentes de ceux-là mêmes qui en avaient fait la demande. À l'instar des autres sénateurs, sans doute, mais contrairement à des parlementaires de l'autre endroit, j'applaudis à cette initiative, et j'estime que nous devrions en être reconnaissants.

Ma question, qui s'adresse au leader du gouvernement au Sénat, est la suivante: depuis que nous parlons de discrimination raciale et d'égalité des chances, nous avons soulevé cette question à maintes reprises, tant ici qu'au sein du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration. Le ministre sait-il dans quelle mesure nos efforts ont assuré une meilleure représentation de la composition du pays aujourd'hui?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Di Nino soulève une question que son compagnon de banquette, le sénateur Oliver, a déjà abordée à plusieurs reprises. J'en ai discuté avec le président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, qui m'a assuré que le comité était au courant des observations qui avaient été faites.

Comme je l'ai dit pas plus tard que la semaine dernière, il incombe à tous les honorables sénateurs de tenir compte, lorsqu'ils embauchent du personnel, des considérations sur lesquelles reviennent souvent le sénateur Oliver et certains de ses collègues au Sénat. Le président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a signalé que peu d'employés ont été embauchés au Sénat au cours des quatre ou cinq dernières années. Il a ajouté qu'il nous fera bientôt rapport des progrès réalisés dans ce domaine.

Le sénateur Di Nino: Le ministre, ou peut-être le président du comité, peut-il nous donner une idée de la date à laquelle on nous fera rapport des progrès réalisés?

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, en fait, j'ai ici un rapport que j'ai reçu aujourd'hui du greffier. Il fera l'objet d'une discussion en comité dans les meilleurs délais. Je prie donc tous les membres du comité de le lire et de se préparer à en discuter. Il figure parmi les principaux points à l'ordre du jour. Nous prévoyons l'aborder bientôt car nous estimons que c'est une question très importante.

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai une réponse à la question que l'honorable sénateur Ethel Cochrane a posée au Sénat le 3 mars 1999 au sujet de la Fondation des bourses d'études du millénaire, de la nomination du grand chef de l'Assemblée des Premières nations au conseil d'administration de la fondation et des détails du salaire versé à ce dernier; j'ai une réponse à la question que l'honorable sénateur Janis Johnson a posée au Sénat le 9 mars 1999 au sujet du stockage de déchets de combustible nucléaire dans les régions éloignées du Nord et des discussions avec l'Assemblée des Premières nations; et j'ai une réponse à la question que l'honorable sénateur Donald H. Oliver a posée au Sénat le 17 février 1999 au sujet du Fonds de l'assurance-emploi, de l'accumulation d'un excédent dans la caisse et des réductions des cotisations annoncées dans le budget.

Le développement des ressources humaines

La Fondation des bourses d'études du millénaire-La nomination du grand chef de l'Assemblée des Premières nations au conseil d'administration-La demande de détails au sujet du salaire

(Réponse à la question posée le 3 mars 1999 par l'honorable Ethel Cochrane)

La loi relative à la Fondation des bourses d'études du millénaire prévoit que les administrateurs peuvent toucher une rémunération déterminée par le conseil d'administration de la fondation. Les administrateurs peuvent aussi obtenir le remboursement des dépenses raisonnables engagées dans l'exercice de leurs fonctions ou à l'occasion de leur participation aux réunions du conseil d'administration.

Toute rémunération est versée par la Fondation qui, en vertu de la loi, est un organisme indépendant du gouvernement.

Le conseil d'administration de la Fondation n'a pas encore abordé cette question et a veillé plutôt à ce que les bourses soient prêtes à être remises aux étudiants dans les meilleurs délais.

Les ressources naturelles

L'entreposage des déchets de combustible nucléaire dans les régions éloignées du Nord-Les discussions avec l'Assemblée des Premières nations-La position du gouvernement

(Réponse à la question soulevée le 9 mars 1999 par l'honorable Janis Johnson)

Toutes les allégations concernant l'enfouissement de déchets nucléaires dans un territoire autochtone sont complètement fausses.

En novembre dernier, le gouvernement préparait sa réponse aux recommandations de la commission Seaborn. L'une de ces recommandations se lisait comme suit: «Le gouvernement fédéral devrait immédiatement lancer avec des fonds suffisants un processus de participation des peuples autochtones, lesquels devraient se charger de la conception et de la mise en application de ce processus». Le 12 novembre 1998, des représentants du ministère des Ressources naturelles et du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ont rencontré des représentants de l'Assemblée des Premières nations (APN) dans le but de leur demander des conseils sur la meilleure façon de lancer le processus de consultation auprès des groupes autochtones si le gouvernement fédéral décidait d'accepter la recommandation de la commission Seaborn. Les représentants de l'APN ont été très obligeants en remettant aux représentants du gouvernement une liste des membres à qui envoyer la réponse formulée par le gouvernement et avec qui établir un premier lien si le gouvernement en venait à lancer le processus de consultation auprès des autochtones.

En décembre 1998, lorsque le gouvernement a publié sa réponse au rapport de la commission Seaborn, le ministre des Ressources naturelles a écrit au chef de l'APN, aux chefs des Inuit Tapirisat du Canada, au Métis National Council, au Congrès des peuples autochtones et à l'Association des femmes autochtones du Canada. La lettre indiquait clairement le but de la réunion: concevoir un processus qui permettrait aux peuples autochtones de contribuer de façon significative à l'élaboration de l'approche qui serait adoptée pour la gestion à long terme des déchets nucléaires.

L'enfouissement en profondeur dans des formations rocheuses stables du Bouclier canadien est la seule option retenue pour l'évacuation des déchets de combustible nucléaire. Cette méthode a été élaborée par Énergie atomique du Canada limitée (EACL) et satisfait aux exigences réglementaires de la Commission de contrôle de l'énergie atomique (CCEA), qui stipulent que l'évacuation ne devrait plus faire l'objet d'une surveillance institutionnelle après un délai raisonnable et devrait assurer une sécurité passive à long terme.

La commission Seaborn a recommandé l'élaboration de méthodes de gestion à long terme et réalisables, particulièrement le stockage sur le site du réacteur, le stockage en surface dans un emplacement central et le stockage souterrain dans un emplacement central.

Dans sa réponse du 3 décembre 1998 adressée à la commission Seaborn, le gouvernement convenait qu'il fallait élaborer d'autres méthodes de stockage et en comparer les risques, les coûts et les avantages. Comme le concept élaboré par EACL, ces méthodes doivent permettre de maintenir l'équilibre entre l'exigence réglementaire actuelle liée à la sécurité passive et la capacité de maintenir la surveillance institutionnelle.

Les déchets de combustible nucléaire sont les grappes de combustible rejetées par les 22 réacteurs CANDU canadiens. Vingt de ces réacteurs appartiennent à Ontario Hydro, un à Hydro-Québec et un à la Société d'énergie du Nouveau-Brunswick. Ces trois services publics appartiennent à leur gouvernement provincial respectif. Le prototype et les réacteurs de recherche d'EACL produisent une petite quantité de déchets. Chaque grappe de combustible nucléaire permet de produire environ un million de kilowattheures d'électricité, soit la quantité nécessaire pour approvisionner environ 100 maisons par année et équivalant à la combustion de 400 tonnes de charbon.

La durée de vie d'une grappe de combustible dans un réacteur est d'environ 18 mois. À la fin de cette période, les grappes sont retirées du réacteur et entreposées dans l'un des bassins d'eau situés sur le site du réacteur. Après dix ans de refroidissement et de décroissance de la radioactivité, les grappes sont retirées des bassins et entreposées dans des silos en béton aménagés en surface, soit sur le site du réacteur où elles ont été utilisées, soit dans un emplacement central. À l'heure actuelle, environ 1,3 million de grappes de combustible provenant des réacteurs CANDU canadiens sont entreposées sur le site des réacteurs. Cette quantité équivaut aux déchets produits par un réacteur pendant 344 ans et à 1200 terawattheures d'électricité. Ces déchets rempliraient trois patinoires de hockey de dimension réglementaire jusqu'au haut des rampes.

Le Fonds de l'assurance-emploi

L'accumulation d'un excédent dans la caisse-L'insuffisance des réductions des cotisations annoncées dans le budget

(Réponse à la question soulevée le 17 février 1999 par l'honorable Donald H. Oliver)

Le Compte d'assurance-emploi est intégré aux opérations générales du gouvernement depuis 1986, tel que le recommandait le vérificateur général. En vertu du système actuel, tout excédent qui s'y accumule est utilisé temporairement par le gouvernement, qui verse des intérêts au compte.

Les Canadiens s'attendent à ce que leur gouvernement fasse des choix intelligents sur la façon de dépenser leur argent judicieusement. Le présent gouvernement pense avoir fait les choix qui s'imposaient - c'est-à-dire dans la santé; dans les compétences et l'éducation supérieure; et dans un allégement fiscal pour les Canadiens.

Le débat sur le Compte d'assurance-emploi est un débat constant que nous devrions poursuivre et même encourager. C'est ensemble que nous devons décider de la façon dont les programmes qui profitent à tous les Canadiens devraient être financés.

Dépôt de la réponse à une question inscrite au Feuilleton

La défense nationale-Le nouveau manège militaire à Shawinigan

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 140 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.

Projet de loi d'intérêt privé

L'Office épiscopal catholique romain du Mackenzie-Message des Communes

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes le projet de loi S-20, Loi modifiant la Loi constituant en personne morale l'Office épiscopal catholique romain du Mackenzie, accompagné d'un message où elles disent avoir adopté le projet de loi sans amendement.

La Loi sur les allocations aux anciens combattants
La Loi sur les pensions
La Loi sur les avantages liés à la guerre pour les anciens combattants de la marine marchande et les civils
La Loi sur le ministère des Anciens combattants
La Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel)
La Loi sur la prise en charge des prestations de la Commission de secours d'Halifax

Projet de loi modificatif-Rapport du comité

Permission ayant été accordée de revenir aux rapports de comités:

L'honorable Lowell Murray, président du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, présente le rapport suivant:

Le mardi 23 mars 1999

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a l'honneur de présenter son

DIX-HUITIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-61, Loi modifiant la Loi sur les allocations aux anciens combattants, la Loi sur les pensions, la Loi sur les avantages liés à la guerre pour les anciens combattants de la marine marchande et les civils, la Loi sur le ministère des Anciens combattants, la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), la Loi sur la prise en charge des prestations de la commission de secours d'Halifax et d'autres lois en conséquence, a étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans modification, mais avec l'observation suivante:

Que le gouvernement inscrive dans ses priorités immédiates la signature d'un règlement équitable avec les marins marchands.

Respectueusement soumis,

Le président,
LOWELL MURRAY

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Le programme d'échange de pages avec la Chambre des communes

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais vous présenter un page de la Chambre des communes qui a été choisi pour participer au programme d'échange avec le Sénat pour cette semaine du 22 au 26 mars.

Lisa Robichaud, originaire de Cavendish, Île-du-Prince-Édouard, poursuit ses études à la faculté des lettres de l'Université d'Ottawa. Je lui souhaite la bienvenue au Sénat.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur l'Agence des douanes et du revenu du Canada

Troisième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) propose: Que le projet de loi C-43, Loi portant création de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, soit lu une troisième fois.

- Honorables sénateurs, je suis très heureuse d'ouvrir le débat de troisième lecture du projet de loi. Je voudrais tout d'abord souligner le travail accompli par le comité sénatorial permanent des finances nationales. Les membres de ce comité ont fait un excellent travail en ce qui concerne l'examen des différents aspects de cette mesure législative et l'examen des nombreux témoins qui ont comparu durant l'étude détaillée de ce projet de loi.

[Français]

Les parties du projet de loi C-43 qui ont retenu l'attention du comité sont les éléments de la nouvelle agence concernant les ressources humaines et l'obligation de rendre compte. Mon discours portera sur ces aspects du projet de loi.

[Traduction]

Les consultations intensives menées par Revenu Canada afin de déterminer comment améliorer les procédures relatives aux ressources humaines ont permis de révéler que les employés, les représentants syndicaux et les gestionnaires étaient catégoriques sur un point, à savoir que le système existant est complexe, rigoriste, long et qu'il prend du temps. Des adjoints du vérificateur général ont témoigné devant les membres du comité du fait que le système actuel entraîne de longs retards dans les méthodes de concours.

L'un des témoins, M. Minto, a donné au comité l'exemple d'un concours pour un conseiller en impôts au niveau international. Ce concours a fermé en octobre 1996, mais la liste d'admissibilité n'a été établie que 18 mois plus tard. Ce n'est pas inhabituel. Il faut actuellement jusqu'à 12 mois pour doter un poste à Revenu Canada. Comme vous pouvez le voir, honorables sénateurs, maintenir le statu quoi n'est pas une option, pas plus que d'attendre une restructuration majeure de l'ensemble de la fonction publique dans le secteur des ressources humaines.

La charge de travail de Revenu Canada augmente rapidement. La demande de services commerciaux augmente de façon significative. Pour devenir une administration moderne, Revenu Canada doit avoir la flexibilité opérationnelle de rationaliser et d'adapter son système de ressources humaines. Le statut d'agence est nécessaire pour satisfaire aux besoins uniques de Revenu Canada et de ses employés.

Le pouvoir qu'aura l'agence de créer son propre programme de dotation, conformément aux principes et directives énoncés, lui permettra de recruter du personnel hautement qualifié de façon plus efficace et plus rapide.

La réduction du nombre de groupes et niveaux professionnels, qui serait rendue possible en raison du nouveau statut d'agence, faciliterait les mutations latérales et accroîtrait du même coup la mobilité de l'emploi et permettrait de répondre aux exigences des clients en matière de services. Certains ont fait valoir, durant l'étude du projet de loi, que les employés de Revenu Canada perdraient leurs emplois une fois qu'ils auraient été transférés à l'agence et que leur garantie d'emploi de deux ans tomberait. Il n'en est rien. Honorables sénateurs, je voudrais maintenant passer en revue certaines garanties de protection accordée aux employés de Revenu Canada, une fois que le ministère sera devenu une agence.

Tous les employés de Revenu Canada seront des employés de l'agence, conserveront les mêmes postes et rempliront les mêmes tâches. Les régimes de prestations comme l'assurance-santé, l'assurance-invalidité, les régimes de soins dentaires, les jours de congés accumulés et les prestations de pensions prévues en vertu de la Loi sur la pension de la fonction publique seront également transférés. Les conventions collectives en vigueur au moment du transfert continueront de s'appliquer jusqu'au moment de leur renégociation. Les employés bénéficieront de tous règlements déjà négociés en matière d'équité salariale. Ils continueront d'avoir accès aux recours prévus dans la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Le projet de loi C-43 prévoit des recours en matière de dotation, ainsi qu'une évaluation indépendante de tous les mécanismes de recours après trois ans.

Les témoins qui ont comparu devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales ont recommandé d'apporter des amendements au projet de loi dans le domaine de la gestion des ressources humaines. Permettez-moi d'expliquer brièvement pourquoi ces modifications rendraient les mécanismes de gestion des ressources humaines moins efficaces, moins transparents et plus lourds.

Le premier amendement, qui concerne le recours à une tierce partie et les mécanismes de réparation, ajouterait une nouvelle partie à l'article 59 du projet de loi. Revenu Canada veut préserver les droits fondamentaux des employés tout en conservant une flexibilité. C'est pourquoi le ministère a choisi de ne pas intégrer le régime de gestion des ressources humaines de l'agence dans la loi. Le ministère favorise plutôt un système sans contentieux et flexible, comportant une obligation de rendre des comptes au Parlement. Le mécanisme de responsabilité envers le Parlement, prévu dans le projet de loi C-43, remplacera le processus législatif.

[Français]

De plus, l'article 54 du projet de loi C-43 garantit des mécanismes de recours à l'intention des employeurs et des employés.

[Traduction]

Avec la nouvelle agence, les employés auront droit à différentes options qui sont justes et opportunes, dont celle d'un recours à une tierce partie indépendante. Voilà qui diffère passablement des processus compliqués et légalistes d'aujourd'hui, lesquels sont autant de sources de frustration tant pour les employés que pour les cadres.

De plus, dans le cadre de la nouvelle agence, le système de classification et de recours ne sera pas modifié et restera assujetti à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, qui regroupe les règles fondamentales régissant les relations avec les syndicats.

On a également proposé que l'article 51 du projet de loi C-43 soit modifié de façon que les directives du Conseil national mixte et l'effectif de la direction soient transférées à l'agence. Ces directives consistent en des ententes relatives aux conditions de travail - santé et sécurité, indemnités de déplacement et de réinstallation, primes de bilinguisme, et ainsi de suite.

Honorables sénateurs, la Loi sur la gestion des finances publiques, à laquelle l'agence est assujettie, indique qu'il n'est pas nécessaire que les directives du Conseil national mixte soient transférées quand une composante de la fonction publique devient un employeur distinct. Cette mesure vise à faire en sorte que des organismes tels que la nouvelle agence puissent adapter ces directives à leur contexte forcément particulier. Il ne s'ensuit pas cependant que les politiques énoncées dans ces ententes vont disparaître.

À cet égard, l'agence travaillera de concert avec les syndicats à l'élaboration de politiques qui soient justes et qui répondent aux besoins de la direction et des employés.

[Français]

En fait, une équipe partenaire syndicale travaille déjà à la mise en place des mécanismes et devrait soumettre des recommandations sous peu.

[Traduction]

La constitution de cette équipe démontre, à mon avis, de façon probante que l'agence est résolue à faire preuve de coopération et d'ouverture dans son traitement des questions relatives aux relations de travail.

Un autre amendement proposé en matière de gestion des ressources humaines visait le paragraphe 54(2) du projet de loi et prévoyait la négociation de la dotation en personnel. En vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, la dotation et la classification ne sont pas négociées actuellement. Elles ne sont donc pas visées par les conventions collectives en vigueur. Il continuera d'en être ainsi au sein de la nouvelle agence.

Je voudrais réitérer ce que le ministre Dhaliwal a déclaré devant le comité sénatorial permanent des finances nationales, à savoir que le passage au statut d'agence ne signifie pas que les employés de l'agence ne seront pas fonctionnaires. Au contraire, ils demeureront membres de la fonction publique fédérale. La Commission de la fonction publique fera rapport à l'agence et vérifiera si son programme de dotation est conforme aux principes énoncés dans le résumé du plan général d'entreprise. Ce rapport figurera dans le rapport annuel de l'agence au Parlement. De plus, au terme des trois premières années et périodiquement par la suite, l'agence soumettra son système de recours à une évaluation indépendante dont elle publiera les résultats dans son rapport annuel. La Commission de la fonction publique pourra aussi s'assurer que les principes de dotation de l'agence sont compatibles avec ceux qui sont prescrits dans la Loi sur l'emploi dans la fonction publique et publier ses conclusions à ce sujet dans son rapport annuel au Parlement.

Honorables sénateurs, j'espère que vous trouverez ces garanties rassurantes.

Le dernier amendement proposé dont je parlerai aujourd'hui vise l'article 31 du projet de loi et porte sur la présence de l'agent négociateur au conseil d'administration de l'agence. Je voudrais souligner que lorsqu'il choisira les membres de ce conseil, le gouvernement privilégiera les candidats qui auront l'expérience et les aptitudes nécessaires à l'exercice des fonctions. À cet égard, rien ne l'empêchera d'examiner la candidature de personnes spécialistes des relations de travail que les syndicats présents à l'agence pourraient recommander. Toutefois, dans l'éventualité où elles seraient nommées au conseil d'administration, ces personnes devraient agir dans l'intérêt de l'agence, et non défendre un groupe ou un intérêt particuliers.

Honorables sénateurs, les dispositions sur les comptes à rendre ont également été une question prise très au sérieux par un grand nombre de témoins qui ont comparu devant le comité des finances nationales. Je crois cependant que les mesures à cet égard seront renforcées par le projet de loi C-43. Ainsi, la création d'une agence permet de répondre aux préoccupations des provinces et des territoires qui veulent avoir davantage voix au chapitre dans l'administration de l'impôt, puisqu'elles pourront proposer des candidats au conseil de direction.

(1500)

Dans le cas du Nouveau-Brunswick, le gouvernement fédéral administre l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés, les crédits et remboursements, la taxe de vente harmonisée et les taxes à la frontière, ainsi que les programmes provinciaux de prestations. Pourtant, cette province n'a actuellement aucun représentant à Revenu Canada.

Je serais la première à vous dire, honorables sénateurs, que Revenu Canada se charge d'administrer davantage de programmes pour le Nouveau-Brunswick que pour toute autre province, mais le ministère s'occupe de la fiscalité dans cinq domaines pour la Colombie-Britannique, dans quatre pour le Manitoba et dans cinq pour la Saskatchewan. La création de l'agence et la mise sur pied du conseil de direction assurera une représentation aux provinces.

[Français]

Le projet de loi oblige aussi l'agence à consulter les provinces et les territoires et à rendre compte de ce qui accroît sa responsabilité à l'égard de ces programmes et de ces services.

[Traduction]

De plus, le commissaire de l'agence tiendra des séances annuelles pour rendre des comptes aux ministres des Finances des provinces et des territoires qui lui auront confié l'administration d'un impôt ou d'un programme.

Pour conclure, je signale que le vérificateur général adjoint a déclaré, lorsque le comité l'a interrogé sur les mesures concernant la reddition des comptes, que son bureau avait été consulté au sujet des dispositions sur la vérification et la reddition des comptes figurant le projet de loi et que, pour sa part, il les trouvait acceptables telles quelles.

Je vous remercie, honorables sénateurs, du temps que vous avez consacré à l'étude de ce projet de loi et de l'occasion que vous m'avez donnée de commenter et, peut-être, d'élucider certains des problèmes soulevés au comité.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, puis-je poser une question au sénateur Carstairs?

Honorables sénateurs, madame le sénateur Carstairs pourrait-elle nous dire si elle s'attend à ce que l'exposé qu'elle vient de donner à l'étape de la troisième lecture soit celui qui se retrouvera sur le site Web de Revenu Canada, ou bien est-ce qu'on va y déposer un exposé différent, comme on l'a fait à l'étape de la deuxième lecture?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je peux informer le sénateur Kinsella, ainsi que d'autres, que j'ai été très choquée d'apprendre que, d'abord, le discours avait été publié sur le site Web sans que l'on m'ait consultée et que, de plus, ce n'était même pas le bon discours. On m'a assurée que la situation avait été corrigée et que, à l'avenir, on me demanderait la permission, puis qu'on vérifierait dans le hansard du Sénat pour utiliser la bonne version du discours quand il s'agirait du Sénat du Canada.

Le sénateur Kinsella: Madame le sénateur pourrait-elle faire savoir à la Chambre si le discours qu'elle vient de prononcer est l'un des deux discours qui auraient coûté 23 000 $ à Revenu Canada, d'après ce qu'on en dit?

Le sénateur Carstairs: Nous avons fait enquête pour savoir si l'un ou l'autre des discours que j'ai prononcés aurait fait partie de cette catégorie dont parle le sénateur, mais je n'ai pas encore reçu de réponse. Comme d'autres, Revenu Canada aurait dû apprendre que je ne prononce jamais un discours si on me le fait parvenir.

Le sénateur Kinsella: Avant de passer à autre chose, honorables sénateurs, madame le sénateur croit-elle qu'elle saura un jour le fond de l'histoire? Le ministère du Revenu aurait-il vraiment passé un contrat d'une valeur de 23 000 $ pour la rédaction de deux discours que quelqu'un devait lire au cours du débat sur le projet de loi C-43?

Le sénateur Carstairs: Si je ne m'abuse, c'est là une question qui a été posée au Sénat la semaine dernière. J'imagine donc qu'on y répondra par écrit en temps et lieu.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers

Deuxième lecture-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Graham, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Carstairs, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-55, Loi concernant les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers de périodiques.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, dans son intervention lors de la deuxième lecture du projet de loi C-55, le sénateur Graham a commencé par nous présenter d'une façon très poétique et romantique son évaluation de l'industrie canadienne des périodiques, soulignant avec fierté que les premiers périodiques avaient été publiés à Halifax dès 1790. Il a rapporté que le périodique en question contenait une définition de son contenu et se présentait comme:

... une collection des articles les plus importants parus dans les périodiques de Grande-Bretagne, d'Irlande et d'Amérique.

Il aurait également pu ajouter que l'imprimeur avait déploré le fait que le Nova Scotia Magazine, comme il était connu, ne renfermait pas

... d'exemples du génie autochtone.

et que c'était regrettable:

... que des hommes ayant des talents et du temps ne soient pas portés à communiquer leurs réflexions.

Force est donc de constater que le contenu étranger n'est pas un phénomène nouveau, du moins pas au Canada.

Si le Nova Scotia Magazine peut prétendre être le premier du genre à avoir été publié au Canada, je dois souligner que c'est au Québec que le premier périodique bilingue a été publié. En août 1792 paraissait le premier numéro bilingue du Quebec Magazine, or useful and entertaining repository of science, morals, history, politics, et cetera, particularly adapted for the use of British America. / Le magasin du Québec, un recueil utile et amusant de Littérature, Histoire, Politique, et cetera, et cetera. particulièrement adapté à l'usage de l'Amérique britannique.

Une société de gens de lettres de Québec faisait paraître cette publication.

Ce qui différenciait cette publication du Nova Scotia Magazine, ce n'est pas seulement qu'elle était bilingue, mais aussi qu'elle présentait des articles ayant une valeur pratique qui sont toujours aussi pertinents aujourd'hui, par exemple, sur la manière de conserver des oeufs frais et sur la nécessité de s'instruire. Ces deux publications avaient toutefois en commun le fait qu'elles reflétaient une composante culturelle caractéristique de leurs collectivités respectives, des composantes culturelles qui, au fil des années, se sont jointes à tant d'autres pour définir le Canada d'aujourd'hui.

Cela dit, l'expression «culture canadienne» me donne beaucoup de mal, parce qu'elle veut dire différentes choses pour différentes personnes. Diverses interprétations sont trop souvent adoptées par ceux qui défendent des intérêts différents, mais pas toujours compatibles. Par exemple, dans divers secteurs, les règles sur la propriété sont imposées au nom de l'identité canadienne, et pourtant la gestion étrangère est répandue et n'est pas remise en question.

Jeudi dernier, le sénateur Tkachuk a présenté un ardent plaidoyer en faveur du hockey, disant que ce sport contribuait plus que n'importe quoi d'autre à l'unité du pays. Pourtant, des 30 équipes de la Ligue nationale de hockey, après l'expansion, il n'en restera que six au Canada, soit deux de moins qu'il y a à peine quelques années. Les dirigeants de la LNH sont à New York. La plupart des joueurs étoiles sont des étrangers. Les salaires sont versés en argent américain. Le calendrier des parties est dressé en fonction d'un réseau de télévision américain et respecte le calendrier des concerts de musique rock et des parties de basket-ball professionnel qui se tiennent dans les mêmes arénas.

Peu importe les difficultés que soulève la signification de la culture canadienne et de l'identité canadienne, personnellement, je doute que ce soit le facteur déterminant pour évaluer le projet de loi à l'étude. Le sénateur Graham nous a dit:

Les principes énoncés dans ce projet de loi sont de protéger la culture canadienne et de donner aux auteurs et aux rédacteurs en chef des périodiques canadiens une chance de faire leur travail...

Comment on peut protéger la culture canadienne en créant une infraction criminelle pour celui qui fait paraître de la publicité dans un périodique américain me mystifie et me fait peur. Le sénateur Graham est plus sûr de son fait quand il dit que le projet de loi doit aider à garantir la viabilité continue de notre industrie du magazine. Je n'ai rien à redire à cela. Mais je ne suis pas convaincu que le projet de loi C-55 soit le bon moyen d'y arriver.

Le projet de loi dont nous sommes saisis constitue la deuxième tentative du gouvernement d'interdire la publicité canadienne dans les éditions à tirage dédoublé de magazines importés au Canada. L'Organisation mondiale du commerce a jugé que sa première tentative enfreignait l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce. Maintenant, le sénateur Graham nous assure que:

[...] les dispositions du projet de loi C-55 sont conformes aux obligations contractées par le Canada aux termes de l'Accord général sur le commerce des services. Elles sont également conformes, bien sûr, aux obligations du Canada en vertu de l'ALENA.

Je rappelle aux honorables sénateurs que des assurances semblables ont été données lorsque le prédécesseur du projet de loi C-55 a été débattu au Parlement. Comme ces assurances sont réitérées par les mêmes parrains, elles sonnent un peu creux.

Ce n'est pas la première fois que des assurances de ce genre ne sont pas convaincantes. Lorsque nous avons été saisis du projet de loi visant à interdire l'importation de MMT et son commerce entre les provinces, le gouvernement n'avait pas hésité à soutenir que ce projet de loi était conforme aux accords internationaux et interprovinciaux. Le fabricant a présenté une réclamation en vertu de l'ALENA et certaines provinces, l'Alberta en tête, ont confirmé que le projet de loi violait l'accord sur le commerce interprovincial. Un groupe spécial de règlement du différend a été constitué en vertu de cet accord commercial et s'est prononcé en faveur des provinces. Le gouvernement fédéral a non seulement invalidé le projet de loi, il a également indemnisé le fabriquant d'un montant de 20 millions de dollars, avant même le début des audiences.

Par conséquent, peut-on s'étonner qu'il n'est plus possible d'accorder une grande crédibilité aux assurances données par ceux qui agissent avec une telle maladresse et qui font payer si cher aux contribuables canadiens?

(1510)

On a proposé ailleurs que le Canada et les États-Unis soumettent le projet de loi à l'Organisation mondiale du commerce avant de l'adopter. Le gouvernement serait bien avisé de faire cela pour éviter une autre décision officielle négative. Le Canada milite pour la nomination d'un ancien ministre à la présidence de l'OMC, montrant ainsi qu'il a confiance dans l'organisation, alors que les États-Unis ont toutes les raisons de respecter ses décisions et certes sur la question dont nous sommes ici saisis.

Outre le respect des obligations internationales, celui des dispositions de la Charte concernant la liberté d'expression a retenu peu ou prou l'attention jusqu'à maintenant. Le sénateur Kinsella développera cette question au cours de son intervention, et j'exhorte le gouvernement à vraiment donner suite à ses observations et propositions.

Je ne suis pas étonné que le sénateur Graham n'ait même pas parlé du caractère constitutionnel et légal du projet de loi C-55. Le bilan du gouvernement à cet égard est plutôt sombre. Il y a le fiasco coûteux du MMT. Et qui peut oublier l'infâme projet de loi sur l'aéroport Pearson et la tentative maladroite de reporter le remaniement électoral après les élections suivantes? Dans le même ordre d'idées, le projet de loi S-22 sur le précontrôle dont un comité sénatorial est maintenant saisi comporte des dispositions que beaucoup considèrent comme des empiètements sur la souveraineté du Canada.

Comment peut-on justifier que des projets de loi comportant de si graves lacunes soient approuvés par ceux-là mêmes qui sont chargés d'avertir le gouvernement et de prévenir le Parlement de tout excès possible dans le cadre du processus législatif? Le gouvernement cherche-t-il à nous faire comprendre qu'il ne considère plus qu'il fait partie du Parlement, mais qu'il est au-dessus et même détaché du Parlement? Je digresse peut-être, mais la façon dont le projet de loi C-55 est étudié soulève des questions troublantes qui ne peuvent rester sans réponse, car les parlementaires élus deviennent, intentionnellement ou non, partie à un exercice qui remet en question leur raison d'être.

Au sujet du projet de loi C-55, le sénateur Graham a déclaré la semaine dernière qu'il n'était au courant d'aucune négociation entre les États-Unis et le Canada, qu'il n'avait pas l'intention, en tant que parrain du projet de loi ou leader du gouvernement, de proposer des amendements et qu'il ne savait pas si le gouvernement avait l'intention d'apporter des amendements. Pourtant, la veille, à l'émission radiophonique de CBC intitulée As It Happens, la ministre du Patrimoine canadien, qui a présenté le projet de loi à l'autre endroit, affirmait:

Si les Américains mettaient sur la table des propositions conformes au projet de loi mais nécessitant un amendement au projet de loi, l'amendement serait apporté au Sénat et le projet de loi serait par la suite renvoyé à la Chambre des communes.

Il est typique du gouvernement actuel que des ministres se contredisent mutuellement, et comme le premier ministre montre l'exemple à cet égard, je ne m'attarderai pas à ce tout dernier exemple de confusion au Cabinet.

Ce qui devrait troubler tous les parlementaires, et surtout les députés à l'autre endroit, c'est que le gouvernement a invité les Communes à adopter un projet de loi en sachant fort bien qu'il ferait l'objet d'amendements de la part du gouvernement pendant son étude au Sénat.

Quand, à la même émission de radio, on lui a demandé: «Le dossier des magazines est-il maintenant réglé?», la ministre du Patrimoine canadien a répondu: «Il n'est pas encore réglé, mais il finira par l'être.» Par qui, pourrions-nous demander? Par des négociateurs, réunis à huis clos à Washington, certainement pas par le Parlement: voilà comment il serait juste d'interpréter cette réponse.

Pour ceux qui pourraient penser que j'interprète mal les paroles de la ministre, je continue à citer l'interview:

Question: Pourquoi dites-vous cela?

C'est-à-dire: «Il finira par l'être.»

Réponse: Parce que l'étude du projet de loi n'est pas encore terminée à la Chambre; le projet de loi n'a pas encore franchi l'étape de son étude au Sénat et il n'est pas encore passé par tout le processus. Nous sommes donc très confiants d'avoir trouvé une bonne solution, mais le travail n'est pas terminé.

Notez la phrase: «l'étude du projet de loi n'est pas encore terminée à la Chambre». Cela ne confirme-t-il pas que les représentants élus ont été invités à se prononcer sur un projet de loi dont le gouvernement savait à ce moment-là qu'ils seraient saisis de nouveau, avec des propositions d'amendement?

Question: Pensez-vous que la solution réside dans le projet de loi...

Réponse: Tout compromis auquel on pourrait songer devrait déjà se trouver dans le projet de loi, et nous l'avons fait savoir très clairement à Washington dès le début.

C'est non seulement inouï, c'est avilissant pour le système parlementaire. Les projets de loi d'initiative gouvernementale sont rarement amendés au Sénat, sauf pour leur apporter des corrections de forme, et seulement après que l'opposition ait constamment poussé le gouvernement à le faire, après un examen approfondi en comité. Autrement dit, une fois qu'un projet de loi du gouvernement parvient au Sénat, le leader de la majorité au Sénat a pour instruction de le mener à l'étape de la sanction royale aussi vite que possible et sans propositions d'amendement.

Les Communes ont approuvé un projet de loi malgré le fait que des consultations et des négociations sur son contenu se poursuivent en secret avec un pays étranger directement concerné et pourraient très bien aboutir à une entente exigeant un ou plusieurs amendements. Pas de problème, dit la ministre du Patrimoine, nous laisserons le Sénat s'en occuper, après quoi la Chambre les approuvera sans discussion.

Je répète: les députés, notamment ceux qui appuient le parti ministériel, devraient s'interroger sérieusement sur l'amoindrissement de leur rôle, une tendance que l'on constate depuis des années. Le projet de loi C-55 n'est pas un cas isolé. Le projet de loi C-49, qui concerne la gestion des terres des Premières nations, mesure dont nous sommes également saisis, devrait faire ici l'objet d'amendements proposés par des représentants du parti ministériel, selon le député libéral de Vancouver Quadra. Il a dit avoir voté en faveur du projet de loi, même s'il s'y opposait, parce qu'on lui a donné l'assurance que l'on tiendrait compte de ses réserves au Sénat. Pareille présomption est une insulte envers tous les sénateurs de cet endroit, quel que soit le parti auquel ils sont affiliés, et cela montre à quel point on comprend mal la responsabilité de chaque Chambre.

Si le gouvernement tenait vraiment à ce que le projet de loi C-55 soit adopté dans sa forme actuelle, il lui accorderait la priorité absolue, pour confirmer son engagement envers la culture canadienne et la compréhension qu'il a de cette culture, ce qu'il ne cesse de claironner. Actuellement, de l'aveu même de la ministre du Patrimoine, le projet de loi peut faire l'objet de compromis en raison des pressions exercées par les États-Unis. Les compromis signifieront, en l'occurrence, faire marche arrière et ridiculiser tous ces grands discours qui pourraient bien s'avérer n'être rien d'autre que des fanfaronnades destinées à faire taire les nationalistes défenseurs de la culture qui voient le mal partout, sauf chez eux.

La Chambre des communes devrait encore être saisie du projet de loi C-55, dans l'attente des amendements négociés secrètement à Washington. Au lieu de cela, nous sommes saisis d'un projet de loi incomplet qui sera sujet à des modifications susceptibles de changer radicalement sa teneur. Par conséquent, le débat que nous avons actuellement à ce sujet deviendra probablement superflu une fois que les amendements seront connus.

Si c'était le cas, nous serons dans une situation intenable, celle où nous aurons approuvé le principe du projet de loi C-55 à l'étape de la deuxième lecture, alors que le gouvernement proposera des amendements qui pourront complètement modifier ce principe. Nous entamerons alors un débat de procédure sur la recevabilité des amendements, ce que nous aurions pu éviter si, comme je l'ai expliqué tout à l'heure, la Chambre des communes était encore saisie du projet de loi.

Ma suggestion au gouvernement est la suivante: ou bien nous adoptons le projet de loi dans son libellé actuel, sans amendement, confirmant ainsi la volonté de la Chambre élue, ou bien nous le mettons de côté et attendons les résultats des négociations à Washington et l'assentiment du gouvernement aux modifications proposées par les Américains. Pour ma part, je suis en faveur de la première option, car, quel que soit mon point de vue sur le projet de loi C-55, mon respect pour la volonté des élus passera toujours avant l'arrogance que le gouvernement manifeste à leur endroit, d'autant que, pour la première fois, à ma connaissance, le gouvernement négocie secrètement avec un pays étranger des modifications touchant un projet de loi adopté de bonne foi par la Chambre des communes.

C'est pourquoi je n'ai pas parlé du projet de loi C-55 en tant que tel. La façon dont le gouvernement a traité ce projet de loi est tout à fait honteuse et constitue une insulte pour le processus parlementaire. Le Sénat, pour montrer qu'il appuie ce processus, devrait refuser d'être manipulé, comme l'a été l'autre endroit.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, le débat est ajourné.)

Projet de loi de crédits no 5 pour 1998-1999

Deuxième lecture

L'honorable Anne C. Cools propose: Que le projet de loi C-73, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 1999, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, je prends la parole sur le projet de loi C-73, autrement dit, le projet de loi de crédits no 5 pour 1998-1999, à l'étape de la deuxième lecture.

Le projet de loi C-73 prévoit le versement des montants prévus dans le Budget principal des dépenses (C) pour 1998-1999, soit 1,8 milliard de dollars. Le Budget supplémentaire des dépenses (C) pour 1998-1999 a été déposé le 9 mars au Sénat et a été renvoyé le lendemain au comité sénatorial permanent des finances nationales pour y être examiné. Le Budget supplémentaire des dépenses (C) est le dernier Budget supplémentaire des dépenses pour l'exercice prenant fin le 31 mars 1999.

(1520)

Honorables sénateurs, cette somme de 1,8 milliard de dollars du Budget supplémentaire des dépenses (C) correspond aux niveaux de dépense révisés pour 1998-1999, tels qu'annoncés dans le budget du 16 février 1999. Plus précisément, ce Budget supplémentaire des dépenses vise à obtenir du Parlement le pouvoir de dépenser 1,8 milliard de dollars, comme il est prévu dans le budget de février 1998, mais cette somme n'était pas précisément répartie ou suffisamment précisée à temps pour être incluse dans le Budget principal de 1998-1999 ou dans les nouvelles dépenses prévues dans le budget du 16 février 1999. Ce Budget supplémentaire des dépenses (C) a été examiné soigneusement par le comité sénatorial permanent des finances nationales lors de ses réunions des 10 et 11 mars dernier auxquelles assistaient les fonctionnaires du Conseil du Trésor Richard Neville, secrétaire adjoint et contrôleur général adjoint, et Andrew Lieff, analyste supérieur des programmes. Parmi les principaux articles du Budget supplémentaire des dépenses (C) pour 1998-1999, mentionnons:

  • 522,1 millions de dollars à 76 organismes, afin de payer la rémunération découlant de conventions collectives récemment signées ainsi que les rajustements connexes. Les négociations collectives ont commencé au début de 1997 et ces fonds représentent la rémunération rétroactive et les augmentations de salaire accordées pour 1998-1999.
  • 166,3 millions de dollars à 18 organisations, pour des questions liées au problème du passage à l'an 2000. Ces fonds représentent les sommes dont les ministères et organismes gouvernementaux ont besoin pour préparer leurs systèmes au passage à l'an 2000 de même que les sommes nécessaires pour les programmes connexes, comme l'information du secteur privé, la préparation à l'échelle internationale, la coordination centrale et la planification d'urgence.
  • 205 millions de dollars au ministère des Finances pour les paiements de transfert aux gouvernements territoriaux. Cette augmentation reflète les rajustements des prévisions en fonction, notamment, de l'augmentation de la population, des dépenses provinciales et locales et des recettes générées par les gouvernements territoriaux, qui servent de base au calcul des paiements de transfert.
  • 200 millions de dollars à Industrie Canada pour la Fondation canadienne pour l'innovation, afin de moderniser l'infrastructure de recherche dans les domaines de la santé, de l'environnement, des sciences et du génie;
  • 155 millions de dollars à Santé Canada pour des investissements stratégiques dans les domaines de la recherche et de l'information en matière de santé, y compris des subventions à l'Institut canadien d'information sur la santé, afin d'assurer une démarche coordonnée en ce domaine, à la Fondation canadienne pour la recherche en services de santé, afin d'appuyer l'Institut canadien de recherche en santé, et au Fonds de recherche et d'évaluation pour le personnel infirmier, ou FREPI.
  • 123 millions de dollars à l'Agence canadienne de développement international (ACDI) pour divers organismes des Nations Unies et pour la fourniture d'aide humanitaire internationale, comme l'aide accordée après l'ouragan Mitch.
  • 90 millions de dollars - financement non budgétaire - à la Société canadienne des ports de Transports Canada pour le remboursement de restructuration de la dette de 165 millions de dollars correspondant au prêt accordé à Ridley Terminals Inc. par la SDE. Ridley Terminals Inc. est une filiale à part entière de la Société canadienne des ports et a besoin de ces fonds pour faciliter le refinancement de l'autre tranche de 75 millions de dollars dans le secteur privé.

Les principaux postes que je viens de mentionner représentent 1,5 milliard de dollars sur un total de 1,8 milliard de dollars pour lesquels l'autorisation du Parlement est demandée. Le solde de 0,3 milliard de dollars est réparti entre un certain nombre d'autres ministères et organismes. Vous en trouverez les détails dans le Budget supplémentaire des dépenses (C) de l'exercice se terminant le 31 mars 1999.

Les honorables sénateurs se rappelleront que, le 17 mars 1999, nous avons adopté au Sénat le rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses (C).

Je remercie le président du comité sénatorial permanent des finances nationales, le sénateur Terry Stratton, ainsi que les honorables membres du comité pour le travail qu'ils ont accompli et la coopération dont ils ont fait preuve afin que le Budget supplémentaire des dépenses (C) soit adopté en temps opportun. J'exhorte tous les honorables sénateurs à adopter le projet de loi C-73, Loi de crédits no 5 pour 1998-1999.

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je tiens à répondre à la présentation du sénateur Cools au sujet du projet de loi C-73.

Nous en avons beaucoup discuté la semaine dernière dans le cadre du rapport concernant le Budget supplémentaire des dépenses (C) et le rapport concernant le Budget principal des dépenses qu'a soumis notre comité. La seule mise en garde que je ferais aux honorables sénateurs concerne le fait que le Budget principal des dépenses initial se chiffrait à 145 456 000 000 $. C'est une jolie somme. Si on ajoute à cela les budgets supplémentaires des dépenses (A) et (B), qui s'élèvent en tout à 8 million de dollars, on arrive pour l'exercice financier en cours à un montant de 153 531 836 000 $. Il y a de quoi s'inquiéter car il s'agit d'un supplément de 8 milliards de dollars par rapport à ce qui était prévu au départ. Tout le monde devrait s'en préoccuper.

Comme je l'ai mentionné la semaine dernière, je comprends qu'il faille tenir compte de circonstances exceptionnelles, comme le fait que les salaires ont été gelés pendant plusieurs années. Il faut également tenir compte de l'adaptation à l'an 2000 qui, à la fin de l'exercice en cours, aura coûté 2 milliards de dollars. Malgré ces chiffres, il nous faut reconnaître qu'il y a des risques de «dérapage». Il serait irresponsable de notre part de ne pas en faire état dans cette enceinte.

Honorables sénateurs, le comité fait de la belle besogne. M. Neville et M. Lieff, du Conseil du Trésor, ont très bien répondu aux questions. Ils ont été si bien informés qu'il a été difficile de les prendre en défaut. Le cas échéant, ils ont admis qu'ils ne possédaient pas la réponse, auquel cas ils revenaient avec les données voulues le lendemain. Voilà pourquoi le comité aime bien tenir des audiences de ce genre sur plusieurs séances. Le comité se débrouille très bien alors, et je sais gré au sénateur Cools de ses observations.

Il arrive parfois que nous soyons irritables, mais cela arrive dans tous les comités. Je demande seulement au sénateur de ne pas prendre ces remarques personnellement, tout comme je ne prends pas les siennes personnellement.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole, plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Cools, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi de crédits no 1 pour 1999-2000

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Anne C. Cools propose: Que le projet de loi C-74, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2000, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, je voudrais faire quelques remarques au sujet du projet de loi C-74, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2000. Une fois qu'il aura reçu la sanction royale, le projet de loi C-74 deviendra la Loi de crédits no 1 pour 1999-2000. Appelé aussi projet de loi de crédits provisoires, il prévoit des crédits pour le premier semestre du nouvel exercice 1999-2000, soit pour avril, mai et juin 1999. Le Budget des dépenses décrit les dépenses projetées du gouvernement pour l'exercice qui commence dans quelques jours, le 1er avril 1999. Le projet de loi C-74 demande au Parlement l'octroi de crédits provisoires de 13,9 milliards de dollars pour le premier semestre de l'exercice 1999-2000.

Honorables sénateurs, le Budget principal des dépenses de 1999-2000 a été présenté au Sénat le 2 mars 1999 et renvoyé au comité sénatorial permanent des finances nationales le 4 mars 1999. Ce Budget des dépenses s'élève à un total de 151,6 milliards de dollars, une augmentation de 6,1 milliards de dollars ou de 4,2 p. 100 par rapport au Budget des dépenses de 1998-1999. Je suis sûre que cela va grandement intéresser le sénateur Stratton.

Ces chiffres correspondent en gros aux dépenses budgétaires prévues pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2000, telles que présentées dans le budget du 16 février 1999 du ministre des Finances, Paul Martin. Le Budget principal des dépenses de 1999-2000 donne suite au souhait du gouvernement d'obtenir l'autorisation du Parlement de consacrer 45,8 milliards de dollars aux dépenses de programmes, qui doivent être approuvées tous les ans. Les 105,8 milliards qui restent sont autorisés en vertu de la loi en vigueur actuellement.

(1530)

Honorables sénateurs, comme vous le savez, le Budget principal des dépenses se présente en trois parties. Les parties I et II doivent être déposées à la Chambre des communes au plus tard le 1er mars de l'exercice financier précédent, en l'occurrence le 1er mars 1999. La partie I présente le plan de dépenses du gouvernement tel qu'annoncé dans le discours du budget du 16 février 1999. La partie II, composée de ce qu'on appelle parfois les «livres bleus», fournit les détails des postes législatifs et des postes faisant l'objet d'un crédit parlementaire pour chaque ministère et organisme gouvernemental. La partie III du Budget principal comporte deux parties, depuis avril 1997, soit les rapports sur les plans et priorités, qui seront déposés avant la fin du présent exercice le 31 mars 1999, et les rapports sur le rendement, qui seront déposés à l'automne 1999.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-74 assurera des crédits provisoires pour certaines dépenses qui exigent l'autorisation du Parlement dès maintenant afin d'assurer la bonne marche des affaires gouvernementales. Certains de ces postes prévoient des crédits de 7,9 milliards de dollars, soit le quart de tous les postes du Budget principal des dépenses, sauf pour les postes prévus aux annexes 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7.

Les sénateurs se rappelleront le budget présenté le 16 février 1999, qui est à la base du Budget principal des dépenses pour l'exercice 1999-2000. Je voudrais signaler l'augmentation importante de certains crédits par rapport à ce qu'ils étaient dans le budget pour 1998-1999. Il s'agit de hausses de 874 millions de dollars des crédits de Finances Canada au titre des paiements du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux; de 840 millions de dollars des crédits de Développement des ressources humaines Canada au titre de l'augmentation des prestations d'assurance-emploi versées; de 600 millions de dollars des crédits d'Agriculture et Agroalimentaire Canada au titre du soutien du revenu des sinistrés accordé aux agriculteurs qui ont souffert de la baisse récente des prix des produits de base; de 377 millions de dollars à Défense nationale Canada au titre des sommes versées aux gouvernements provinciaux à l'égard des dommages subis lors des catastrophes naturelles récentes dans le cadre des Accords d'aide financière en cas de catastrophe; et de 287 millions de dollars à divers ministères et agences au titre des exigences de la préparation à l'an 2000. Ce ne sont là que quelques-uns des postes qui figurent dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice 1999-2000.

Honorables sénateurs, la fonction première du Parlement est d'examiner soigneusement les dépenses du gouvernement et d'exiger des comptes des ministres. En dernière analyse, le Parlement a pour mission de constituer des recettes en levant des impôts et de les dépenser judicieusement. Ce processus a été établi au fil de 1 000 ans de luttes parlementaires et constitutionnelles et constitue une tradition que nous devons protéger jalousement.

Honorables sénateurs, le comité sénatorial permanent des finances nationales continuera pendant un certain temps encore son étude du Budget principal des dépenses. Entre-temps, j'encourage tous les sénateurs à appuyer le projet de loi C-74, Loi de crédits no 1 pour 1999-2000, qui constitue le projet de loi de crédits provisoires, afin que le gouvernement puisse poursuivre les affaires de Sa Majesté, c'est-à-dire les affaires du Canada.

Le comité sénatorial permanent des finances nationales se réunira demain à 16 h 30 pour se pencher sur certains aspects du Budget principal des dépenses qui ont trait au projet de loi C-74.Je suis très reconnaissante au sénateur Stratton à ce sujet parce que j'espère très sincèrement, comme tous les autres sénateurs, j'en suis certaine, que le Parlement pourra mener à bien la tâche qui lui incombe d'analyser les dépenses du gouvernement.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur la gestion des terres des Premières nations.

Deuxième lecture-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Chalifoux, appuyée par l'honorable sénateur Maloney, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-49, Loi portant ratification de l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des Premières nations et visant sa prise d'effet.

L'honorable Ron Ghitter: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui dans le cadre de la deuxième lecture du projet de loi C-49. Je suis loin d'être un expert de ces questions, quoi que, comme bon nombre d'entre vous, j'ai souvent eu à traiter avec des groupes de Premières nations.

Je voudrais tout d'abord exprimer mon appui aux concepts sous-jacents de la présente mesure législative. Comme l'a souligné le sénateur Chalifoux dans son excellent discours d'ouverture du débat la semaine dernière, le projet de loi vise à offrir un élément d'autonomie gouvernementale aux bandes participantes qui acceptent de respecter les procédures et engagements prévus dans la présente mesure.

Je félicite les dirigeants des Premières nations qui ont travaillé très fort depuis 1998 pour mener cette mesure législative où elle en est aujourd'hui. Je félicite les quatorze bandes qui ont accepté d'être les premières à signer l'accord-cadre qui sert de base au projet de loi C-49.

Comme vous le savez sûrement, la Loi constitutionnelle de 1867 accorde au gouvernement fédéral la compétence exclusive sur les terres et les ressources des réserves et, compte tenu de ces dispositions, les Premières nations ont peu de contrôle direct sur la gestion de leurs terres. Il est juste de dire qu'au fil des ans, cette situation a donné lieu, chez les membres de nos Premières nations, à une frustration croissante et, à l'occasion, à une animosité grandissante envers le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien qu'elles considèrent souvent, et avec raison, importun et excessivement bureaucratique dans la manière dont il contrôle la gestion des terres des Premières nations et les activités qui s'y déroulent.

Je parle d'expérience, puisque j'ai travaillé pendant un an ou deux avec une Première nation en Alberta, soit l'admirable nation siksika, à l'extérieur de Calgary. J'ai assisté à des réunions et j'ai partagé les frustrations de ces gens face à l'incroyable bureaucratie qui fait paraître monumentales les décisions les plus simples, une fois qu'elles sont communiquées au ministère ici, à Ottawa. Trop souvent, le ministère des Affaires indiennes semble agir en tant qu'adversaire autoritaire plutôt que comme partenaire qui facilite le processus décisionnel des dirigeants de nos Premières nations.

Le temps est venu de laisser les Premières nations gérer leurs propres affaires, quand c'est possible. Il est temps de les laisser se charger de leurs membres et rendre compte de leurs décisions comme elles l'entendent, peu importe qu'elles aient raison ou tort. Dieu sait si nous avons souvent eu tort. Pourquoi leur refuserions-nous leur chance?

Il est temps d'extirper le paternalisme démesuré qui existe dans la Loi sur les Indiens, d'agir rapidement et de laisser nos Premières nations accéder à l'autonomie et à l'autosuffisance, au lieu de perpétuer dans notre société des attitudes qui incitent à les considérer, semble-t-il, comme des citoyens de seconde zone, qui demandent l'aumône, ce qui n'est pas du tout le cas.

Je suis arrivé à ces conclusions au début des années 80, lorsque j'ai eu l'occasion, en Alberta, de présider un comité chargé d'examiner la discrimination dans notre système d'enseignement. Le comité avait pour objectif d'examiner l'embarras qu'avait suscité des opinions exprimées par un enseignant du nom de Keegstra, à Eckville, en Alberta. Nous avons parcouru tout l'Alberta pour examiner les activités de notre système d'enseignement que nous considérions comme étant discriminatoires, déplacées ou racistes, et pour trouver des moyens d'améliorer le système d'enseignement, afin de surmonter l'intolérance et le manque de compréhension qui semblaient être répandus dans bien des régions de notre province.

Beaucoup de gens ont été étonnés que le premier livre blanc que notre comité a présenté portait sur la discrimination à l'endroit des autochtones. Il traitait des difficultés rencontrées par les enfants autochtones, qui étaient victimes d'une énorme discrimination systémique au sein de notre système d'enseignement.

On nous a demandé pourquoi nous traitions de la population autochtone, alors que notre mandat visait à examiner les problèmes liés à l'épisode Keegstra, qui causait tellement d'embarras à ma province. Nous avons répondu que nous en traitions parce que nous avions découvert que la population autochtone devait faire face, plus que d'autres populations, à la discrimination, aux préjugés, à l'absence de compréhension et à une bureaucratie récalcitrante.

J'ai eu tôt fait de connaître les frustrations et les difficultés des autochtones, ainsi que l'attitude paternaliste qui existe à leur égard. Toute mesure, aussi minime soit-elle, que nous pouvons prendre pour surmonter ces obstacles contribuera grandement à redonner aux autochtones la dignité, le respect et l'estime de soi.

Le projet de loi C-49 n'est qu'un progrès modeste, mais il est important. Lorsque j'ai parcouru les débats de la Chambre des communes sur ce projet de loi, j'en suis arrivé à la conclusion que les députés avaient étudié cette mesure à la hâte, sous la menace de la clôture. À mon avis, ce débat a donné dans la rhétorique creuse et dans un simplisme excessif, et il a laissé de côté des éléments fondamentaux du projet de loi et certains problèmes qui méritent, selon moi, d'être examinés de plus près.

Comme l'a dit mon leader, le sénateur Lynch-Staunton, à propos du projet de loi C-55, il semble que, une fois de plus, les Communes comptent sur le Sénat pour apporter au projet de loi les amendements nécessaires, si j'en juge d'après les commentaires publics que j'ai lus et ceux, consignés dans le hansard, qui ont été formulés pendant l'étude du projet de loi à l'autre endroit et auxquels le sénateur Lynch-Staunton a fait allusion.

Ce projet de loi présente des difficultés. Il y a des questions à étudier. J'invite le comité des peuples autochtones à envisager d'améliorer certains aspects du projet de loi pour qu'il puisse être considéré dans l'ensemble du Canada comme plus équitable et clair. Au cours de notre étude, nous devons voir comment combler les lacunes et régler les problèmes qui sont évidents dans le projet de loi. Je suis persuadé qu'un grand nombre d'entre vous aurez reçu une abondante correspondance, surtout de la Colombie-Britannique, au sujet des lacunes et problèmes qu'on décèle dans le projet de loi.

Je soupçonne et j'espère que notre comité des peuples autochtones abordera la question avec sérieux lorsqu'il l'étudiera et accueillera certains des témoins. Il fera ensuite rapport au Sénat, qui devra étudier ses recommandations et les amendements qu'il y a lieu d'apporter au projet de loi.

Il y a deux points sur lesquels j'estime qu'il faudrait plus de clarté et de précision, mais je tiens tout d'abord à remercier un certain nombre de personnes que j'ai eu l'occasion de rencontrer et avec qui j'ai pu discuter du projet de loi. Je songe plus particulièrement aux chefs de la première nation Squamish, en Colombie-Britannique, et de la première nation de St. Mary's, à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, aux Chippewas de Georgina Island, aux représentants de la nation siksika et au président des chefs.

Nous avons parlé du projet de loi avec beaucoup de franchise. Je leur ai fait part de mes préoccupations. À certains moments, j'avais l'impression que, même s'ils comprenaient ces préoccupations, ils tenaient beaucoup à ce que le projet de loi soit approuvé et étaient prêts à l'accepter avec ses lacunes, en raison des difficultés qu'ils avaient éprouvées à faire adopter le projet de loi depuis 1988. Je leur ai expliqué que je comprenais leur désir de faire adopter le projet de loi, mais qu'il serait peut-être préférable d'apporter non pas des modifications de principe, mais des modifications concrètes au projet de loi afin de le rendre plus acceptable pour l'ensemble du pays.

J'aimerais parler des deux aspects du projet de loi qui me préoccupent. Les deux éléments les plus faibles concernent l'expropriation et l'absence de dispositions relatives à l'égalité des sexes, notamment pour assurer la protection des femmes.

L'expropriation est un recours unique et extraordinaire qui ne doit pas être utilisé à la légère dans quelque loi que ce soit. Il existe une loi fédérale en matière d'expropriation au Canada et les provinces ont aussi leurs propres lois d'expropriation. L'expropriation signifie que l'État s'approprie, dans l'intérêt public et en vertu de la volonté publique, les intérêts que possède un particulier dans des terres. En échange, l'État s'engage à lui verser une indemnisation équitable.

Dans certains cas, l'État doit s'approprier des terrains à des fins d'utilité publique, notamment pour la construction de routes, pour assurer des droits de passage ou pour d'autres raisons. Des mesures d'expropriation ne peuvent être prises à la légère. Le gouvernement doit assurer la protection des propriétaires fonciers en les indemnisant le plus équitablement possible.

La Loi fédérale sur l'expropriation contient des pages et des pages de directives sur la façon d'indemniser équitablement tout particulier dont l'État s'approprie les terres, qu'elles soient détenues en propriété à bail, en fief simple ou autrement. La loi exige que le gouvernement donne un préavis suffisant, procède à une estimation et fasse la preuve de l'intérêt public. La loi prévoit également le versement d'une indemnisation, notamment au titre des frais de déplacement et des frais d'intérêt. Toutes ces exigences doivent absolument être respectées pour assurer le traitement équitable des particuliers qui sont expropriés. La loi fédérale aussi bien que les lois provinciales contiennent des dispositions en ce sens.

Aux termes des dispositions du projet de loi C-49 relatives à l'expropriation, une Première nation peut déposséder un membre de bande ou une tierce partie de la propriété d'un terrain. L'article pertinent, qui comporte environ 25 lignes, prévoit le dépôt d'un avis d'expropriation et le versement d'une juste indemnisation, conformément aux dispositions de la Loi fédérale sur l'expropriation.

Ainsi, un titulaire de domaine à bail sur une réserve indienne pourrait recevoir un avis lui demandant de quitter les lieux dans les 30 jours. On est tenu de verser une indemnité équitable, mais on ne sait pas au juste ce que cela veut dire. On ne précise pas quand cette indemnité doit être versée et on ne fait pas mention d'un processus d'appel. Les gens sont laissés à la merci de la bande qui adopte son propre code foncier.

Contrairement à ma position, ceux qui appuient le projet de loi vont vous dire que l'adoption d'un code foncier exige un vote majoritaire par les membres admissibles de la bande. Aux termes de cette mesure législative, 25 p. 100 des électeurs admissibles au sein de la bande peuvent adopter un code foncier. J'en ai vu trois. Ils ne parlent pas ou presque d'expropriation. Ainsi, les gens expropriés sont totalement à la merci de la bande.

Je n'insinue pas que les bandes vont avoir recours à des pratiques répréhensibles, mais permettez-moi de vous parler de ce qui se passe en Colombie-Britannique, en ce qui concerne les droits fonciers sur les terrains longeant Marine Drive, tout près du club de golf Shaughnessy qui appartient à la bande de Musqueam. Il y a une très grande animosité entre les titulaires actuels de domaine à bail, quelque 80 propriétaires de maisons, et la bande elle-même.

Il importe peu de savoir si le raisonnement est valable, si j'y souscris ou non. Si vous louiez un terrain à la bande dans la réserve de Musqueam, vous pourriez vous apercevoir que votre loyer sur ce terrain est passé en un an de 400 $ à environ 30 000 $. Vous constateriez que vos impôts fonciers ont augmenté de la même façon.

Il y a peut-être des raisons valides pour cela et les tribunaux sont saisis de ces questions. Cependant, il n'en demeure pas moins qu'il y aura des conflits entre les donneurs à bail et les preneurs à bail. Cela entraînera une certaine animosité. Si c'est le cas, en l'absence d'une loi pour protéger les gens, les bandes pourraient continuer d'agir de façon inappropriée. Une bande pourrait décider de construire un casino à côté de chez vous ou une école ou le parterre d'un chef en s'appuyant sur la notion d'intérêt public. Un titulaire de domaine à bail pourrait se voir demander de quitter les lieux dans les 30 jours, mais pourrait devoir attendre indéfiniment pour obtenir une indemnité à moins de s'en remettre aux tribunaux.

Je ne pense pas qu'un chef ou une bande indienne veuille qu'on considère qu'il est probable que les bandes agissent de cette façon, et je ne dis pas qu'elles le feront. Cependant, en m'appuyant sur ma carrière juridique, qui m'a permis de m'occuper d'un certain nombre de cas d'expropriation, je prétends que cette mesure législative comporte des lacunes et laisse à désirer. Elle ne préserve aucune protection pour ceux qui devraient au moins bénéficier d'un semblant de protection. Après tout, leurs terrains sont expropriés.

(1550)

Je voudrais signaler un aspect intéressant du projet de loi. Les dispositions du projet de loi concernant ce qu'une Première nation peut faire à un tiers qui occupe une propriété à bail tiennent en 25 lignes seulement. Par contre, si c'est le gouvernement fédéral qui désire acquérir des terrains par expropriation, les honorables sénateurs verront que les dispositions à cet égard occupent une centaine de lignes. Les bandes semblent bénéficier de protection si quelqu'un veut exproprier leurs terres. Or, les tiers qui risquent de perdre leur intérêt dans leur maison ne sont pas protégés.

Je vais vous exposer les conséquences que cela peut avoir pour quelqu'un qui possède une propriété sur le territoire de la réserve Musqueam, à Vancouver. Un homme que je connais depuis plusieurs années y possède une maison. Il l'a mise en vente parce qu'il veut retourner s'établir à Calgary. Il m'a invité à déjeuner longtemps avant même que j'entende parler du projet de loi. Il m'a dit qu'un projet de loi dont nous serions saisis lui causait beaucoup de souci. Il m'a parlé de la situation fiscale. Cette cause est devant les tribunaux, qui vont trancher à ce sujet.

Il m'a dit qu'après avoir mis sa propriété en vente et dès qu'on a eu vent de cette mesure législative sur le marché de Vancouver, il a reçu une lettre de son courtier en immeubles qui lui demandait de retirer sa propriété du catalogue des propriétés à vendre parce qu'il n'y avait pas de marché pour sa maison. C'était à cause de la méfiance qui existe apparemment dans cette région.

C'est un homme qui a probablement investi entre 400 000 $ et 500 000 $ dans sa maison. Il a déménagé à Calgary et il veut la vendre. Or, il n'y a pas de marché pour elle. À son avis et de l'avis de son courtier en immeubles, c'est à cause des ambiguïtés qu'on trouve dans le projet de loi et de l'absence de détails concernant les solutions à l'expropriation.

Honorables sénateurs, j'estime qu'un simple amendement suffit. Il stipulerait que les dispositions du projet de loi C-49 concernant l'expropriation seraient assujetties à la Loi sur l'expropriation. Cela établirait toutes les règles et règlements nécessaires. Les craintes disparaîtraient. Nous pourrions dire à nos amis autochtones que nous avons une mesure législative que la population peut appuyer au lieu de détester.

Je recommande que notre comité envisage sérieusement de présenter un amendement de cette nature. Il y a même des députés qui comptent sur nous pour présenter un amendement de cette nature.

Je voudrais dire quelques mots de la situation des femmes dans nos réserves.

Je suis loin d'être un spécialiste de la question. D'après ce que j'ai lu, la situation des femmes dans les réserves indiennes pose de graves problèmes. À dire vrai, je ne sais même pas très bien quelle protection notre législation et notre jurisprudence accordent à ces femmes.

L'article 25 de la Charte des droits et libertés prévoit ceci:

Le fait que la présente charte garantit certains droits et libertés ne porte pas atteinte aux droits ou libertés - ancestraux, issus de traités ou autres - des peuples autochtones du Canada, notamment:

a) aux droits ou libertés reconnus par la Proclamation royale du 7 octobre 1763;

b) aux droits ou libertés existants issus d'accords sur des revendications territoriales ou ceux susceptibles d'être ainsi acquis.
La question suivante se pose: la Charte protège-t-elle les femmes vivant dans les réserves? Je ne connais pas la réponse à cette question. Je suis impatient d'entendre l'opinion du comité à cet égard.

Le projet de loi dont nous sommes saisis ne dit qu'une chose au sujet des droits des femmes en cas d'échec du mariage et en ce qui concerne la pauvreté; voici ce qu'on peut lire à l'article 17, intitulé: «Règles particulières: échec du mariage»:

La Première nation doit veiller à l'établissement, en conformité avec l'accord-cadre et au terme du processus de consultation populaire prévu à cette fin dans le code foncier, de règles générales - de procédure et autres - applicables, en cas d'échec du mariage, en matière soit d'utilisation, d'occupation ou de possession des terres de la Première nation, soit de partage des intérêts sur celles-ci.

Essentiellement, le projet de loi confie à la bande l'obligation d'inscrire dans son code foncier les règles qui s'appliqueront en cas d'échec d'un mariage et les droits que les femmes peuvent avoir sur les terres. La question a été examinée sous bien des angles. Permettez-moi, honorables sénateurs, de vous citer deux extraits du rapport de la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones qui présentent le point de vue des femmes.

À la page 58 du volume 4, on dit:

Un autre facteur complique les choses: le partage des biens en cas d'échec d'un mariage. Le mariage et le partage des biens du mariage au moment de la rupture sont régis par le droit provincial. La Loi sur les Indiens a toutefois préséance dans les réserves. En conséquence, un tribunal ne peut ordonner le partage des biens qui sont situés dans la réserve comme il le ferait pour les biens situés ailleurs. Un tribunal ne pourra pas non plus déclarer qu'une partie a la possession exclusive du domicile matrimonial. Les Indiennes des réserves sont donc gravement défavorisées. Le principal précédent sur ce point est l'affaire Derrickson c. Derrickson, où la Cour suprême a jugé, en 1986, qu'une femme ne peut demander la possession du domicile matrimonial à moins que le certificat de possession n'ait été délivré sous son seul nom.

Ce qui est rarement le cas.

Dans un autre chapitre du même rapport intitulé: «Les Indiennes», on ajoute que:

Si l'on peut affirmer que les Indiens ont été lésés par les dispositions injustes et discriminatoires de la Loi sur les Indiens, les Indiennes l'ont été doublement. Ceci est particulièrement vrai en ce qui concerne la cession des terres, les testaments, les élections des bandes, le statut d'Indien, l'appartenance à la bande et l'émancipation.

Contrairement à son époux, la femme ne reçoit pas une partie des terres de la réserve lorsqu'elle s'émancipe.
D'autres rapports traitent également de la menace que représente pour les Indiennes la gestion des terres confiées aux autochtones. Il y a notamment des rapports diffusés par la Native Women's Association of Canada, dont les porte-parole sont venus témoigner devant le comité de la Chambre des communes. Ils ont donné de nombreux exemples illustrant les privations, la pauvreté et les épreuves que doivent endurer les femmes qui vivent dans les réserves, notamment lorsqu'elles vivent une séparation.

La mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui ne dit presque rien au sujet des droits des femmes dans les réserves. Elle donne carte blanche au conseil de bande pour qu'il règle la question comme il l'entend. Je ne sais pas avec certitude si les femmes vivant dans les réserves sont protégées par notre Charte. Elles me semblent démunies dans certaines circonstances et totalement à la merci du conseil de bande. Il faut apporter au projet de loi des amendements traduisant nos inquiétudes en ce qui concerne les problèmes que vivent les femmes dans les réserves et le respect que nous vouons à ces femmes.

J'invite notre comité à proposer des amendements qui garantiront que les femmes dans les réserves seront traitées équitablement, de façon égale et avec dignité, comme les hommes l'ont toujours été. C'est un problème important. Nous nous déroberions à nos responsabilités en ne nous attaquant pas fermement au problème.

Honorables sénateurs, voilà mes suggestions au sujet du projet de loi C-49. Comme le sénateur Chalifoux l'a si bien expliqué, c'est un projet de loi important à de nombreux égards. Je vous laisse le soin de lire ses observations, car elles montrent clairement et avec justesse l'importance de cette mesure législative. Ce projet de loi comporte toutefois des lacunes et nécessite des amendements. J'attends avec impatience de participer aux travaux du comité des peuples autochtones et j'espère que nous pourrons faire ce qui s'impose.

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, c'est toujours un plaisir de prendre la parole à cet endroit, même si l'on risque fort d'être dans l'ombre en prenant la parole après un intervenant aussi éloquent que mon dernier adversaire. Il a toujours eu un charme irrésistible, honorables sénateurs, et il n'a pas changé du tout. Je suis d'accord avec lui à certains égards, notamment en ce qui concerne les femmes et l'expropriation. La question des femmes m'inquiète bien plus que celle de l'expropriation.

(1600)

Je ne dirais pas que le projet de loi comporte des lacunes, mais il tente maladroitement de faire, du jour au lendemain, pour la collectivité autochtone, ce que nous avons mis près d'un siècle à accomplir au Canada en matière de droit foncier.

Cependant, lorsque qu'un bébé pleure, le sénateur Chalifoux est la personne la plus compétente pour s'en occuper. Ils ont choisi la bonne personne pour donner la fessée au bébé afin qu'il se ressaisisse, car il est évident qu'il a besoin d'être changé.

Le sénateur Carstairs: La fessée est interdite!

Le sénateur Taylor: Avant de passer des droits des femmes aux droits individuels, je voudrais parler de la question de l'expropriation. Je vois le problème. J'entends les non-autochtones se plaindre de l'expropriation.

On ne peut pas réécrire l'histoire, mais je voudrais bien que les non-autochtones aient fait preuve d'autant de diligence, d'égard et d'intérêt par rapport aux lois quand ils ont confisqué à maintes reprises des morceaux de réserve depuis 70 ans dans l'Ouest. Il n'y a pas une seule réserve au Canada qui n'ait pas été amputée d'un morceau par un agent des Affaires indiennes dans les années 10, 20 ou 30, lequel a été ensuite vendu à un ami, qu'il soit libéral ou conservateur, selon le gouvernement du jour. J'espère qu'il n'y a pas de vengeance dans tout cela, mais je constate que ceux qui occuperont un poste de direction pourraient, dans une certaine mesure, chercher à réparer les torts du passé en se trouvant du côté des bénéficiaires pendant un certain temps plutôt que l'inverse. Je suppose que nous devrons examiner de près le processus d'expropriation.

Le sénateur Ghitter a parlé des Musqueam, qui constituent un bon exemple de ce qui peut se produire. Dans la cour du sénateur Ghitter et la mienne, l'ancien secteur des Sarcee, près de Calgary, des terres ont été données à bail pendant un certain nombre d'années. Le duc de Westminster a accordé des baux à plus d'un million d'habitants dans l'ouest de Londres, et ces derniers ont pu négocier des baux à long terme pour vivre sur des terres dont la propriété est restée entre les mains du duc et de ses descendants, génération après génération.

Il y a une foule d'exemples que le sénateur Chalifoux pourra examiner, et j'estime que nous pouvons offrir notre aide à cet égard.

En outre, il ne faut pas oublier que cette partie du problème des Musqueam n'est pas l'expropriation, mais la hausse du loyer à un point tel que cela équivaut à une expropriation. La question est de savoir s'il faut prévoir dans la loi le niveau des loyers et dans quelle mesure on peut le relever. Ce pourrait être de manière assez prononcée, compte tenu que le parti d'en face considère l'idée du contrôle des loyers comme une abomination. Ce sera intéressant de voir comment nous réglerons cette question.

Je veux maintenant parler des droits individuels. Les deux côtés du Sénat ont examiné cet aspect. La loi dont nous discutons aujourd'hui n'est qu'une autre d'une longue série de lois sur les Premières nations et les peuples autochtones. Le libéralisme classique, un concept auquel croient nos deux partis, insiste sur l'individu. Nous avons tendance à aborder les questions se rapportant aux Premières nations comme si celles-ci n'étaient qu'un assemblage de ghettos où il nous suffit de parler avec le chef pour que tout tombe en place. Ce n'est pas le cas. Beaucoup d'autochtones veulent aujourd'hui quitter les réserves ou vivent déjà en dehors des réserves. N'oublions pas que plus de la moitié des autochtones ne vivent plus dans les réserves et veulent acheter une maison ou démarrer une entreprise, mais se heurtent à toutes sortes d'obstacles. Leurs voisins non autochtones peuvent aller dans une banque et emprunter, obtenir des titres de propriété et le reste. Nous n'accordons pas assez d'attention aux autochtones qui ne veulent peut-être pas rester dans les réserves, qui ne veulent peut-être pas faire ce que le chef et la bande leur disent de faire, qui veulent peut-être sortir de leur réserve et prendre des initiatives personnelles pour faire des études, créer une entreprise ou tout simplement vivre dans une région différente de ce qui, pour le groupe, est la norme.

Il semble que nous soyons tombés dans le piège consistant à accorder beaucoup d'argent aux bandes qui, ensuite, peuvent se prononcer non seulement sur le divorce et les droits de propriété, mais aussi sur l'appartenance ou non selon qu'une personne a épousé un homme ou que leur grand-mère a épousé un Blanc ou un non-Blanc. Les bandes héritent de pouvoirs que ne possédaient même pas les anciennes Églises du Moyen-Âge quand il est question de se prononcer sur ce que les gens ont le droit de faire, sur leur évolution spirituelle ou morale ou sur ce qu'ils estiment être correct. Le moment est peut-être venu de commencer à penser aux individus.

Les honorables sénateurs doivent se rappeler que la question des terres dans cette mesure législative mettra en cause d'importante sommes d'argent qui aboutiront dans les mains de différentes bandes autochtones au Canada. Il est probablement temps qu'elles touchent cet argent afin de développer leur propre économie. Quel genre d'économie développeront-elles? Qu'adviendra-t-il de la personne vivant à l'intérieur ou à l'extérieur de la réserve et souhaitant obtenir un poste dans une des sociétés qui seront établies avec cet argent? Quel genre de droit de vote aura-t-elle? Quels seront ses droits en tant qu'actionnaire? Cet argent sera-t-il investi dans une entreprise appartenant entièrement à une bande?

On examine ces domaines et on se met à songer à quelque chose d'autre que la société non autochtone a mis des centaines d'années à développer, comme des protecteurs du citoyen et des vérificateurs généraux. Cela représente des millions de dollars, et l'autochtone moyen n'a même pas le droit que nous avons, vous et moi, de faire appel au vérificateur général ou à un protecteur du citoyen quand il a l'impression qu'il y a quelque chose qui cloche dans l'administration de la bande. Ce pourrait être l'occasion de fournir aux bandes les instruments que nous considérons comme nécessaires à notre propre administration, des instruments tels que des vérificateurs généraux, des protecteurs du citoyen et ainsi de suite. Mais on s'en garde bien. On parle de leur donner quelques terres et un peu d'argent, histoire de soulager sa conscience, mais cela s'arrête là.

La seule fois qu'il m'ait été donné de voir un peu de chaleur se dégager de ce débat sur les revendications territoriales, c'était à propos du cas que mon collègue, le sénateur Ghitter, a mentionné, un cas qu'il ne connaît que trop bien. Je veux parler de la fois où le gouvernement de l'Alberta, un gouvernement dont il était membre, a construit un barrage d'irrigation à quelques milles de la réserve, sans songer un seul instant à en faire profiter les terres indiennes. Cette eau longe les terres indiennes sur une distance de 70 milles environ et ne profite qu'aux terres n'appartenant pas à des autochtones. Et il ne s'agit pas d'un cas isolé. Les gouvernements procèdent encore à des expropriations et privent nos autochtones de leurs droits. Or, il y a des gens dans la réserve qui aimeraient cultiver la terre et, pour cela, pouvoir emprunter l'argent nécessaire à l'achat du matériel. La banque ne leur consentira pas de prêts, et ils n'ont pas accès à l'eau.

Il y a bien des aspects à considérer à cet égard et pour mener «le bébé tout en pleurs», je ne connais pas de personne plus indiquée que le sénateur Chalifoux.

(Sur la motion du sénateur Carney, le débat est ajourné.)

(1610)

Projet de loi d'intérêt privé

La Loi concernant l'Association des comptables généraux accrédités du Canada-Deuxième lecture

L'honorable Michael Kirby propose: Que le projet de loi S-25, Loi concernant l'Association des comptables généraux accrédités du Canada, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, le projet de loi S-25 est essentiellement un projet de loi d'ordre administratif. Il modifie la loi constitutive de l'Association des comptables généraux accrédités du Canada, également appelée CGA. La loi constitutive de CGA-Canada a été adoptée en 1913 et est restée pratiquement inchangée depuis. Cette année-là, CGA-Canada comptait 84 membres, tous basés à Montréal. Aujourd'hui, l'association représente plus de 58 000 comptables en management accrédités et répartis un peu partout au Canada et donc, sa loi constitutive doit être modernisée pour refléter sa composition actuelle et les besoins de ses membres. C'est essentiellement le but du projet de loi S-25.

Honorables sénateurs, ce projet de loi fait essentiellement trois choses. Premièrement, il dote l'association d'une dénomination française, l'Association des comptables généraux accrédités du Canada. Cette dénomination est importante pour plusieurs raisons, notamment le fait que CGA-Canada participe aux grands forums internationaux chargés d'établir les normes comptables, d'où la nécessité d'avoir une dénomination en français et en anglais si elle veut promouvoir le travail qu'elle accomplit au sein de ces forums.

Deuxièmement, le projet de loi prévoit la dénomination abrégée «CGA-Canada». Les comptables membres de la CGA agissent à titre de comptables et de conseillers fiscaux pour des entreprises de toutes tailles. Ils occupent des postes financiers, des postes administratifs et des postes décisionnels au sein des gouvernements, d'institutions financières, d'oeuvres de bienfaisance et de sociétés. Plus de 20 p. 100 des membres de l'association, soit quelque 10 000 personnes, sont actuellement employés par les gouvernements fédéral et provinciaux ainsi que par d'autres institutions publiques. Avec une telle composition, l'association a besoin d'une dénomination abrégée qui facilite la référence aux antécédents, à la formation et à l'expérience de ses membres. Par exemple, nous savons tous avec qui nous traitons et nous connaissons le degré de professionnalisme auquel on peut s'attendre d'une personne qui porte le titre de comptable agréé, ou CA. L'Association des comptables généraux accrédités du Canada aurait besoin d'un acronyme semblable, afin que les gens sachent ce qu'est un CGA et quelle est sa formation et son expérience.

Troisièmement, le projet de loi S-25 modifie les pouvoirs et les objectifs de l'association afin qu'ils correspondent aux activités actuelles de l'association. Par exemple, aujourd'hui, CGA-Canada tient un rôle important en tant que représentant de ses membres. L'association conçoit des programmes de formation pour ses étudiants et ses membres. Elle régit le code de discipline. Elle participe à la définition de normes de comptabilité internationales. Elle fait de la recherche et publie des rapports. Elle collabore également avec des associations affiliées sur des questions touchant la profession comptable au Canada. Bref, la loi constitutive actuelle de l'association des CGA avait besoin d'être modernisée et mise à jour pour qu'elle représente mieux ce que font vraiment les CGA au Canada.

Le projet de loi S-25 offrira à l'association le cadre législatif adéquat pour la tenue de ses activités actuelles et futures.

Enfin, honorables sénateurs, j'insiste sur le fait que le projet de loi S-25 est semblable sur les plans de sa structure, de son organisation et de ses caractéristiques aux lois constitutives d'organisations professionnelles du même ordre. Par exemple, l'Institut canadien des comptables agréés, l'ICCA, a été constitué en 1902 en vertu d'une loi spéciale du Parlement qu'on a modifiée et mise à jour en 1938, 1951 et 1990 afin d'assurer à l'ICCA un encadrement de ses activités adapté aux circonstances modernes. Le projet de loi S-25 ne constitue pas une réorganisation majeure de CGA-Canada et de ses pouvoirs. Essentiellement, il reflète le fait que CGA-Canada a évolué pour devenir une association professionnelle moderne dans le domaine de la comptabilité. La loi constitutive de cette association doit refléter ce fait.

Certains sénateurs savent que ce projet de loi est en préparation depuis longtemps. On m'a demandé de le parrainer pour la première fois il y a trois ans, alors qu'il faisait encore l'objet d'intenses négociations. Ces négociations étant maintenant terminées, je n'hésite pas à dire que les sénateurs devraient appuyer le projet de loi lorsque le comité sénatorial permanent des banques et du commerce l'aura examiné. Je crois qu'il importe qu'une loi énonce ce que font des organismes professionnels comme l'Association des comptables généraux accrédités du Canada et la formation que reçoivent leurs membres.

J'espère donc, honorables sénateurs, que le projet de loi sera déféré au comité permanent des banques et du commerce, qui l'examinera à fond avant d'en faire rapport au Sénat.

L'honorable Consiglio Di Nino: Je voudrais avoir des précisions. Le sénateur Kirby fait usage de l'acronyme «CGA». Cet acronyme sera-t-il utilisé dans les deux langues officielles, ou y aura-t-il un acronyme différent en français?

Le sénateur Kirby: Honorables sénateurs, à ma connaissance, le même acronyme abrégé sera utilisé dans les deux langues officielles. Je vais obtenir la confirmation de cela pour le sénateur, mais c'est ce que j'ai compris.

Son Honneur le Président: Comme personne d'autre ne souhaite intervenir, vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Kirby, le projet de loi est renvoyé au comité permanent des banques et du commerce.)

L'hormone de croissance recombinante bovine

L'examen du rapport intérimaire du comité de l'agriculture et des forêts sur l'étude de son effet sur la santé des humains et des animaux-Ajournement du débat

Le Sénat passe à l'étude du huitième rapport (intérimaire) du comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts intitulé: «La STbr et le processus d'approbation des médicaments», déposé au Sénat le 11 mars 1999.-(L'honorable sénateur Gustafson).

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, je suis très heureux d'intervenir dans le débat sur le rapport intérimaire du comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts sur les injections de somatotropine bovine recombinante (STbr) aux vaches laitières.

Les membres du comité ont reçu des lettres, des appels téléphoniques et des questions de journalistes venant d'aussi loin que New York et Londres, ainsi que de partout au Canada. Si la question a suscité autant d'intérêt, c'est en raison de l'excellent travail des membres du comité. Le sénateur Whelan, qui a lancé cette enquête sur la STbr, n'a pas ménagé ses efforts et il a réalisé une recherche approfondie. Le sénateur Spivak et son personnel de bureau ont également fourni des efforts considérables en matière de recherche. Quant aux sénateurs Stratton, Chalifoux, Fairbairn, Hays, Rossiter, Robichaud, Taylor et Hervieux-Payette, ils ont tous consacré à cette étude des heures de travail et apporté une précieuse collaboration.

La réaction du public a été renversante. Nous avons reçu de nombreuses lettres sur la question. La plupart de ces lettres commençaient par remercier le comité sénatorial de s'être penché sur ce sujet et venaient notamment de groupes de consommateurs.

(1620)

Nous savons tous que le lait est un produit important. Je suis d'avis que peu d'entre nous seraient ici aujourd'hui s'ils n'avaient pas eu de lait. En tout cas, il a constitué la principale source de notre alimentation durant les premiers mois de notre vie et ensuite.

Que se passe-t-il dans le cas présent avec la STbr? Il s'agit d'une hormone de croissance modifiée génétiquement qu'on injecte dans les vaches laitières tous les 14 jours, normalement sous leur queue ou dans la partie charnue de leur cuisse. Il y a eu de nombreux problèmes car des gens ont témoigné devant le comité qu'après ces injections de STbr, on constatait souvent sur le bétail une mastite ainsi qu'un enflement des pattes et l'apparition de plaies.

Je suis un agriculteur. J'ai travaillé avec le bétail toute ma vie. La STbr soulève beaucoup d'inquiétudes. Je recommande à tous les sénateurs de lire ce rapport détaillé. Nous ne pouvons en parler au complet aujourd'hui, même si je suis persuadé que divers sénateurs aborderont une bonne partie de ses recommandations.

On a surtout recommandé de poursuivre des études scientifiques sur la STbr. Il s'est produit au comité du Sénat une chose que je n'avais jamais vue en 20 ans. Sur les cinq témoins de Santé Canada, trois ont refusé de témoigner à moins de pouvoir faire une déclaration sous serment et d'être assermentés par le comité, pour leur propre protection. Je n'ai rien vu de semblable en 14 ans à la Chambre des communes et depuis 6 ans que je siège au Sénat.

Je ne crois pas exagérer en affirmant que certains éléments de leurs témoignages étaient alarmants. Il était question de documents volés, de pressions exercées, de manipulation. La plupart de ces éléments sont abordés dans le rapport. Si vous prenez la peine de le lire en entier, je crois que vous trouverez cela important.

Le rapport résume l'éventail complet des témoignages reçus au comité, qu'il s'agisse des deux témoins qui croyaient que la STbr pourrait avoir des effets nocifs ou de ceux qui voyaient cette hormone comme un outil de production utile. Les deux groupes jugent qu'il y a des problèmes de gestion à la Direction générale de la protection de la santé. C'est important, car, le comité s'étant penché sur la santé des animaux, les injections et leurs effets sur les humains, nous croyons que les études à ce chapitre sont insuffisantes. Le comité s'est également intéressé à la façon dont Santé Canada aborde l'homologation.

Au sujet de l'homologation, il faut comprendre que la STbr n'est pas homologuée au Canada pour le moment. Elle l'est aux États-Unis, mais je crois savoir que deux sénateurs s'intéressent à ce dossier aux États-Unis également, à cause du travail accompli ici par le comité sénatorial et de la publicité que cela a suscité. Toute la question de savoir comment ces dossiers sont traités, qui accorde l'homologation et comment Santé Canada aborde le problème, revêt une grande importance.

Je voudrais m'attarder à l'expression «modification génétique», qui concerne tout ce dossier, les grains et bien d'autres cas. Chose certaine, nous ne voulons pas stopper les progrès scientifiques dans des domaines importants pour l'agriculture, et cetera, mais nous devons veiller à ce qu'il y ait un bon équilibre. Lorsque le comité sénatorial s'est rendu en Europe, la première question qui a été abordée, dans tous les pays où nous sommes allés et dans les 25 audiences que nous avons tenues en 10 jours, est celle des modifications génétiques.

Je vais vous donner un exemple. L'Europe ne veut pas du canola canadien parce qu'il est modifié génétiquement. Pourtant, et c'est plutôt étrange, les Européens prennent le canola traité des États-Unis. J'ai signalé que du canola produit à mon exploitation agricole, qui n'était pas modifié génétiquement, quoiqu'il a certes dû y en avoir, a été envoyé à des usines de transformation aux États-Unis, qui le transforment et ensuite l'expédient. C'est bon que nous puissions expédier par les États-Unis, mais qu'est-ce que cela va faire au commerce? L'Europe n'achètera pas notre canola. Il faudra voir comment toute cette affaire de produits modifiés génétiquement influe non seulement sur la santé des Canadiens, ce qui est important, mais aussi sur le commerce international.

En de nombreuses semaines d'audience, lors de l'étude de rapports et dans ses recommandations, le comité a veillé à examiner toutes les opinions et toute l'information qui ont été portées à son attention. Encore une fois, nous tenons à remercier les témoins qui ont comparu devant nous. Le comité a l'intention de convoquer d'autres témoins. Nous nous proposons de convoquer des hauts fonctionnaires et des scientifiques de Santé Canada car nous estimons qu'il n'y a pas eu assez d'études là-dessus. Je crois que les sénateurs Whelan et Spivak auront beaucoup à dire à l'égard de certaines de ces choses.

Honorables sénateurs, je serai bref, car je sais que d'autres veulent parler de cette importante question. Je remercie les membres du comité du travail qu'ils ont accompli. Je pense que ce dossier est important pour l'ensemble des Canadiens. Nous devons continuer cet excellent travail.

Pour terminer, je voudrais lancer quelques fleurs au comité du Sénat. Voici ce que je tiens à dire: j'ai siégé aux deux endroits et, sans vouloir minimiser la valeur du travail du comité de la Chambre des communes, je dois dire que les compétences sont exceptionnelles au sein du comité sénatorial. Contrairement à ce qui se passe à la Chambre des communes, on n'assiste pas, au sein du comité sénatorial, à des échanges politiques qui n'en finissent plus. En général, les membres du comité se sont entendus sur les aspects positifs ou négatifs.

Je veux profiter de cette occasion pour remercier chaque membre de son apport aux travaux du comité et je suis impatient d'entendre ce que vous avez à dire sur ce sujet important.

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, je voudrais, si je peux, poser une question au sénateur.

Le sénateur Gustafson: Certainement.

Le sénateur Taylor: Selon le titre d'un journal local, les scientifiques de Santé Canada, dont vous avez parlé tout à l'heure dans votre discours, ont accepté des affidavits pour pouvoir s'exprimer, ont reçu du ministère l'ordre de ne rien dire à la suite de leurs protestations, et on leur a imposé la consigne du silence probablement pour le reste de leur carrière, même si le Sénat a promis de surveiller les problèmes de gestion de Santé Canada.

Le président du comité peut-il nous dire quelles mesures il faudrait prendre, à son avis, si les gens qui ont pris la parole devant notre comité ont effectivement reçu une consigne de silence jusqu'à la fin de leur carrière?

Le sénateur Gustafson: Tout d'abord, nous comptons convoquer de nouveau ces scientifiques devant notre comité afin qu'ils nous disent de vive voix s'il y a des problèmes.

Par ailleurs, je pense que le sous-ministre a donné au comité l'assurance qu'il n'y aurait pas de mesures de représailles. Je vois certains sénateurs qui acquiescent et je pense avoir raison de dire cela. Le comité est donc certainement déterminé à aller au fond des choses.

(1630)

L'honorable Eugene Whelan: Honorables sénateurs, pour ajouter à ce qu'a dit le sénateur Taylor, nous avons aussi une lettre du ministre précisant que les scientifiques qui ont exprimé publiquement leurs sentiments ne feraient pas l'objet de représailles.

Je sais que je reprendrai certains des points que le président, le sénateur Gustafson, a mentionnés, mais je tiens à remercier les honorables sénateurs d'avoir donné au comité l'occasion de se pencher sur cette question. Je crois que les travaux de ce comité illustrent bien le niveau de collaboration que nous pouvons atteindre lorsque sont abordées des question aussi importantes. J'ai beaucoup de respect pour tous les sénateurs qui siègent au comité, car leur apport a été concret, et j'apprécie l'appui qu'ils m'ont accordé dans cette entreprise.

Premièrement, le document rendu public par le comité n'est qu'un rapport provisoire. Il n'est absolument pas définitif. Le comité tiendra d'autres audiences où seront entendus les scientifiques qui ont témoigné devant le comité l'an dernier, afin de prendre connaissance des changements apportés, le cas échéant. Tous ceux qui ont fait des promesses devant le comité devront rendre des comptes.

Diverses raisons font que l'enquête menée par le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts au sujet de l'hormone de croissance STbr revêt pour moi de l'importance. Les disponibilités alimentaires du Canada me tiennent à coeur, et je veux que les Canadiens aient pleinement confiance lorsqu'ils achètent des aliments pour leur famille. La tâche fondamentale de Santé Canada, et il faut que cela soit très clair, est de protéger la santé et de garantir la sécurité des Canadiens.

Lorsque j'étais ministre de l'Agriculture, le ministère a consacré des fonds d'un niveau sans précédent à la recherche afin de veiller à ce que les Canadiens soient à l'abri des mauvaises surprises scientifiques. Je suis fier de ce bilan de 11 ans qui montre que je suis un ardent partisan d'une biotechnologie qui est bonne, efficace et sans danger. En tant que comité, nous avons fait appel à nos ressources, à nos chercheurs et à nos pouvoirs d'évaluation. Les membres du personnel du comité ont travaillé de longues heures. Je suis convaincu que le fait de travailler avec nous fut pour eux une expérience de vie et d'apprentissage.

Le comité a entendu divers groupes préoccupés par la possibilité de l'introduction de cette hormone de même que par le rôle de Santé Canada dans toute l'affaire. Nous avons entendu des chercheurs de Santé Canada dire qu'ils avaient l'impression de subir des pressions, des groupes de consommateurs qui se sentaient impuissants de même que le sous-ministre de la Santé, David Dodge, qui s'est dit «extrêmement préoccupé». J'ai trouvé particulièrement convaincant le témoignage du Conseil national de l'industrie laitière du Canada, qui représente les transformateurs et les marchands de produits laitiers, c'est-à-dire le coeur de l'industrie. Ces gens sont responsables de la vente des produits laitiers. Leur organisme reste «férocement opposé à l'utilisation de la somatotropine bovine recombinante [...] car on n'a fait la preuve d'aucun avantage manifeste de son utilisation pour le consommateur, le fabricant ou le commerçant». La transformation des produits laitiers est le deuxième secteur en importance de l'industrie canadienne de l'alimentation et des boissons.

Honorables sénateurs, la STbr est une substance visant à augmenter la production. Ce n'est pas un médicament. Elle n'apporte absolument rien à la société. Ce que j'ai trouvé le plus troublant dans la possibilité de l'introduction de cette hormone au Canada, c'est le fait que le comité ait démontré qu'elle n'avait fait l'objet de pratiquement aucun véritable test scientifique. En fait, il n'existe aucune donnée sur ses effets à long terme sur la santé et il est impossible de démontrer quels seront ses effets sur les humains.

Honorables sénateurs, le comité a très bien représenté le Sénat dans nos efforts pour empêcher de faire consommer à l'ensemble de la nation des résidus d'une substance chimique ou biologique dont on a très peu étudié les effets à long terme sur la santé. Je le répète: il n'y a pratiquement pas eu de tests sur les effets à long terme de cette hormone sur la santé.

Je ne suis pas réfractaire à la biotechnologie ou à la biodiversité. Je possède une solide expérience en agriculture et je sais très bien qu'un très grand nombre des nouveaux produits mis au point ont permis d'améliorer beaucoup l'efficacité de nos producteurs agricoles. Il y a des gens qui croient que la peur de la STbr ne repose sur rien et accusent le comité de se mettre en travers du progrès. Cependant, nous n'avons pas besoin de cette hormone au Canada. Les Canadiens disposent d'un approvisionnement constant en lait sain qui fait l'envie du reste du monde. La STbr n'est pas une substance pouvant contrôler le cancer ni un vaccin contre la polio ou le sida.

J'ajouterai, honorables sénateurs, que je n'ai pas créé le système de gestion de l'offre pour le lait. C'est le regretté père du sénateur Hays qui l'a fait. Il a travaillé avec les provinces et les producteurs du pays. Ensemble, ils ont institué la Commission canadienne du lait, mesure qui a contribué plus que toute autre chose à mettre sur un pied d'égalité tous les producteurs de lait, qu'ils soient de la Nouvelle-Écosse ou de l'île de Vancouver. Avant cela, les producteurs laitiers du Québec et du Canada atlantique étaient tout au bas de l'échelle, alors que ceux de la Colombie-Britannique étaient tout en haut, suivis de ceux de l'Ontario. Les producteurs laitiers de la Colombie-Britannique ont été les premiers à se doter d'un système de gestion de l'offre pour leur lait. Certains disent que j'ai créé ce système, mais je n'avais alors que 4 ans. J'étais un consommateur de lait à ce moment-là. J'ignore si j'étais un bon gestionnaire des approvisionnements à ce moment-là. Les Britanno-Colombiens l'ont fait en 1928, et ils se sont dotés d'un des systèmes les plus sophistiqués qui existent pour n'importe quel produit, à ma connaissance. Personne ne peut trouver à redire à ce qu'ils font. Le Québec est maintenant dans la même position. Pourquoi? Parce que nous lui offrons un rendement économique pour produire un produit de qualité. Jamais nos produits laitiers n'ont été d'aussi bonne qualité.

Le comité a également reçu plus de 1 000 lettres. Je mets n'importe quel président de comité au défi de dire qu'il a déjà obtenu ce genre de réponse. Comme l'a dit le sénateur Gustafson en parlant de ces lettres, elles débutaient généralement de la façon suivante: «Je n'ai jamais trouvé le Sénat bien utile, mais vous avez accompli un travail formidable.» Il s'agit de lettres individuelles.

Honorables sénateurs, pour une personne qui se donne la peine d'écrire une lettre, il y en a 500 qui pensent de la même façon. J'ai reçu environ 500 lettres. D'autres membres du comité en ont reçu eux aussi. Le greffier de notre comité, M. Blair Armitage, a reçu lui aussi de nombreuses lettres de félicitations pour notre travail.

Une enquête en cours concernant la STbr examine les protéines lactosériques, dans lesquelles le Dr Michael Dowshe, du Toronto Sick Children Hospital, a reconnu un élément déclencheur du diabète juvénile. En Amérique du Nord, on calcule que 15 p. 100 de tous les coûts médicaux sont liés au traitement et à la gestion du diabète. Chaque année, aux États-Unis seulement, 60 000 personnes meurent du diabète. Ces résultats constituent une des principales inquiétudes en Europe, où cette hormone n'a pas encore été approuvée.

Tandis que je parle de ce sujet, un communiqué de presse publié aujourd'hui nous apprend que l'interdiction décrétée par la Communauté européenne contre l'hormone de la société Monsanto va probablement être reconduite pour encore cinq ans. Le Wall Street Journal rapporte ce matin que l'interdiction de cinq ans décrétée par la Communauté européenne contre l'hormone synthétique administrée à la vache sera probablement reconduite parce qu'un comité d'experts scientifiques nommés par les pouvoirs publics soulève, à l'égard de la santé humaine, des inquiétudes écartées par d'autres gouvernements. Le moratoire imposé sur la somatotropine bovine que la société Monsanto a mise au point par génie génétique afin d'accroître la production de lait de 15 p. 100 devait expirer le 31 décembre. Un comité d'experts de l'Union européenne a publié lundi un rapport qui recommandait d'étudier davantage la question de savoir si les vaches traitées à l'hormone bovine produisaient également dans leur lait un facteur de croissance analogue à l'insuline en quantités telles que la consommation de ce lait pouvait accroître le risque de cancer chez les humains.

(1640)

Comme je l'ai dit, ces résultats ont suscité de vives inquiétudes en Europe. On parle maintenant du nombre de pays qui ont approuvé ce produit. Combien de ces pays peuvent exporter une pinte de lait? Le principal pays exportateur, ce sont les États-Unis, qui ont été appuyés par l'Australie et la Nouvelle-Zélande à la réunion du Codex. Ces deux pays interdisent ce produit sur leur territoire, mais ont appuyé les États-Unis à cette réunion internationale parce que les États-Unis l'avaient approuvé. C'est de l'hypocrisie.

Comme je l'ai dit, le Wall Street Journal rapportait ce matin que l'interdiction de cinq ans imposée par l'Union européenne sera probablement maintenue. Monsanto aurait déclaré son intention de contester les conclusions du rapport du comité de l'Union européenne qui a été publié hier. Ce rapport demande que d'autres études soient réalisées afin de déterminer si le lait des vaches traitées à la STbr ne contient pas un facteur de croissance de substances apparentées à l'insuline. En concentrations assez importantes, l'IGF, comme on l'appelle, risque de causer le cancer chez les humains.

Ces conclusions de la Commission européenne vont à l'encontre des conclusions de l'American Food and Drug Administration, dont la politique est en grande partie fondée sur une étude non publiée et confidentielle effectuée par Monsanto et selon laquelle le lait hormonal est sans danger.

Le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts s'est aussi penché sur le rôle du Codex, l'organe de l'Organisation mondiale de la santé chargé d'établir les normes internationales en matière de sécurité alimentaire. Cette organisation a déclaré que le lait des vaches traitées à la STbr était tout à fait sans danger.

Les représentants de la FDA aux États-Unis et l'industrie sont représentés au Codex, mais qui défend les intérêts des consommateurs canadiens? Soixante-dix pour cent des fonds à la recherche proviennent de l'industrie et, à mon avis, c'est très mauvais. J'ai toujours considéré la recherche comme notre produit le plus important. Mais si elle est financée à 70 p. 100 par l'industrie, comment voulez-vous qu'elle soit indépendante? Nous savons que nos chercheurs ont peur à présent. S'ils disent ce qu'ils pensent et que le gouvernement les licencie, où vont-ils trouver du travail? Qui va les engager? Une situation dangereuse est actuellement en train d'être créée. Nous devons protéger la société en veillant à ce que la recherche soit indépendante, bien faite et honnête.

Le Codex s'entoure du plus grand secret. Quand ces gens se réunissent-ils? Où obtiennent-ils leurs renseignements? Les membres du comité ne sont pas permanents. Ils sont plutôt nommés avant chaque réunion. Les liens entre les fonctionnaires canadiens chargés de la réglementation et le Codex inquiètent beaucoup nos consommateurs. Ce sont des liens sur lesquels notre comité fera davantage enquête.

La situation aux États-Unis est très préoccupante. La FDA, le secrétariat américain aux produits alimentaires et pharmaceutiques, a signalé qu'il n'y a pas de données sur la santé à long terme et sur la STbr en tant que pur produit chimique ou sur le lait produit grâce à la STbr, mais cet organisme a quand même approuvé sa consommation par plus de 275 millions de personnes. En fait, il n'y a eu aucun test de santé effectué sur le lait provenant de vaches traitées à la STbr. Le directeur adjoint de la FDA, M. Steven Sundlof, est un ancien collègue du directeur de la recherche de Monsanto lorsqu'ils étaient à l'Université de la Floride, et M. Sundlof a siégé au comité consultatif de 1993 de la FDA. Il était censé être un chercheur indépendant et objectif. Il a été ensuite engagé comme directeur adjoint de la FDA sous les ordres du directeur David Kessler. Cela ne ressemble pas à une véritable enquête sur les effets sur la santé.

La société Monsanto a perdu 250 millions de dollars l'année dernière. Le cours de ses actions a chuté hier lorsqu'on a entendu parler du rapport de la Commission européenne. Comment pouvons-nous être certains que ce sont les intérêts des Canadiens qu'on défend avant ceux de cette multinationale, lorsqu'on veut avant tout protéger les actionnaires internationaux?

Dans le domaine de la recherche biologique, pour déterminer les effets de certains matériaux sur les populations, on utilise un petit groupe d'animaux comme échantillon pour voir ce qui pourrait se produire sur une population plus large. On a effectué des tests pendant 90 jours sur 30 rats. Nous ignorons s'il s'agissait de gros rats ou de petits rats, de rats gras ou maigres. Les Canadiens jugent-ils que 90 jours de tests sur 30 rats sur neuf ans suffisent? Je crois que non. Ces divergences nous amènent à ne pas vouloir exposer les Canadiens à un produit pour lequel nous n'avons aucune donnée sûre en matière de santé.

Santé Canada a publié son rapport le 17 janvier, même si on avait dit au comité qu'il serait publié en juin, juste avant la réunion du Codex Alimentarius qui devait avoir lieu à Rome. Tout à coup, le rapport a été publié le 17 janvier, même s'il n'était pas censé être prêt avant juin. On a certes accéléré le processus. Il est évident que les intéressés n'avaient pas beaucoup de connaissances. Je suis stupéfait de constater que le médecin a déclaré qu'il n'y avait pas de danger pour la santé humaine alors que les vétérinaires ont signalé des problèmes chez les vaches. C'est tout simplement incroyable.

Dans son rapport, Santé Canada indique que la STbr a été rejetée à cause des dangers potentiels qu'elle représente pour les animaux. Comment en est-on arrivé à une décision positive ou négative alors que le comité n'a eu accès à aucune preuve solide? Voilà pourquoi j'insiste sur le caractère provisoire du rapport. Nous ferons comparaître les responsables de cette décision devant le comité et leur demanderons comment ils sont parvenus à cette conclusion.

Le comité aimerait bien avoir accès aux preuves scientifiques de Monsanto.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Whelan, votre temps de parole est écoulé. Permission est-elle accordée au sénateur de poursuivre?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Whelan: Merci, honorables sénateurs.

Le comité aimerait bien pouvoir prendre connaissance des résultats du test sur les effets à long terme mené par Monsanto.

Cette question a valu au Sénat la couverture médiatique la plus positive qui soit depuis belle lurette. Les résultats de notre enquête ont été publiés dans de grands organes d'information au Mexique, en Australie, à Londres, à Berlin et à Paris. Le New York Times et l'Observer de Londres ont tous deux fait état du comité et de son enquête. Notre comité a fait de grandes choses, mais il reste encore du pain sur la planche. Le comité doit faire vite car, avons-nous appris, le fabricant de l'hormone envisage d'en appeler de la décision canadienne.

Le Sénat reçoit sa juste part de critiques en matière de dépenses et de reddition de comptes. Ces critiques fusent parfois tant de l'intérieur de cet édifice que de l'extérieur. Je dirais que, dans ce cas-ci, les représentants élus de la population canadienne devraient savoir gré à la Chambre de réflexion distincte d'être vivante et bien portante. Ils en ont vraiment pour leur argent. Nous avons fait de notre mieux. Nous n'avons pas fait passer nos intérêts de parti avant notre devoir. Le caractère sacré de notre système d'approvisionnement en produits laitiers, qui est renommé dans le monde pour sa pureté, est assuré grâce au travail accompli par ce comité. On n'a que faire de cette hormone.

On semble dire que cette question pourrait être soulevée de nouveau, peut-être après mon départ. Je demande donc à mes honorables collègues qui ont la chance d'avoir un mandat qui se poursuivra au cours du siècle prochain de voir à ce que cela ne se produise pas. Nous ne pouvons permettre à qui que ce soit d'emprunter des raccourcis en ce qui a trait à la biotechnologie, tout particulièrement si l'on tient compte du fait que le nombre de demandes transmises à la Direction générale de la protection de la santé a augmenté de façon considérable. On prévoit des augmentations de 200 à 500 p. 100 au cours des cinq prochaines années. On ne doit pas approuver la STbr avant d'avoir la certitude qu'elle ne présente pas de dangers pour les humains. Rien ne le prouve à l'heure actuelle. J'ai d'ailleurs bien confiance que cela n'arrivera jamais.

(1650)

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, il est vraiment dommage que le sénateur Whelan doive prendre sa retraite. Il pourrait certainement songer à donner des conférences qui pourraient s'intituler: «Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la STbr mais que vous n'avez jamais osé demander». Je suis tout à fait d'accord avec ses propos sur le fonctionnement du comité. Je peux vous dire qu'il n'y avait pas de mouches dans la salle du comité sénatorial. Les agriculteurs parmi vous comprendront ce que je veux dire.

Le témoignage des scientifiques de Santé Canada et le rapport sur les lacunes qu'ils ont présenté à notre comité ont eu d'importants effets, pas seulement au Canada, mais également aux États-Unis et en Europe. Lorsqu'ils ont établi que l'étude toxicologique de 90 jours sur la STbr avait été mal rapportée il y a quelques années, deux autres études ont été entreprises à ce sujet. Des sénateurs du Vermont se sont adressés à la Food and Drug Administration des États-Unis. De même, d'autres groupes d'intérêt américains ont demandé à la FDA de retirer l'hormone de croissance bovine du marché aux États-Unis.

Cet été, le Centre for Food Safety, ainsi que plus d'une vingtaine de groupes de défense des consommateurs américains, doivent pousser plus loin et contester la FDA en cour fédérale.

Dernièrement, nous nous sommes penchés sur les pratiques répréhensibles. Avant sa dernière réunion, le comité mixte d'experts des additifs alimentaires (CMEAA), organisme scientifique international de la Commission du Codex Alimentarius, a déclaré qu'on avait certifié à notre comité que la STbr présentait peu de risque, sinon pas du tout pour la santé humaine. Le mois dernier, la publication britannique London Observer a sollicité nos commentaires. Nous possédons des preuves établissant que des rapports confidentiels de l'Union européenne et de groupes d'intérêt public des deux continents avaient été transmis en douce à Monsanto avant la réunion du CMEAA. Cela ne devrait pas se produire. En conséquence, l'Organisation internationale des unions de consommateurs, qui représente des centaines d'associations de consommateurs partout dans le monde, a demandé au CMEAA une nouvelle étude sur la STbr.

En juin, quand la Commission du Codex Alimentarius se réunira en Europe, il sera question des preuves de notre comité sur l'étude de 90 jours, de l'absence de données scientifiques et de la nouvelle de l'ingérence du CMEAA. Ce mois-ci, des représentants de la BBC viennent à Ottawa pour s'informer de ce que nous avons appris. Ils doivent effectuer une interview avec le sénateur Whelan.

Pourquoi l'étude sur un médicament soulève-t-elle autant d'intérêt au Canada et à l'étranger? En un mot, c'est une question de confiance. Les Canadiens ont appris que, pendant presque huit ans, les fonctionnaires du Bureau des médicaments vétérinaires n'ont pas fait preuve de diligence raisonnable en étudiant la STbr. Les Canadiens ont également appris que, seulement 21 jours après que Monsanto eut déposé ses mémoires, le Bureau des médicaments vétérinaires a dit au fabricant qu'il n'y avait aucun problème de sécurité non réglé. Ils ont appris que le ministère avait suspendu les exigences habituelles pour les études de longue durée. Nous avons entendu dire que, jusqu'à maintenant, bien peu de recherches avaient été effectuées directement sur les effets de la STbr sur la santé humaine. Pourtant, on a suspendu les exigences.

Par l'intermédiaire de notre comité, les Canadiens ont appris que des dossiers sur la STbr avaient été volés au bureau. Les évaluateurs de médicaments ont cru que le fabricant avait essayé de les soudoyer. Les scientifiques de Santé Canada ont été muselés après avoir commencé à parler publiquement de l'étude sur le médicament. Même notre comité, un comité du Parlement, n'a pu obtenir du bureau le rapport d'analyse des écarts sur la STbr avec les données principales. Nous ne l'avons pas obtenu. Les preuves réunies portent automatiquement à conclure que des changements sont nécessaires à Santé Canada, pour rétablir la confiance de la population.

Le rapport provisoire du comité formule des recommandations raisonnables à cet égard. Nous sommes confiants que le ministre de la Santé et son sous-ministre les examineront sérieusement. Le sous-ministre nous a dit que c'est la population, et non l'industrie, qui est le client de Santé Canada.

Les preuves du déraillement du processus d'approbation des médicaments, à la Direction générale de la protection de la santé, importent peu pour les organismes ou les groupes d'intérêt public des États-Unis ou du Royaume-Uni. Pourquoi s'intéressent-ils donc aux conclusions de notre comité? Encore une fois, le maître mot est «confiance». Ils veulent pouvoir faire confiance à des études concluantes avant que les Européens ne soient exposés à des résidus de STBr. Pour leur part, les États-Unis veulent avoir confiance que leurs habitants ne seront pas exposés à des résidus qui nuiront à leur santé à long terme. Nous tenons cela pour acquis, mais les choses ne se passent pas toujours ainsi.

Ce mois-ci, les motifs d'inquiétude se sont accrus. Le rapport du comité scientifique de l'Union européenne, qu'a mentionné le sénateur Whelan, parlait de risques directs présentés par le lait contenant de la STBr. Notamment, il y a un risque d'augmentation d'un résidu appelé FCI-1, qu'on associe, entre autres, aux cancers du sein et de la prostate. Ce rapport a été déposé. Il indique que la preuve expérimentale d'un lien entre le FCI-1 et le cancer du sein ou de la prostate est étayée par des études épidémiologiques. L'activité du FCI-1 est essentielle dans le processus de différenciation cellulaire, elle règle l'expression de plusieurs gènes et agit comme facteur de croissance cellulaire. Le rapport met en doute l'établissement d'un niveau «sans effet préjudiciable», disant qu'il s'agit là d'un paradigme dans l'évaluation des risques conventionnels.

Je mentionne cette dernière observation, car on préconise toujours l'évaluation des risques, et pas forcément des mesures de précaution.

Le rapport de l'Union européenne mentionne également des changements potentiels dans le lait qui pourraient provoquer des réactions allergiques et accroître le risque de l'apparition de bactéries résistantes aux antibiotiques.

Le printemps dernier, le Sénat a adopté une motion du sénateur Whelan demandant une étude plus approfondie de la STbr. Jusqu'à ce jour, toutes les preuves que nous avons entendues confirment qu'une étude plus poussée s'impose. Malheureusement, malgré l'annonce qu'a faite Santé Canada en janvier, à savoir qu'il n'approuverait pas la demande de Monsanto, le fabricant n'accepte pas cette décision. Il poursuit plutôt le dialogue avec des fonctionnaires de Santé Canada afin de dissiper les préoccupations du ministère à l'égard de la sécurité des animaux.

Monsanto nous dit aussi qu'elle n'est pas d'accord avec l'autre groupe d'experts, celui qui est chargé d'examiner les questions relatives à la santé des humains. Elle a autorisé des recherches plus poussées sur le médicament, mais en affirmant que l'étude toxicologique de 90 jours devait être refaite. Il semble que certains dirigeants du Bureau des médicaments vétérinaires croient également inutile de refaire cette étude.

La recommandation intérimaire de notre comité à l'égard des études de longue durée - c'est-à-dire les études de plus de 90 jours - s'éloigne de toute évidence des conclusions du groupe d'étude externe canadien sur l'effet de l'hormone sur la santé des humains. Il faut alors décider s'il y a lieu de ne pas tenir compte de l'opinion des experts réunis par l'intermédiaire du Collège royal des médecins et chirurgiens. Je tiens à traiter du sujet sans détour. Il aurait peut-être été plus simple pour nous de voir dans le rapport du groupe d'étude le point final sur la question de l'effet de l'hormone sur la santé des humains, mais les scientifiques, dont un évaluateur de médicaments de Santé Canada à la retraite, et d'autres experts qui étudiaient la question depuis plus de dix ans, ont des réserves à l'égard du rapport de ce groupe d'étude.

Le comité veut entendre les membres du groupe d'étude et les personnes qui ne souscrivent pas à ses conclusions. Maintenant que le groupe d'étude scientifique de l'Union européenne se dissocie nettement du groupe d'étude canadien, il importe encore plus de peser soigneusement les nouveaux témoignages. Il y a toute une liste d'études qui traitent de cette question dans l'annexe du rapport du comité scientifique de l'Union européenne.

Le comité veut aussi entendre le comité canadien de la sécurité des animaux et donner aux représentants de Monsanto la chance de réfuter ses conclusions que la STbr représente un risque inacceptable pour la santé humaine. À cet égard, le comité scientifique de l'Union européenne conclut également que la STbr cause des taux inacceptables de mammites, d'animaux boiteux et d'autres problèmes.

Nous voulons entendre toutes les nouvelles constatations avec l'esprit ouvert. En même temps, nous croyons que ce serait une erreur de s'entendre pour interdire le produit en raison de craintes pour la sécurité des humains au Canada et ailleurs en se fondant sur le dernier rapport du comité canadien. Les constatations dont nous avons pris connaissance jusqu'à maintenant nous amènent à recommander des études à long terme. Voilà ce que nous recommandons.

C'est tout à l'honneur du Sénat et, en particulier, du comité que de pouvoir affirmer que notre étude est tout à fait impartiale. Les sénateurs des deux parties jouaient franc-jeu. Si une partie a été favorisée, à notre comité, ce ne peut qu'être les agriculteurs canadiens, parce que nous tenions à voir à ce qu'ils aient tous les avantages et tous les outils de production dont ils ont besoin pour être concurrentiels et produire des aliments de grande qualité.

(1700)

Plusieurs d'entre nous avons de l'expérience dans le monde de l'agriculture. Nous sommes très préoccupés par la crise financière qui guette nos producteurs de grain et de porc. Nous sommes très conscients que tous les producteurs doivent rester à la hauteur de la concurrence. Nous savons aussi que la survie à long terme des producteurs dépend de la confiance des consommateurs. Nous voulons que rien ne vienne miner cette confiance ni n'amène les Canadiens à boire moins de lait ni à manger moins de produits laitiers. De la même manière, nous savons que la confiance de la population dans la Direction générale de la protection de la santé dépend à long terme de la preuve que la santé publique vient au premier plan dans l'examen de tout médicament.

Je félicite le ministre de la Santé pour la décision qu'il a prise en janvier. J'ai toujours su qu'il ferait la seule chose à faire. J'espère que le ministre et ses successeurs garderont le cap. J'espère que le gouvernement prendra nos recommandations très au sérieux et que les hauts fonctionnaires seront à l'avenir plus rigoureux dans leur exigence que les fabricants de médicaments prouvent l'innocuité de leurs produits.

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, ma collègue répondra-t-elle à une question?

Le sénateur Spivak: Certainement, honorables sénateurs.

Le sénateur Di Nino: Un article porte là-dessus dans le Quorum d'aujourd'hui. J'ai parlé d'une étude de la Commission européenne selon laquelle la STbr est liée aux cancers du sein et de la prostate.

Au cours des délibérations du comité, d'autres personnes ont-elles prétendu la même chose? Des spécialistes ont-ils parlé d'autres risques possibles pour la santé humaine en ce qui concerne la STbr?

Le sénateur Spivak: Honorables sénateurs, au cours des délibérations du comité, nous avons entendu parler d'une étude menée récemment par l'Université Harvard et le Mount Sinai Hospital. Il faut être prudent, honorables sénateurs. Personne n'a encore dit que le FCI-1 de la STbr du lait cause le cancer du sein ou celui de la prostate. Ce qu'on dit, c'est qu'il y a un lien entre des taux élevés de FCI-1 et les cancers du sein et de la prostate et peut-être d'autres choses.

Une étude plus approfondie s'impose, et c'est exactement ce que réclament tous les intéressés. La façon superficielle avec laquelle cette affaire a été traitée est vraiment scandaleuse. On ne dit pas qu'un médicament est sûr après 21 jours sans examen. Aux États-Unis, la Food and Drug Administration s'est trompée dans sa déclaration. Il y a quelque chose de pas très catholique dans toute cette affaire, si vous me passez l'expression.

Le sénateur Di Nino: Le président du comité peut-il nous dire si le comité a l'intention d'étudier le rapport de la Commission européenne dont il est question dans l'article dont je viens de parler?

Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, il y a eu consensus pour que nous étudiions la question plus en profondeur et que nous examinions d'autres rapports scientifiques sur la question. Voilà ce que le comité compte faire.

Le sénateur Whelan: Honorables sénateurs, je voudrais, moi aussi, poser une question au président du comité. Il a parlé des travaux génétiques qui sont effectués. Le président du comité sait-il qu'aujourd'hui, à Sao Paulo, au Brésil, les autorités brésiliennes ont ordonné l'interruption des travaux dans une plantation où la société Monsanto cultive une nouvelle fève soja génétiquement modifiée? Cette mesure survient quelques jours seulement après que l'État eut ordonné à la société Monsanto de présenter des énoncés des incidences environnementales pour toutes les régions où elle cultive des produits génétiquement modifiés. Le secrétaire d'État à l'Agriculture a dit que quiconque omet d'informer le ministère de l'Agriculture de ses recherches sur des organismes génétiquement modifiés ne peut poursuivre ses travaux. Le président du comité était-il au courant de cela?

Le sénateur Gustafson: Oui, je suis au courant. En fait, un des quotidiens consacrait une page complète aux céréales génétiquement modifiées; il y était question de 30 céréales, de légumes et notamment de la fève soja, un concurrent du colza canola que je cultive.

(Sur la motion du sénateur Milne, le débat est ajourné.)

L'état du système financier

Étude du rapport intérimaire du comité sénatorial permanent des banques et du commerce-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'étude du seizième rapport (intérimaire) du comité sénatorial permanent des banques et du commerce intitulé: «Les pratiques de régie interne des investisseurs institutionnels», déposé au Sénat le 19 novembre 1998.-(L'honorable sénateur Oliver).

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, j'interviens dans le débat sur le sixième rapport (intérimaire) du comité sénatorial permanent des banques et du commerce intitulé: «Les pratiques de régie interne des investisseurs institutionnels».

Je suis très heureux de participer à ce débat après l'intervention que le sénateur Angus a faite il y a environ deux semaines. Je dis cela parce que j'étais parmi ceux qui ont exhorté le comité à entreprendre cette étude.

En 1995-1996, le comité des banques et du commerce a entrepris une étude très importante sur les éléments de régie interne des entreprises canadiennes cotées à la bourse afin de proposer des modifications aux dispositions de la Loi sur les sociétés par actions touchant la régie interne. Durant cette étude, nous avons eu l'occasion de rencontrer un certain nombre de témoins qui ont discuté avec nous du rôle que les investisseurs institutionnels jouaient sur les marchés financiers du Canada. Cela m'intéressait beaucoup. À l'époque, j'ai posé des questions à de nombreux témoins qui ont comparu devant le comité au sujet du rôle des investisseurs institutionnels sur les marchés financiers du Canada, de leur pouvoir croissant et de la façon dont ces investisseurs influençaient les pratiques de régie interne des entreprises dans lesquelles ils détenaient des actions. Il s'agissait aussi de savoir si on devait ou non divulguer davantage la nature de leurs activités.

J'ai basé mes questions en partie au moins sur une étude effectuée par le doyen Ronald Daniels, de la faculté de droit de l'Université de Toronto, et le professeur Randall Morck, de la faculté des sciences commerciales de l'Université de l'Alberta. Dans leur article sur la régie des sociétés canadiennes et les options qui s'offraient en matière de politique, les auteurs ont posé les questions suivantes:

Qui sont les gens qui administrent les caisses de retraite?

S'acquittent-ils bien de leur travail?
Quels encouragements s'offrent à eux?
Dans quelle mesure défendent-ils leurs propres intérêts ou des intérêts autres que ceux de leurs bénéficiaires?

Daniels et Morck affirment qu'en général, on n'a pas posé ces questions au Canada et qu'on n'y a pas répondu même si les gestionnaires de caisse de retraite prennent régulièrement des décisions de plusieurs milliards de dollars qui influent beaucoup sur les décisions des grandes sociétés et sur la sécurité des caisses de retraite de millions de Canadiens.

Ed Waitzer, l'ancien président de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, a déclaré ceci en réponse à une de mes questions:

Nous devons obtenir certaines données rapidement. Ce secteur va continuer de grossir rapidement et d'exercer une influence extrêmement importante sur notre économie... Il y aura une trop grande concentration et trop de pouvoirs entre les mains de trop peu de gens. Nous ne comprendrons pas cela et nous finirons avec une mauvaise politique.

Notre enquête sur les investisseurs institutionnels était divisée en deux parties. Il y avait tout d'abord l'influence des investisseurs institutionnels sur la régie des entreprises dans lesquelles ils investissent. Il y avait ensuite les pratiques de régie interne des investisseurs institutionnels eux-mêmes et la mesure dans laquelle ils répondent ou non aux exigences des gens qui cotisent et dont ils investissent l'argent.

Un exemple de l'influence des investisseurs institutionnels sur les activités des sociétés dans lesquelles ils investissent est survenu assez récemment. J'ai lu dans le National Post un article qui portait sur les mines de la Noranda. Selon cet article, la Noranda a annoncé il y a un mois environ qu'elle prévoyait de créer deux catégories d'actions ordinaires, dans le but de faciliter sa fusion avec Falconbridge Limited. Toutefois, d'aucuns craignaient que cette mesure ne soit la première étape d'un plan visant à créer une structure d'actions avec droit de vote et d'actions sans droit de vote à la Noranda, ce qui porterait préjudice aux actionnaires minoritaires. Le Groupe Investors et la Caisse de retraite des enseignants de l'Ontario, qui sont tous deux détenteurs d'un important bloc d'actions, ont annoncé qu'ils voteraient contre le plan à l'occasion d'une future assemblée de la société. Le plan a été abandonné à cause des réactions négatives des investisseurs institutionnels de la Noranda.

(1710)

Afin de mieux saisir l'importance de ces questions de régie des sociétés, on doit tenir compte de la taille des investisseurs institutionnels. En 1996, les 15 principales caisses de retraite du secteur public avaient un actif de quelque 150 milliards de dollars canadiens, les 15 principales caisses de retraite du secteur privé, un actif de 50 milliards de dollars, et les sociétés de placement collectif et les compagnies d'assurances canadiennes, un actif de plus de 250 milliards de dollars canadiens. Grâce à ces énormes ressources et à l'accès à ces dernières au moyen des cotisations versées aux fonds de pension et aux fonds communs de placement, les investisseurs institutionnels peuvent exercer une influence considérable sur l'économie des pays où ils sont actifs et sur les sociétés dans lesquelles ils investissent.

Je trouve fort intéressante toute la question des activités des investisseurs institutionnels.

Tom Gunn, vice-président principal des investissements de la Commission du régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario, ou CRREMO, a déclaré il y a environ un an que cet organisme se demandait:

[...] s'il devait ou non analyser les entreprises et déterminer leur cote globale afin de savoir quelles sont celles qui sont les mieux administrées au Canada et celles dont l'administration laisse à désirer.

La réalité, c'est que les investisseurs institutionnels intensifient leurs activités au Canada. L.R. Wilson, ancien PDG de BCE, a déclaré devant le comité que le plus important actionnaire de la société avait récemment visité BCE et qu'il avait en main une liste très structurée de questions. Bon nombre avaient trait à l'administration de la société, y compris au rôle du conseil d'administration de BCE.

À l'occasion d'une conférence de l'OCDE qui s'est déroulée en février 1998 et qui portait sur le gouvernement et la responsabilité d'entreprise, les participants ont signalé que les investisseurs institutionnels et les dirigeants entretiennent des contacts de plus en plus étroits dans le cadre de rencontres privées. La concurrence poussant les divers investisseurs institutionnels à maximiser le rendement de leur portefeuille, ceux-ci sont portés à s'adresser plus directement aux dirigeants pour prendre connaissance de la stratégie et du rendement des sociétés.

Je dois reconnaître, honorables sénateurs, que j'ai de sérieuses réserves au sujet de ces rencontres privées entre les représentants de certains fonds de retraite et les dirigeants des sociétés dans lesquelles ils investissent.

La cause probable de ce nouvel activisme, c'est que les investisseurs institutionnels éprouvent souvent de la difficulté à vendre les actions qu'ils détiennent dans des entreprises qui n'ont pas un bon rendement. Pourquoi en est-il ainsi? Parce le déplacement d'un très important bloc d'actions peut influer de façon marquée et néfaste sur le prix de celles-ci. La solution de rechange à la vente consiste à devenir plus actif au sein de cette société. Comme le souligne l'OCDE:

Il se peut que la participation des investisseurs institutionnels à la régie se traduise par une moins grande intervention de crise et une stratégie plus continue d'interaction entre les administrateurs et les grands propriétaires.

L'activisme des investisseurs institutionnels soulèvera différentes questions de politique, en particulier en ce qui concerne le traitement différent réservé aux petits et aux grands investisseurs. La principale préoccupation tient à l'accès privilégié dont peuvent bénéficier les investisseurs à l'occasion de rencontres privées avec la direction. Même si les règles du commerce applicables aux initiés ne sont pas transgressées, l'accès particulier risque de donner aux investisseurs institutionnels un aperçu privilégié et précieux d'une société.

En fait, si les décisions des investisseurs institutionnels peuvent vraiment profiter à tous les investisseurs, cela ne pose aucun problème dans la pratique; mais qui décide si telle ou telle décision est dans l'intérêt de tous les investisseurs, surtout quand on sait que les investisseurs n'ont pas tous les mêmes objectifs et ne font pas tous la même interprétation des données et des événements?

En fait, selon certains des témoins entendus par le comité, on ne devrait pas confier aux investisseurs institutionnels la responsabilité de surveiller les sociétés. Les objectifs de leurs politiques d'investissement ne sont pas toujours compatibles avec les intérêts de tous les autres investisseurs. J. C. Delorme, ancien président-directeur général de la Caisse de dépôt et placement du Québec, a dit que beaucoup d'investisseurs institutionnels ne veulent pas jouer les chiens de garde. C'est évident, car ils ont l'obligation fiduciaire de veiller sur les intérêts de leurs membres et non sur ceux de l'ensemble de la société.

De toute évidence, ces points de vue opposés mettent en lumière la nécessité de mieux comprendre la façon dont les investisseurs institutionnels peuvent exercer leur influence, l'exercent et devraient l'exercer. Sous ce rapport, nous avons eu l'aide de divers témoins qui nous ont dit des choses fort intéressantes au sujet des problèmes qu'éprouvent les investisseurs institutionnels. Le professeur MacIntosh, de l'Université de Toronto, spécialiste des questions de régie interne d'entreprise, a soutenu ce qui suit:

On s'attend à ce que les investisseurs institutionnels surveillent mieux que les investisseurs particuliers, ou épargnants, les entreprises dans lesquelles ils investissent, du seul fait qu'ils ont de plus gros intérêts en jeu et que, partant, ils sont susceptibles de s'intéresser de beaucoup plus près aux dirigeants de ces entreprises.

Ses travaux empiriques l'ont amené à constater qu'une part importante des biens appartient aux investisseurs institutionnels et que leurs actifs et avoirs propres ont un rendement élevé. Il a ajouté que les investisseurs institutionnels sont moins actifs qu'ils devraient l'être en raison des contraintes juridiques.

L'absence de vote confidentiel est un problème clé. Les banques et les sociétés d'assurance, par exemple, ne veulent pas se mêler de régie interne si cela doit altérer leurs rapports avec leurs clients actuels ou des clients éventuels. Si le vote confidentiel était institué, les dirigeants des sociétés ne pourraient plus voir voter les mandataires ni, partant, pénaliser les actionnaires qui ne les appuieraient pas. Les fonds de pension, des institutions qui n'ont pas ce problème, sont les intervenants les plus énergiques lorsqu'il s'agit de régie interne.

Les règles relatives à la procuration constituent une autre restriction de la loi. Si des actionnaires institutionnels échangent de l'information concernant une entreprise dans laquelle ils détiennent des actions, cela les oblige à publier une circulaire dissidente de sollicitation de procuration. Cette obligation a pour effet de prévenir les échanges de renseignements officieux entre actionnaires institutionnels, qui pourraient avantager toutes les parties concernées, y compris la direction d'une société.

Les investisseurs institutionnels ne pratiquent pas de microgestion. Ils tendent plutôt à intervenir dans les décisions importantes comme l'adoption de pilules empoisonnées ou les décisions relatives à des fusions.

Un spécialiste des investisseurs institutionnels américains a soulevé un point intéressant en comparant les fonds canadiens et américains. Il a fait valoir que certains grands régimes de retraite canadiens interviennent activement dans la régie d'entreprise de façon moins publique et moins litigieuse que ne le font leurs homologues américains. Il a ajouté qu'il serait peut-être indiqué de divulguer publiquement les initiatives des régimes de pension publics canadiens.

La dernière question a été traitée par M. William Riedl, un spécialiste canadien des questions de régie. Selon lui, il n'est pas nécessaire, au Canada, d'exercer un contrôle et un ciblage agressifs des compagnies comme c'est le cas aux États-Unis. Le niveau de compétence des investisseurs institutionnels est plus élevé au Canada qu'aux États-Unis. D'autre part, les investisseurs américains doivent contrôler un nombre beaucoup plus grand d'entreprises que les investisseurs canadiens. Les investisseurs institutionnels canadiens devraient connaître plus intimement un nombre plus restreint d'entreprises.

M. Riedl s'est dit d'avis que la possibilité de divulgation publique et d'embarras pourraient amener les entreprises à modifier leur attitude et que la crainte de la publicité est un incitatif au changement plus puissant que la publicité elle-même.

Au sujet de la transparence des communications entre un investisseur institutionnel et une société dont les titres sont échangés dans le public, M. Riedl a fait valoir que la divulgation ne devait pas être exigée, sauf s'il y a échange d'actions. Cette question revient sans cesse. À quoi sert-il pour un petit investisseur d'avoir accès aux mêmes renseignements que l'investisseur institutionnel, mais seulement après que ce dernier a déjà agi? Par ailleurs, il convient de se demander s'il y a lieu de continuer d'interdire aux investisseurs institutionnels d'agir sur la foi des renseignements qu'ils ont obtenus et que toute autre personne peut obtenir en posant les bonnes questions. De toute évidence, les institutions ont des ressources qui leur permettent d'utiliser et de recueillir des renseignements que n'ont pas les petits investisseurs.

Nous sommes tous préoccupés par la transparence, par l'accès facile et rapide à des renseignements exacts par ceux qui en demandent. Cela est vrai autant dans le cas des activités des grands investisseurs que de celles de sociétés inscrites à la bourse.

L'autre question avec laquelle nous avons été aux prises au cours de nos audiences en comité concernait l'organisation interne des investisseurs institutionnels, autrement dit, leurs propres pratiques de gestion. Nous parlons ici, bien sûr, de la reddition de comptes et de la façon de l'intégrer dans un système de gestion. Bien qu'aucun des témoins qui ont comparu devant le comité n'ait laissé entendre qu'il existait une crise dans le secteur des fonds de pension ou dans celui des fonds de placement en ce qui a trait aux questions de gestion, presque tous les témoins ont dit qu'il y avait amplement de place pour des améliorations. La taille et le rôle des investisseurs institutionnels ont changé si radicalement ces dernières années que, dans certains cas, les pratiques de gestion n'ont tout simplement pas eu la chance de s'adapter à la nouvelle situation.

(1720)

John Por, un expert en régie qui a travaillé auprès du comité, a mis l'accent sur les grandes caisses de retraite du secteur public. Il a déclaré que:

Les pratiques de régie des grandes caisses de retraite du secteur public devraient à notre avis (Cortex Consultants) tout au moins, être examinées dans le but d'établir des lignes directrices pour redresser la situation.

Il a ajouté qu'en général, «il y a peu de conseils bien dirigés». Selon lui, même les théoriciens ne s'entendent pas sur les critères généralement acceptés pour évaluer le rendement des conseils d'administration des régimes de retraite du secteur public.

John Palmer, le surintendant des institutions financières, a dit à peu près la même chose au sujet des régimes privés de retraite. Il a notamment déclaré ceci:

Au fil des ans, nos travaux de surveillance et d'inspection des régimes de retraite ont toujours démontré l'existence de problèmes périodiques et de conduite inappropriée. À titre d'exemple, citons ce que nous considérons comme un manque de professionnalisme de la part de certains vérificateurs, actuaires et autres conseillers, l'existence de placements inappropriés, la perception de commissions sur les placements par les administrateurs de régimes et les actuaires, la constatation de dépenses excessives ou inappropriées imputées au régime, la présence de conflits d'intérêt touchant les décisions d'investissement ou l'octroi de prestations, et la proposition de modifications à des régimes accordant des prestations pour services antérieurs à certaines catégories de participants et en l'absence d'une capitalisation adéquate.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Oliver, je suis désolé de vous interrompre, mais vos 15 minutes sont écoulées. Demandez-vous la permission de poursuivre?

Le sénateur Oliver: Oui.

Son Honneur le Président: Permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Oliver: Je vous remercie, honorables sénateurs.

Je poursuis ma citation des paroles de John Palmer:

À notre connaissance, la plupart des régimes sont bien gérés et bien capitalisés. Toutefois, il conviendrait d'améliorer les méthodes de gestion ou la capitalisation de certains régimes.

Un autre expert, M. Keith Ambachtscheer, a exprimé certaines inquiétudes au sujet du manque d'information des clients des services d'investissements institutionnels, y compris des titulaires de régimes de pensions. Il a dit ceci:

Nous devrions tous nous inquiéter du déséquilibre de l'information entre les acheteurs et les vendeurs dans le système actuel. Dans un sondage où l'on a demandé à 2 000 Canadiens s'ils savaient combien ils payaient en frais d'administration aux fonds communs de placement, 45 p. 100 d'entre eux ne savaient même pas qu'ils payaient quelque chose. La règle dans le domaine des pensions est que chaque réduction du rendement d'un point de pourcentage représente une réduction de la pension de 20 p. 100.

Toutes ces inquiétudes exprimées par les témoins devant le comité partent de la question de savoir comment s'assurer qu'il y a responsabilité. Les fonds de pensions posent un problème particulier à ce niveau. Dans le monde des entreprises, les actionnaires élisent des administrateurs pour protéger leurs intérêts. Si les actionnaires le veulent, ils peuvent renverser les administrateurs ou se retirer en vendant leurs actions. Les actionnaires ont un important contrôle sur leur destin.

Toutefois, les fonds de pension ne sont pas des institutions auxquelles ont peut adhérer puis s'en retirer facilement. En outre, il se peut qu'il y ait peu d'information disponible pour l'évaluation de leur rendement. Autrement dit, quand une organisation n'est pas l'objet de pressions du marché, cela suscite des complications. Le professeur Jeffery Macintosh, de l'Université de Toronto, a dit dans son témoignage:

Si vous examinez la foule de contrôles qui existent pour régir les gestionnaires des sociétés, vous constaterez qu'ils disparaissent presque tous dans les caisses de retraite. Voilà pourquoi j'affirme que la régie des caisses de retraite est un problème beaucoup plus délicat que celui de la régie des sociétés.

Dans ces circonstances, quelles sont les inquiétudes que suscite la régie de ces caisses et comment les avons-nous étudiées, en tant que comité? Certains témoins ont exprimé des inquiétudes au sujet des compétences des administrateurs qui siègent aux conseils des régimes du secteur public. Le comité a constaté que ces conseils, une fois établis, n'avaient pas de processus de transfert et de sélection bien établis pour garantir que leurs membres ont l'expérience, le savoir et les compétences voulus pour exercer ces fonctions de fiduciaires. Des groupes intéressés comme des gouvernements, des employeurs ou des syndicats peuvent influer sur les nominations. Par conséquent, le processus de sélection pourrait être fortement influencé par les programmes qui ne respectent pas le paradigme du bon gouvernement et de l'exercice honnête des fonctions de fiduciaire. John Por a dit, dans son témoignage:

On pourrait très bien faire valoir qu'un cycle de conseils d'administration faibles qui entraîne des conseils plus faibles et des dirigeants encore plus faibles peut s'installer, à cause de la nature des régimes à prestations déterminées...

Dans le cas des régimes de pension du secteur public, cela signifie que les contribuables pourraient être appelés à rectifier les erreurs des conseils d'administration faibles. Le comité était passablement inquiet face à ce risque.

En termes simples, le comité croit qu'il est très important que les membres des conseils d'administration de toute institution financière, ainsi que dans le contexte particulier des régimes de pension du secteur public, aient la compétence pour traiter aisément de questions financières complexes. Les conseils d'administration ont le devoir, envers les participants aux régimes, de s'assurer qu'un nombre suffisant de leurs membres ont le recul, l'expérience, les connaissances et, surtout, le temps nécessaire pour surveiller les opérations complexes qu'exige l'administration d'un régime de pension. Ces opérations peuvent avoir trait à la gestion des investissements, aux systèmes d'information, à l'administration, aux communications et à la gestion des risques. Tous ces domaines exigent un degré élevé de compétence et de connaissance.

Honorables sénateurs, la transparence, les déclarations publiques obligatoires et les tentatives pour éviter tout embarras inciteront probablement les intéressés à apporter de plus grands changements aux méthodes et aux structures de régie internes que tout autre facteur.

L'étude que le comité des banques a effectuée sur les investisseurs institutionnels est un pas dans la bonne direction, mais ce n'est que le début. À mesure que les investisseurs institutionnels prendront de l'expansion et acquerront de l'influence, il nous faudra réexaminer nos recommandations pour déterminer si elles ont été appliquées et si elles sont efficaces.

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, puis-je poser une question à l'honorable sénateur?

Le sénateur Oliver: Certainement.

Le sénateur Taylor: J'aimerais connaître votre avis sur les grandes institutions ou les grandes sociétés, qu'il s'agisse de sociétés mutuelles, de sociétés d'investissement ou de caisses de retraite. Ayant moi-même été actionnaire de quelques sociétés ouvertes, je conviens que les grandes institutions exercent énormément d'influence sur une société. Si une caisse de retraite décidait d'investir dans votre société, vous aviez la vie belle, du moins pour un certain temps.

Les représentants de la caisse de retraite ne siégeaient pas au conseil d'administration, parce qu'ils ne s'intéressent pas à la gestion et se tiennent loin de la régie interne. Aux termes des lois régissant les opérations cambiaires et les valeurs mobilières, qui varient d'une province à l'autre, ces investisseurs n'étaient pas considérés comme des initiés. Quant à moi, je les considère comme de véritables initiés. Par exemple, lorsqu'un investisseur institutionnel détenant une grande part des actions m'appelait, j'étais aux anges. J'avais énormément de mal à ne pas divulguer ce renseignement et à ne pas donner d'indices aux actionnaires généraux. Je me suis souvent demandé à l'époque pourquoi ces investisseurs n'étaient pas tenus de s'enregistrer comme des initiés.

Est-ce une solution qui a été envisagée? A-t-on pensé à demander aux investisseurs institutionnels qui détiennent un peu d'argent à s'enregistrer comme des initiés, même s'ils ne s'intéressent pas à la régie interne de la société dans laquelle ils investissent?

Le sénateur Oliver: Il s'agit d'une question intéressante qu'ont soulevée de nombreux témoins.

Permettez-moi de vous donner l'exemple de la société Noranda, où deux grands investisseurs institutionnels ont dit: «Nous n'aimons pas certaines de vos suggestions. Nous voterons contre si vous les proposez à la réunion.»

Il y a une autre chose que nous avons constatée et qui nous a fait très peur. De façon générale, les responsables d'un certain nombre de ces caisses importantes, de quelque 40, 50 ou 60 milliards de dollars, s'arrangent pour avoir un rendez-vous avec le directeur général et le premier vice-président d'une compagnie dont ils détiennent peut-être 7, 8 ou 9 p. 100 des actions. Ils leur disent: «Nous voulons vous rencontrer». Au cours de la rencontre, ils leur disent: «Voici cinq ou six de nos préoccupations». La compagnie répond à son tour: «En réponse à vos préoccupations, voici certaines des choses que nous avons prévues.» Les renseignements qu'ils obtiennent alors sont des informations d'initiés. Ces importants investisseurs institutionnels pourraient alors retourner dans leur organisme et prendre des décisions stratégiques en se basant sur des données que vous et moi en tant qu'investisseurs privés ne connaîtrions pas.

C'est là ma plus grande préoccupation. Je suis d'avis que les investisseurs institutionnels qui participent à ce genre de réunions devraient être considérés comme des initiés et qu'ils devraient être obligés de faire une déclaration à cet effet avant d'acheter ou de vendre quoi que ce soit qui pourrait avoir des conséquences sur mes intérêts à titre d'actionnaire minoritaire insignifiant.

Le sénateur Taylor: Cette idée me plaît.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole, le débat sur cette question sera clos.

Le sénateur Oliver: Honorables sénateurs, le sénateur Meighen aimerait prendre la parole à ce sujet demain. Avec votre permission, j'aimerais ajourner le débat au nom du sénateur Meighen.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

(Sur la motion du sénateur Oliver, au nom du sénateur Meighen, le débat est ajourné.)

(1730)

La revue des politiques sur les armes nucléaires

Motion-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Roche, appuyée par l'honorable sénateur Lavoie-Roux,

Que le Sénat recommande au gouvernement du Canada d'exhorter l'OTAN à entreprendre une revue de ses politiques sur les armes nucléaires lors de la conférence au sommet de l'OTAN qui aura lieu du 23 au 25 avril 1999.-(L'honorable sénateur Roche).

L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, je vais présenter cette motion très brièvement, étant donné qu'elle est très précise. Selon cette motion, le Sénat devrait recommander au gouvernement du Canada d'exhorter l'OTAN à entreprendre une revue de ses politiques sur les armes nucléaires lors de la conférence au sommet de l'OTAN qui aura lieu du 23 au 25 avril 1999. Les honorables sénateurs remarqueront que la motion n'anticipe nullement le résultat de la revue et ne propose aucune mesure précise. Elle dit simplement qu'il devrait y avoir une revue par l'OTAN de ses politiques sur les armes nucléaires.

À la conférence au sommet de l'OTAN, trois documents importants seront déposés: premièrement, un nouveau concept stratégique; deuxièmement, un communiqué présentant le programme politique de l'OTAN; et troisièmement, un énoncé de vision sur le but et la mission futurs de l'OTAN.

Cette grande alliance, j'ose dire la plus grande alliance militaire de tous les temps, est sur le point de célébrer son 50e anniversaire et, au même moment, doit relever de nouveaux défis. La dernière fois que l'OTAN a revu ses politiques sur les armes nucléaires, c'était en 1992. Je rappelle pour mémoire, honorables sénateurs, qu'il y a actuellement 180 armes nucléaires en Europe, qui sont la propriété des États-Unis. Outre au Royaume-Uni, ces armes sont déployées dans six pays membres de l'OTAN non dotés d'armes nucléaires, soit la Belgique, l'Allemagne, la Grèce, l'Italie, les Pays-Bas et la Turquie.

La revue précédente a établi clairement que les attributions du groupe de planification nucléaire de l'OTAN, auquel le Canada a toujours apporté une grande contribution au fil des années, englobent les lignes directrices concernant la planification nucléaire, l'utilisation sélective des armes nucléaires et la réaction à une urgence nucléaire. Les pays qui sont concernés ont un rôle spécial à jouer pour déterminer quelles devraient être les politiques courantes de l'OTAN. En tant que membre important de l'OTAN, le Canada est donc parfaitement justifié d'insister pour faire entreprendre une telle revue. Il serait absurde de dire que la revue pourrait être effectuée en deux jours pendant le déroulement de la conférence au sommet. Ce n'est pas l'objectif visé par la motion.

La motion a plutôt pour objet d'inviter les chefs de gouvernement à décider, lors de la conférence au sommet, d'ordonner une revue qui pourrait peut-être durer plusieurs mois. Qui sait combien de temps elle pourrait prendre?

Honorables sénateurs, la motion est opportune car le gouvernement du Canada est présentement saisi de la question. Je crois savoir que le Cabinet se réunira cette semaine pour établir la politique que le premier ministre défendra à la conférence au sommet de l'OTAN. En établissant ainsi la politique, les membres du Cabinet doivent prendre en considération les nombreux événements qui se sont produits depuis la dernière revue de ses politiques sur les armes nucléaires que l'OTAN a effectuée en 1992. Plus précisément, le Traité de non-prolifération nucléaire a été reconduit indéfiniment en 1995, entraînant la tenue de négociations qui pourraient aboutir à l'élimination éventuelle des armes nucléaires. Un autre fait important a été l'avis consultatif rendu par la Cour internationale de justice, qui stipulait notamment que les dispositions du Traité de non-prolifération nucléaire, et plus spécialement l'article VI exigeant la tenue de négociations, devraient être maintenues.

Par ailleurs, des généraux et des amiraux de premier plan de partout dans le monde ont publié une importante déclaration mettant en doute la valeur des armes nucléaires. Ainsi, sans aucune décision prise à l'avance, il me paraît nécessaire que l'OTAN entreprenne cette revue.

Il y a une semaine environ, nous avons reçu la visite de quatre éminents experts américains du désarmement nucléaire qui ont soutenu à une séance mixte des comités de politique étrangère du Sénat et de la Chambre que l'OTAN devrait prendre cette initiative. Robert McNamara, ancien secrétaire à la Défense des États-Unis, dit que, ces dernières années, on a assisté à une profonde transformation de la pensée des plus grands experts occidentaux en sécurité, tant militaires que civils, au sujet de l'utilité militaire des armes nucléaires, et que ces experts s'opposent de plus en plus à ces armes. Il était accompagné du général George Lee Butler, ancien chef du commandement stratégique des États-Unis, qui nous a rappelé que, s'il recevait confirmation d'une attaque nucléaire imminente, le président des États-Unis aurait 12 minutes pour prendre une décision. Il a ajouté que le sort de l'humanité ne devait pas pendre à un fil aussi ténu, et il a dit aussi que le monde avait échappé à l'holocauste nucléaire pendant la guerre froide grâce à l'intervention divine et à la chance.

Ainsi, avec l'ancien chef de l'unité du contrôle des armes au Département d'État et un représentant de la Fondation Rockefeller, les quatre experts américains ont soutenu devant le comité qu'il fallait prendre des mesures pour atténuer la valeur politique des armes nucléaires.

Dans les cercles politiques, et en tout cas à l'OTAN, le consensus veut que les armes nucléaires aient perdu leur valeur militaire. Personne ne prétend qu'il faut les conserver pour des fins militaires, mais on soutient qu'elles ont une valeur politique. Ainsi, le nouveau concept stratégique de l'OTAN doit comporter un élément portant expressément sur les armes nucléaires. C'est là l'enjeu.

Je conclurai en signalant que le nombre d'armes nucléaires américaines déployées en Europe se situe à son plus bas niveau de l'histoire. Cependant, les Américains sont déterminés à les conserver, à moins d'une révision en profondeur qui permettrait d'évoluer vers une OTAN dénucléarisée.

Comme je l'ai dit, l'OTAN admet que ces armes ne jouent plus un rôle militaire de premier plan. L'alliance est maintenant placée devant un choix important: les armes nucléaires américaines déployées en Europe auront-elles un nouveau rôle et de nouvelles missions comme des opérations offensives contre la prolifération, ou bien seront-elles retirées dans l'intérêt du contrôle des armes nucléaires, sur lequel on insisterait davantage? C'est un problème de taille, et il faut y faire face. La diminution du nombre des armes nucléaires et de leur intérêt militaire dans le contexte de la sécurité européenne laisse les membres européens de l'OTAN sceptiques devant le rôle qu'elles peuvent jouer à l'avenir.

Il y a beaucoup à dire sur le sujet mais, comme la motion a une portée très étroite et demande simplement au gouvernement du Canada d'exhorter l'OTAN à entreprendre un examen de sa politique sur les armes nucléaires, j'estime qu'il s'agit d'une position raisonnable.

(1740)

Je répète, honorables sénateurs, que cette motion est plutôt opportune puisque le Cabinet sera saisi de cette question dans un proche avenir, soit cette semaine. Il est bon que le Sénat se décide à parler et à dire au gouvernement fédéral que, à notre avis, il serait raisonnable et responsable pour le gouvernement, le peuple, le Parlement et le Sénat du Canada d'aller de l'avant sur cette question.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, à prime abord, la promesse de cette solution est au moins louable. Pourquoi ne pas réexaminer à nouveau la politique de l'OTAN en matière d'armes nucléaires, compte tenu surtout de l'expansion récente de l'OTAN pour englober la Pologne, la Hongrie et la République tchèque, en dépit des objections stratégiques apparamment légitimes de la Russie? Pourquoi ne pas mener une étude plus approfondie de l'OTAN au XXIe siècle puisque, comme l'a rappelé le sénateur Roche, l'OTAN célébrera bientôt son 50e anniversaire?

Les sénateurs se rappelleront que la prescription créatrice pour l'expansion de l'OTAN qui avait été formulée tout de suite après l'effondrement de l'Union soviétique et du pacte de Varsovie, en 1989, avait été rejetée par l'OTAN. Cette prescription envisageait une OTAN renouvelée dont le coeur demeurerait intact pendant qu'elle conclurait une série de «Partenariats pour la paix» bilatéraux afin de permettre à chacune des démocraties naissantes de l'Europe de l'Est d'en devenir membre, chacune à son rythme, sans alarmer ni menacer la Russie ni d'autres pays. Au lieu de redéfinir les choses, au lieu de tracer de nouvelles démarcations, les «Partenariats pour la paix» auraient absorbé de façon innovatrice chacun des États européens engagés dans un développement démocratique. Chaque État aurait pu participer à l'OTAN chacun à sa façon et sous un parapluie stratégique différent, laissant l'OTAN libre de parer les menaces sans causer de nouvelles divisions ni s'affaiblir, le tout se produisant à un rythme étudié et acceptable au lieu de provoquer une nouvelle course aux armes classiques ou d'amener la Russie à mettre fin à ses pourparlers de réduction des armes nucléaires à START II.

Les «Partenariats pour la paix» envisageaient une conversion des armes classiques en fonction de la capacité économique de chaque État. L'expansion de l'OTAN aurait inversé le résultat, d'après le général Butler. Le général Butler, l'ancien chef du Strategic Nuclear Planning Group du Pentagone, a témoigné à Ottawa, il y a deux semaines, que l'expansion de l'OTAN est peut-être la décision stratégique la plus catastrophique à avoir été prise depuis la Seconde Guerre mondiale. Il n'en reste pas moins que cette course à l'expansion menée par les États-Unis et l'Allemagne est désormais un fait accompli.

Que faisons-nous maintenant? Je prie les sénateurs de nous excuser si certains d'entre nous au Sénat sont sceptiques quant à un autre examen de l'OTAN et aux décisions prises à la va-vite à l'autre endroit sans examen stratégique sérieux et délibéré des objectifs et de la capacité de l'OTAN et du Canada.

Certains partisans de cette résolution ont peut-être en tête des objectifs différents des miens. D'aucuns, comme certains de nos collègues de l'autre endroit, voudraient inciter l'OTAN à détruire unilatéralement les armes nucléaires stratégiques, à mettre les armes nucléaires hors alerte et à abandonner la notion de «première frappe» dans la stratégie de la défense, sans un examen complet des nouveaux risques qui planent sur la paix mondiale.

Le créateur de la notion de destruction mutuelle assurée, nouvellement converti au «moralisme», le secrétaire Robert MacNamara, et ses collègues qui pensent comme lui, le général Butler et l'ambassadeur Graham, tous spécialistes des questions nucléaires, incitent les membres de l'OTAN et les parlementaires canadiens à le faire. Cette résolution vise à préparer un débat du Cabinet qui se tiendra cette semaine sur la question d'un examen de l'OTAN.

J'hésitais à appuyer cette résolution sans un examen stratégique de ces questions par le Sénat. Il est possible que nous puissions le faire par suite de l'ordre de renvoi adressé la semaine dernière au comité sénatorial permanent des affaires étrangères en vue d'examiner l'OTAN. D'une certaine façon, cette résolution met la charrue avant les boeufs. Néanmoins, nous devons aller de l'avant, selon le sénateur Roche, avant que le Cabinet délibère. Quel genre de débat cela peut-il être, alors?

Honorables sénateurs, j'ai bon espoir qu'un examen de l'OTAN suscitera un débat non seulement au Canada, mais aussi aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en France et, bien entendu, en Russie, autant d'États qui ont tous des opinions différentes, sinon divergentes, sur le rôle de l'OTAN au XXIe siècle. En quoi le Sénat devrait-il renseigner le gouvernement sur l'OTAN? Il est à espérer que nos recommandations ne tomberont pas dans l'oreille d'un sourd ou, pire encore, dans celle de quelqu'un qui n'est pas intéressé. Bref, quelle devrait être la position du Canada? Le secrétaire MacNamara et le général Butler nous exhortent à adopter une position «morale» à l'égard des questions nucléaires.

Après la crise des missiles cubains de 1962, Robert Kennedy a posé la question suivante:

Quelles circonstances ou justifications, s'il en est, autorisent [...] moralement tout gouvernement à exposer sa population, voire toutes les populations du monde, à la menace d'une destruction nucléaire?

Cela évoque la question fondamentale de la politique étrangère. Devrait-on évaluer et jauger les États en fonction de principes de moralité personnelle? D'ailleurs, la notion de moralité est-elle la même entre les États qu'entre les individus?

Reinhold Niebuhr, un ami de notre collègue le sénateur Stewart, a formulé des hypothèses sur la confusion entre les différents types de moralité, il y a plus d'un demi-siècle, dans son ouvrage intitulé: Moral Man in Immoral Society. L'auteur écrit que, pour l'individu, l'altruisme doit demeurer le critère de la parfaite moralité. Pourtant, Niebuhr poursuit en expliquant que les États ne peuvent être sacrifiés. Les gouvernements n'ont pas la latitude dont disposent les individus. Par nécessité, ils sont des mandataires et non pas des mandants. Ils agissent à titre de fiduciaires, de mandataires du bonheur et de l'intérêt des autres. Niebuhr a cité l'argument de Hugh Cecil. Cecil disait que l'altruisme est une réaction inacceptable d'un État et que nul n'a le droit d'être altruiste lorsque les intérêts des autres sont en cause.

Le devoir d'autopréservation vient en contradiction avec le devoir personnel de sacrifice. Par conséquent, dans le chapitre sur l'intérêt national et les absolus moraux de son ouvrage intitulé: Cycles of American History, Arthur Schlesinger a souligné qu'en raison de cette dichotomie, il est impossible d'évaluer l'action des États en fonction d'une moralité individualiste. Il cite ensuite Winston Churchill, qui a dit que le sermon sur la montagne était le dernier mot de l'éthique chrétienne. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas en fonction de ces critères que les ministres assument leur responsabilité qui consiste à guider les États. Par conséquent, honorables sénateurs, si les saints peuvent être purs, les hommes d'État doivent être responsables.

En ne faisant appel qu'à des intérêts personnels étroits, l'État risque de perdre le pouvoir de persuasion qu'il détient auprès de ses citoyens. En règle générale, les principes et les valeurs ne doivent pas trop s'éloigner des intérêts nationaux. Malheureusement, il arrive beaucoup trop souvent que les intérêts nationaux soient subjectifs, ambigus et presque trop souples. Il en résulte de la confusion plutôt de la clarté. Bref, les intérêts nationaux ne peuvent se substituer entièrement à la moralité internationale.

Selon A.J.P. Taylor, «une politique étrangère démocratique doit être idéaliste; ou, à tout le moins, elle doit être justifiée sur le plan des grands principes généraux». Des observateurs soutiennent que la moralité transparaît le mieux dans ce qu'une nation déploie et investit au nom de sa notion de l'intérêt national.

Nombreux sont ceux qui ont soutenu que la politique internationale doit être au moins un vague reflet de la moralité que l'on adopte chez soi. Il faut faire ses preuves chez soi avant d'être en mesure de prêcher la bonne parole à l'étranger. Il va de soi que certaines questions internationales de moralité sont si tranchées, notamment en ce qui concerne l'esclavage, le génocide, la torture et les atrocités, qu'elles transcendent les intérêts nationaux étroits d'un État. Ces problèmes menacent de détruire le tissu de l'humanité, ce qui nous amène à la question de la stratégie nucléaire et de la menace des armes nucléaires en temps de guerre.

Si les années 30 nous ont appris quelque chose, c'est que la renonciation unilatérale aux armes est un piège et une illusion. Nous ne pouvons pas nous offrir le luxe d'être moraux dans un monde immoral sans avoir à notre disposition des moyens de dissuasion.

Le maître mot, ici, c'est dissuasion. L'analyse capitale, c'est la prédiction du risque qui permet de recourir à la dissuasion pour éliminer ce risque. Dissuader, faire barrage à la menace de réaction incontrôlable, c'est préserver la paix. Nous avons découvert cela récemment, à notre grand étonnement, après les essais nucléaires soudains de l'Inde et du Pakistan. Les commentateurs des deux côtés ont déclaré que l'évidence de l'existence d'un arsenal nucléaire dans chaque camp pourrait bien conduire à l'instauration d'une paix fragile entre ces deux nations guerrières.

Quant aux nouveaux risques, le premier ministre russe Yevgeny Primakov, qui est rentré subitement en Russie aujourd'hui alors qu'il se rendait à Washington, a répliqué à l'expansion de l'OTAN en faisant de la Russie, de la Chine et de l'Inde un nouveau triangle stratégique devant faire contrepoids aux États-Unis, dont on craint l'hégémonie croissante en Europe et ailleurs dans le monde. La Chine, qui possède la plus grosse armée permanente au monde, est en train de se doter rapidement de la technologie nécessaire pour lancer des missiles à longue et à moyenne portée, y compris des ogives nucléaires légères, qui, dit-on, auraient été volées aux États-Unis. Un missile qu'aurait lancé la Corée du Nord l'an dernier a réveillé le Japon.

Dans un ouvrage récent publié sous la direction de Richard Falkenrath, America's Achilles' Heel: Nuclear, Biological and Chemical Terrorism and Covert Attack, on lit ceci:

(1750)

Les armes nucléaires sont à la portée de dix États dont la plus sérieuse contrainte est la capacité de produire du plutonium ou de l'uranium très enrichi. Si cet obstacle était surmonté par le vol ou l'achat de matières fissiles, presque n'importe quel État doté d'une infrastructure technique et industrielle raisonnable pourrait fabriquer une arme nucléaire à tout le moins rudimentaire...

... tout comme le pourraient...

... des acteurs autres que des États qui seraient exceptionnellement aptes.

Face au médiocre état de préparation des États-Unis et à l'instabilité de la Russie en 1996, le Sénat américain a présenté une excellente mesure, intitulée: «Defence Against Weapons of Mass Destruction Act», qui vise à atténuer la probabilité d'actes de terrorisme international et à exercer un meilleur contrôle sur les matières fissiles en aidant les Russes à faire de même pour les leurs et les autres composantes instables de leurs programmes d'armes nucléaires.

Ce sont là des questions essentielles qui exigent une réflexion et une étude attentive. Ce sont là des risques nouveaux, complexes et difficiles à contrôler.

Quand est-on justifié de déployer de telles armes? Lorsque la sécurité d'un État est dangereusement menacée, quelle justification peut-on avancer pour agir à l'encontre de la vogue actuelle des notions théoriques de la primauté du droit? La théorie de la «guerre juste» a été légitimée dans la doctrine chrétienne par le grand moraliste et philosophe saint Augustin, qui a dit: Salus populi, suprema lex est. Dans le journal de Thomas Merton intitulé: Go Run To The Montain, rédigé en 1939-1941, on peut lire ce passage:

Si vous justifiez les guerres de défense, si vous justifiez les guerres qui sont censées rétablir «la paix le plus rapidement et le plus efficacement possible», alors il vous faut accepter les armes et les tactiques les plus drastiques, les plus bestiales et les plus horribles et dégoûtantes que vous puissiez imaginer puisqu'elles sont toutes nécessaires à la défense.

Or, la primauté du droit, la règle de la moralité dans les affaires internationales demeurent un objectif vital, quelque insaisissable soit-il. Dans toute revue de l'OTAN, il faut donc veiller à inscrire la primauté du droit au coeur même de cette politique. C'est le chaos assuré si on permet à chaque État de se faire justice dans le domaine international. Toute revue doit donc donner lieu à l'élaboration d'une politique qui associe nos intérêts nationaux à la primauté du droit international.

Cela entraîne toutefois une autre question fondamentale. Pour que nos intérêts et nos valeurs légitimes soient reconnus, nous devons aussi reconnaître réciproquement que les autres pays ont droit à la reconnaissance de leurs intérêts et valeurs légitimes.

Jeudi dernier, cependant, les commandants de l'OTAN ont été autorisés à bombarder cette récalcitrante République de Yougoslavie. La légitimité de l'OTAN peut être en danger à l'heure où l'on se parle. Cette menace d'un bombardement de l'OTAN vise à faciliter l'application d'un «plan de paix» qui exige que les forces de l'OTAN soient déployées en Yougoslavie. L'ONU n'a pas approuvé cette attaque, contrairement à la Bosnie, où l'ONU a sanctionné cette mesure. Pourtant, le Canada fait partie de l'armada internationale, au sol et dans les airs. Où commence la règle de droit et où se termine-t-elle, aujourd'hui, et en Yougoslavie?

Honorables sénateurs, il y a 100 ans avait lieu la première conférence internationale sur les règles de la guerre à l'ère moderne. Cela se tenait à La Haye en 1899. Cette conférence visait à l'adoption de conditions plus humaines, même dans le cadre des horreurs de la guerre, pour le traitement des prisonniers et des populations civiles. Malheureusement, les atrocités qui ont mené à cette conférence de La Haye, en 1899, se voient encore 100 ans plus tard en Croatie, en Bosnie, au Kosovo et ailleurs dans le monde, et cela se passe devant nos yeux, en couleurs, en direct à la télévision. Le développement de l'Occident, entre Platon et l'OTAN, a suivi un cheminement assez chaotique. C'est peut-être encore un chemin sinueux et cahoteux que nous devons suivre, avec une intuition et un sens de la diplomatie aigus et avec toute la vigilance possible.

Par conséquent, honorables sénateurs, c'est avec une certaine hésitation et avec beaucoup de réticence que j'appuie cette résolution inspirée par notre collègue le sénateur Roche. Il ne faudrait pas confondre similarité de vues et consensus.

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je propose l'ajournement du débat.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Il pourrait y avoir un accord entre tous les sénateurs. Le Sénat pourrait se prononcer. J'ai beaucoup hésité à prendre la parole au sujet de cette motion. J'ai étudié ce sujet au comité des affaires extérieures et de la défense nationale. Le hasard veut qu'un des plus éminents députés de ce comité à ce moment-là était M. Roche, aujourd'hui sénateur. Un autre sénateur très actif, M. Forrestall, à l'époque député, était aussi membre du comité des affaires extérieures et de la défense nationale sur les questions de sécurité. Si l'on ne prend pas une décision d'ici 18 heures, cette motion sera ajournée. Comme l'a souligné le sénateur Roche, le Cabinet du gouvernement du Canada, notre gouvernement collectif, devra très bientôt se pencher sur cette question. La réunion aura lieu en avril de cette année. Je vais prendre un risque calculé.

[Traduction]

C'est un risque calculé. Je ne lirai pas mon discours en faveur de cette motion. J'invite tous les sénateurs à se joindre à l'appel lancé par le sénateur Grafstein à ce sujet - au moins, il semble être d'accord. Je demande que l'on appuie cette résolution avant 18 heures. Nous avons un programme chargé. Nous n'avons pas accompli grand-chose aujourd'hui. Il semble que ce soit d'accord. Je serai déçu si d'autres députés ne prennent pas la parole, car je n'aurai pas le temps de prononcer le discours que j'avais préparé. Je prends le risque.

J'appuie cette motion. Inutile de s'agiter, il s'agit seulement d'une motion. Cela ne veut pas dire que nous voulons transformer l'OTAN. Nous ne voulons pas complètement transformer l'OTAN. C'est seulement un pas dans la bonne direction, mais qui ne va pas plus loin que ce qui est dit dans la résolution. S'ils la relisent, j'espère que les honorables sénateurs l'adopteront à l'unanimité. J'appuie cette motion. Je n'irai pas plus loin.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion du sénateur Spivak qui propose d'ajourner le débat?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Prud'homme: Avec dissidence.

(Sur la motion du sénateur Spivak, le débat est ajourné avec dissidence.)

[Français]

Son Honneur le Président: Aucun article n'est à l'ordre du jour présentement. L'article à l'ordre du jour inscrit au nom du sénateur Carstairs a été reporté.

Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, le Règlement dit que l'on doit ajourner à l8 heures. Le sénateur Carstairs suggère de prolonger le débat. Cette motion peut être débattue. Je ne veux pas croire que l'on ne puisse pas dire un mot là-dessus. Un article de l'ordre du jour a été appelé.

Son Honneur le Président: Non, c'est inexact. À 18 heures, je n'ai pas le choix. Selon le Règlement, je dois me lèver et dire que je quitte le fauteuil pour revenir à 20 heures, à moins qu'il n'y ait consentement unanime. Il est maintenant 18 heures.

[Traduction]

(1800)

Je pose la question aux honorables sénateurs: y a-t-il consentement unanime à ne pas voir l'heure?

Des voix: D'accord.

La défense nationale

Le débat concernant l'envoi de troupes à l'étranger-Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Forrestall, attirant l'attention du Sénat sur le débat public concernant l'envoi de militaires canadiens au Kosovo.-(L'honorable sénateur Carstairs).

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, compte tenu des événements dans cette région du monde, des événements qui pourraient supposer l'envoi de militaires canadiens, il est temps que nous accordions un peu de réflexion à cette question ce soir.

Honorables sénateurs, la participation du Canada et de ses alliés de l'OTAN au conflit qui fait rage au Kosovo exige des Canadiens non seulement qu'ils contribuent à l'effort militaire, mais aussi, et ceci est encore plus important, qu'ils présentent des idées et des politiques novatrices susceptibles de faciliter l'instauration de la paix dans les Balkans. Le gouvernement du Canada devrait user de tous les moyens à sa disposition, y compris son siège au Conseil de sécurité des Nations Unies, pour proposer une thérapeutique politique inédite propre à atténuer le conflit entre les Serbes et les Albanais du Kosovo et à permettre de faire un pronostic encourageant à l'égard des chances d'instaurer une paix et une démocratie durables dans cette partie du monde.

Le Canada devrait proposer une nouvelle stratégie, car selon les canons conventionnels, les objectifs politiques des Serbes et ceux des Albanais du Kosovo sont en soi totalement inconciliables. Les Serbes invoquent le principe de l'intégrité territoriale de leur État, alors que les Albanais du Kosovo font valoir celui du droit des peuples à l'autodétermination, y compris le droit à la sécession.

Conformément au paradigme habituel, les Albanais du Kosovo aspirent à la pleine indépendance politique et économique, alors que les autorités serbes cherchent à imposer la centralisation constitutionnelle et politique. La situation politique actuelle étant ce qu'elle est, il n'est pas dans l'intérêt des Albanais du Kosovo de coopérer avec les autorités serbes parce que, soutiennent-ils, ils ne pourront accéder à la pleine autonomie sous le contrôle des Serbes. En effet, ils craignent que s'ils coopèrent avec le gouvernement serbe, la communauté internationale ne cesse de soutenir l'autonomie du Kosovo.

D'un autre côté, l'intervention armée par l'OTAN contre les Serbes encourage les Kosovars cherchant à faire sécession, ce qui, bien entendu, élimine tout désir de coopérer avec les Serbes. Aux termes de ce même modèle traditionnel, les Serbes se trouvent dans la même position. S'ils ne défendent pas leur intégrité territoriale, même confrontés à une action militaire internationale, ils craignent que la communauté internationale n'interprète cela comme la dissolution interne de leur État.

En d'autres mots, aux termes de l'ancienne analyse, chaque participant à la crise du Kosovo s'attend à recevoir un appui. Les Albanais du Kosovo veulent obtenir l'appui international au principe de l'autodétermination et le gouvernement serbe veut qu'on appuie le principe de la non-intervention dans les affaires internes d'un État et du respect de l'intégrité territoriale d'un État. Étant donné qu'aucun des participants à cette crise ne peut prévoir lequel des deux principes la communauté internationale décidera de respecter, cela ne fait qu'accroître d'office la méfiance des Kosovars et des Serbes.

Honorables sénateurs, un nouveau modèle dissocierait le principe de l'autodétermination des peuples et le principe de l'intégrité territoriale des États. On partirait du point de vue qu'aucun de ces deux principes n'est fondamental, et que le principe de la protection et de la promotion des droits humains doit plutôt primer. La lutte pour l'autodétermination de la part des Albanais du Kosovo et la lutte pour l'intégrité territoriale de la part des Serbes doit être subordonnée à la protection et à la promotion des droits humains. Aux termes de cette nouvelle approche, il y a une nouvelle relation juridique créative entre les principes, la communauté internationale évaluant alors les politiques et les actions de chaque participant au conflit en fonction du respect des droits humains.

Aux termes de ce type de modèle, on permettra l'autonomie des Albanais du Kosovo si le gouvernement central de Serbie ne respecte pas les droits humains, la paix et le développement. De même, les Albanais du Kosovo cherchant à obtenir le droit à l'autodétermination ne doivent pas utiliser la force ni violer les droits humains car autrement, la communauté internationale appuiera les actions du gouvernement central et défendra l'intégrité territoriale de la Serbie et de la Yougoslavie en opposition au souhait des Kosovars de faire sécession.

Avec une telle approche, l'évolution des droits humains entraîne un concours entre les parties au conflit pour se comporter beaucoup mieux. Il s'agit de faire passer les parties d'une question territoriale à une question de démocratisation interne et de droits humains. Si le gouvernement serbe veut préserver l'intégrité territoriale de son État, il élaborera le programme approprié pour la promotion et la protection des droits humains, de la paix et de la démocratisation. Cela encouragera les Albanais du Kosovo qui cherchent à obtenir l'autodétermination à améliorer leur bilan en matière de droits humains, de paix et de développement dans l'espoir de parvenir à l'autonomie.

Le gouvernement canadien devrait songer sérieusement à parrainer une résolution, au Conseil de sécurité des Nations Unies, demandant le rétablissement de la position constitutionnelle du Kosovo, conformément à la Constitution yougoslave de 1974. Une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies parrainée par le Canada permettrait aux Albanais du Kosovo de regagner leur autonomie locale à l'aide d'une assemblée législative, d'un gouvernement et d'une police locale de type provincial. Cette résolution insisterait sur l'objectif de la promotion des droits de la personne et rendrait également les Albanais du Kosovo responsables de la promotion et de la protection des droits de la personne et de la paix au Kosovo.

Si les autorités serbes et yougoslaves n'acceptaient pas cette résolution parrainée par le Canada et ne rétablissaient pas la position constitutionnelle et politique du Kosovo, le Conseil de sécurité demanderait alors à la communauté internationale de reconnaître le Kosovo comme un État indépendant.

(1810)

Devant la ferme position du Conseil de sécurité des Nations Unies, reposant sur un nouveau premier principe, soit le principe de la promotion des droits de la personne, les autorités serbes opteraient pour la décentralisation interne afin de préserver l'intégrité de leur territoire.

Honorables sénateurs, un mouvement vers cette décentralisation interne, constitutionnelle et politique est la solution pour régler la crise au Kosovo. Par une décentralisation, la communauté internationale ouvrirait la porte à la démocratisation interne et à la promotion des droits de la personne.

La situation actuelle exige de pays comme le Canada qu'ils fassent preuve d'un leadership innovateur. Si le Canada assurait ce leadership au Conseil de sécurité en demandant le rétablissement de la position constitutionnelle et politique du Kosovo, conformément à la Constitution yougoslave de 1974, la communauté internationale pourrait réagir en levant, par exemple, les sanctions et en facilitant la réintégration de la Yougoslavie dans la communauté des nations.

Le Canada devrait encourager les Albanais du Kosovo à proposer au gouvernement central yougoslave et serbe d'adopter le modèle d'assemblée législative provinciale afin de protéger et de promouvoir les droits de la personne, ce qui constitue d'ailleurs l'objectif principal. On doit toutefois encourager les autorités serbes à adopter un modèle de gouvernement qui assure la plus grande protection possible ainsi que la promotion des droits de la personne dans les limites du territoire visé. Grâce à cet échange, le Canada ferait passer le débat d'une question territoriale à une question de développement, de droits de la personne et de paix pour tous.

En modifiant ce paradigme, la communauté internationale pourrait favoriser un changement au niveau de la plus ancienne des mentalités de la loi internationale qui a toujours eu pour effet, et qui continue encore aujourd'hui, de maintenir la situation de conflit. Dans cette nouvelle optique, la communauté internationale pourrait en arriver à réduire les conflits inhérents entre les Serbes et les Albanais du Kosovo.

Les objectifs en matière de droits de la personne doivent devenir les principes fondamentaux du droit international. Ils doivent remplacer les deux principes opposés du droit international, c'est-à-dire les principes de l'intégrité territoriale et de l'autodétermination. Cela rendrait le combat actuel moins irréconciliable.

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le débat est ajourné.)

Affaires étrangères

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, si je comprends bien, le comité sénatorial permanent des affaires étrangères attend depuis un certain de pouvoir siéger et entendre quelques témoins. Serait-il possible que le comité des affaires étrangères soit autorisé à siéger en même temps que le Sénat?

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Les armes nucléaires

La réponse du gouvernement aux demandes et recommandations-Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Roche, attirant l'attention du Sénat sur l'urgence pour le gouvernement du Canada de dire non à la participation à un système de défense antimissiles américain et sur la nécessité pour le gouvernement du Canada de contribuer à la paix en mettant en oeuvre les 15 recommandations du rapport du comité permanent des affaires étrangères et du commerce international intitulé: «Le Canada et le défi nucléaire: réduire l'importance politique de l'arme nucléaire au XXIe siècle».-(L'honorable Marcel Prud'homme, c.p.).

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, j'aimerais vous signaler que plus tôt, j'aurais pu m'opposer au consentement unanime pour oublier l'heure et que la Chambre aurait ajourné.

[Traduction]

Encore une fois, je rappelle qu'un jour, certains d'entre nous empêcheront les travaux du Sénat. Certains sénateurs ne semblent pas comprendre les règles. Plus tôt, j'ai laissé faire. Cette fois, je peux intervenir. Mon discours est prêt. Cependant, je proposerai de nouveau l'ajournement en mon nom pour manifester un esprit de collaboration après cinq ans. Les motions parrainées par des sénateurs indépendants sont vraisemblablement destinées à mourir au Feuilleton, au train où vont les choses.

Son Honneur le Président: Il est proposé par le sénateur Prud'homme, appuyé par le sénateur Carstairs, que le débat soit reporté au nom du sénateur Prud'homme.

Honorables sénateurs, je précise que, comme le sénateur Prud'homme a prononcé quelques mots, le débat a commencé en son nom. Par conséquent, un autre sénateur ne peut intervenir dans le débat comme dans le cas d'un ajournement. Il a entamé le débat et il le poursuivra. Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(Sur la motion du sénateur Prud'homme, le débat est ajourné.)

Le Soudan

Interpellation

L'honorable sénateur Lois M. Wilson, ayant donné avis le 16 mars 1999:

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur la situation au Soudan.

- Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur la situation qui règne au Soudan, pays qui s'embourbe dans une guerre civile prolongée depuis son accession à l'indépendance en 1956. Cette guerre a tué plus de civils que les conflits du Kosovo, de la Bosnie et du Rwanda réunis et pourtant, la communauté internationale ne lui accorde pas une attention proportionnée à l'énormité de la souffrance humaine. Est-ce à cause de la fatigue que ressent la communauté internationale face à l'aide à offrir et au conflit? Est-ce parce qu'il s'agit d'un pays africain? Est-ce parce que le monde connaît encore mal les riches dépôts de pétrole et de cuivre qui se trouvent au Soudan? Il se peut que le Canadien ordinaire ignore au juste où est le Soudan, mais c'est pourtant l'un des pays au monde où actuellement l'on bafoue le plus les droits de la personne - esclavagisme, famine forcée, viols, déplacements de personnes et emprisonnements arbitraires.

Un regain de conflit a commencé en 1983 lorsque le président a déclaré son intention d'islamiser le Soudan avec l'introduction de la sharia. La situation s'est compliquée davantage après qu'un coup d'État eut porté au pouvoir le Front national islamique, le FNI, qui s'est lancé dans une politique d'islamisation et d'arabisation cherchant à imposer par la force l'orientation idéologique du gouvernement. «Génocide» et «purification ethnique» sont des expressions utilisées par des organismes internationaux crédibles pour décrire ce qui se passe au Soudan. Toutes les langues ethniques, par exemple, doivent être remplacées par l'arabe, et toutes les religions par l'islam. Certains observateurs craignent de parler d'islamisation de crainte d'être accusés d'insulter l'islam. Le gouvernement cherche également à exporter son idéologie, comme lorsque le régime a été impliqué, par exemple, dans les tentatives d'assassinat du président Moubarak d'Égypte et du président Isaias d'Érythrée.

On décrit trop souvent la guerre en disant qu'elle oppose les musulmans aux chrétiens, les Arabes aux Africains ou les nordistes aux sudistes. La réalité est beaucoup plus ambiguë. Il y a des chrétiens et des musulmans des deux côtés, et des Arabes et des Africains des deux côtés. La résistance armée à ce qui est perçu comme la domination économique, religieuse et politique du Nord a été dirigée par l'Armée populaire de libération du Soudan, l'APLS et, plus récemment, par les Forces de l'Alliance soudanaise, les FAS. Une alliance stratégique entre les partis d'opposition du Nord et l'APLS et les FAS sous l'égide de l'Alliance nationale démocratique a renforcé l'opposition au gouvernement. Il s'agit également d'un conflit régional - l'Érythrée, l'Éthiopie et l'Ouganda se sont tous considérés victimes d'agressions lancées par Khartoum. Enfin, l'Égypte a un enjeu important à propos du Nil et du partage des ressources en eau.

Le nombre de victimes est horrible, mais largement inconnu. La guerre civile a déjà causé 1,5 million de décès, selon l'organisation OXFAM du Royaume-Uni. Selon d'autres sources, le nombre de décès serait encore plus élevé. Plus de 1,9 million d'habitants des montagnes du Soudan et de la Nubie ont péri depuis le début des hostilités en 1983. L'immense majorité des victimes ne sont pas des rebelles, mais des civils qui ne partagent pas l'idéologie islamique radicale du régime.

La famine de 1998 a frappé 2,6 millions de personnes, selon les estimations, ce qui a entraîné la plus importante opération de secours de l'histoire des Nations Unies. La famine et la sous-alimentation sont utilisées comme des armes de guerre stratégiques. Les corridors servant à l'acheminement de l'aide humanitaire sont constamment fermés.

Plus de la moitié des habitants du sud du Soudan ont été forcés de quitter leur foyer et de se joindre aux 2 millions de personnes déplacées vivant dans les secteurs des squatters de Khartoum. Les effets secondaires sont prévisibles: pauvreté, malnutrition et rareté de l'eau propre, ce qui accroît la vulnérabilité de la population à la maladie. Les quotas d'eau du Nil du Soudan pourraient devoir être répartis entre le Nord et le Sud, avec les répercussions régionales que cela comporte, la bataille du Soudan portant en partie sur l'eau.

Le système d'éducation est complètement désorganisé et une génération complète de Soudanais risque d'être perdue, faute d'avoir pu s'instruire suffisamment. On estime que le taux d'analphabétisme dans le Sud est de 90 p. 100 chez les femmes, de 80 p. 100 chez les hommes, et de 40 p. 100 chez les habitants du Nord.

L'absence de liberté de déplacement a perturbé les activités habituelles de l'agriculture et de la production alimentaire, maintenant ainsi le cycle de la famine. Au lieu de s'occuper des diverses cultures, les hommes et les femmes ont passé leur temps à manier des fusils pour protéger leur famille.

(1820)

Depuis 1993, le rapporteur spécial des Nations Unies au Soudan a produit cinq rapports à l'intention de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies et deux à l'intention de l'Assemblée générale pour présenter des preuves de fond sur les violations des droits de la personne, y compris le bombardement aveugle des populations civiles, les déplacements forcés de populations, les disparitions et la torture. Les rapports indiquent que la majeure partie de ces violations ont été commises par le gouvernement du Soudan. Le rapporteur a finalement démissionné parce qu'il avait l'impression qu'il ne servait à rien.

La principale intervention de la communauté internationale a pris la forme d'une aide humanitaire et d'urgence plutôt que d'une médiation politique visant à trouver une solution pacifique au conflit. Le programme d'aide humanitaire, le plus gros de toute l'histoire des Nations Unies, coûte un million de dollars par jour et les pays donateurs commencent à montrer des signes de lassitude. Combien de temps encore sont-ils prêts à fournir cette aide? Les couloirs servant au transport de l'aide humanitaire sont souvent bloqués, particulièrement ceux qui conduisent aux tribus du Sud du pays et dans les monts Nuba, où la lutte pour l'autodétermination s'ajoute à la lutte de l'Armée populaire de libération du Soudan, au Sud.

En 1992, Khartoum a imposé un blocus, refusant l'accès des monts Nuba aux véhicules d'Operation Lifeline Sudan. Khartoum a lancé une offensive pour couper l'approvisionnement des Nubas et étouffer la rébellion contre l'islamisation. Beaucoup de Nubas sont musulmans et le gouvernement craint que leur mouvement de rébellion donne l'exemple à d'autres régions marginalisées du Nord. La nourriture sert comme arme dans ce conflit.

La participation du Canada s'articule autour de l'aide humanitaire, des violations des droits de la personne, de l'appui au processus de paix de l'Autorité intergouvernementale de développement (IGAD) et de la crainte d'une déstabilisation de la région. La seule chose qui pourrait vraiment alléger les souffrances du peuple soudanais, c'est la fin de la guerre. À cet égard, j'ai eu le privilège de participer à une réunion internationale tenue en Norvège le 10 mars 1999 sous la présidence conjointe de la Norvège et de l'Italie. Le Forum des partenaires de l'IGAD a élaboré des plans pour reconduire le cessez-le-feu humanitaire qui doit se terminer le 15 avril prochain et mettre en place un mécanisme de surveillance visant à instaurer un climat plus constructif pour les négociations entre les deux parties. En dépit du cessez-le-feu actuel, les bombardements aériens continuent, selon le dernier rapport du Conseil oecuménique des Églises. Si on parvenait à étendre le cessez-le-feu au moment prévu pour l'intensification des négociations, on pourrait bien parvenir à l'adoption d'un plan de paix global.

On a dit craindre qu'il soit difficile de maintenir le niveau actuel d'aide humanitaire consentie au Soudan par les pays donateurs en l'absence de l'adoption d'un processus politique accéléré et renforcé de recherche de la paix. Sous l'égide de l'Autorité intergouvernementale de développement (IGAD), les participants à la consultation ont fait fond sur le cadre d'une solution pacifique à la guerre au Soudan énoncé dans la Déclaration de principes de 1994, à laquelle ont souscrit le gouvernement du Soudan et l'APLS. Selon cette déclaration, une solution militaire ne peut mener à une paix durable et à la stabilité dans le pays; les parties doivent avoir pour objectif commun de trouver une solution juste; les gens du Sud ont le droit à l'autodétermination et à la reconnaissance en août 1998 et le droit à l'autodétermination sera fonction des frontières existantes au 1er janvier 1956; la culture ethnique et multiraciale du Soudan ainsi que sa nature religieuse doivent être reconnus; la liberté de religion et de pratique religieuse doit être garantie; les questions de droits de la personne et d'indépendance du secteur judiciaire doivent être enchâssées dans la Constitution. Le problème en est un de mise en oeuvre.

À la réunion d'Oslo, on a convenu de saisir l'occasion perçue qui se présentait à l'époque, le gouvernement s'étant déclaré disposé à permettre au Sud de faire sécession. Cette déclaration est cependant tempérée par l'intransigeance dont le gouvernement fait preuve dans ses rapports avec les habitants des monts Nuba. Les participants à la réunion, y compris le Canada, ont encouragé la nomination par le président kenyan de l'IGAD d'un envoyé spécial pour le processus de paix au Soudan afin de susciter un effort de médiation concerté et continu au cours des prochains mois. Le soutien serait assuré par un petit groupe de préposés dévoués. Le secrétariat devrait, espère-t-on, amorcer ses activités le 1er mai 1999 et entreprendre des efforts de médiation à temps plein en partant du principe que la négociation d'un cessez-le-feu est indispensable à la résolution des autres problèmes. Les pays qui ont participé à la réunion d'Oslo ont accepté de soutenir financièrement cette initiative. Le temps revêt une importance primordiale.

De plus, le Forum des partenaires s'est dit prêt à appuyer différentes mesures destinées à favoriser un règlement pacifique, notamment la reconstruction, la démobilisation, le rapatriement des réfugiés, la réadaptation des enfants affectés par le conflit, des évaluations socioéconomiques, particulièrement dans la mesure où elles ont trait à des groupes vulnérables, et la reconstruction de la société civile. Il a été convenu de mettre sur pied un groupe de travail chargé de coordonner les mesures incitatives internationales pour la paix et de planifier le soutien du processus de mise en oeuvre de l'accord de paix.

Un certain nombre de questions préoccupent le Canada. Il y a tout d'abord la nécessité d'étendre le processus de paix par le biais d'un processus parallèle et complémentaire, de manière à ce que les civils, aussi bien ceux du Sud que ceux du Nord, soient beaucoup plus représentés. Il y a ensuite la nécessité de rétablir la confiance entre les parties en guerre. Le médiateur doit envisager des mesures pour rétablir la confiance. Trouver des moyens de faciliter la réadaptation des enfants touchés par la guerre, dans les secteurs où le conflit sévit, pourrait contribuer à établir des ponts entre les parties et les habitants du Soudan.

Il y a un autre problème qui inquiète de plus en plus le Canada et qui reste sans solution. Il s'agit de la présence d'une entreprise canadienne au Soudan. La société Talisman Energy Incorporated, qui a son siège social à Calgary, est l'une des plus importantes entreprises canadiennes de prospection et de production d'hydrocarbures à être inscrite à la bourse de New York et à celle de Toronto. Elle est propriétaire de 25 p. 100 de la Great Nile Petroleum Operating Company, un consortium qui participe à des projets d'exploitation pétrolière et d'aménagement d'oléoduc dans le sud du Soudan. Les autres partenaires du consortium sont la Chine, la Malaisie et Sudapet, la société pétrolière nationale du Soudan. La société Arakis Energy Corporation, qui appartient maintenant en totalité à la Talisman, a révélé qu'elle avait extrait 10 000 barils de pétrole par jour depuis juin 1996 et qu'elle s'attendait à accroître sa production d'ici juin 1999, lorsque que l'oléoduc assurant le transport jusqu'à Port-Soudan sera terminé. Selon des allégations graves, l'entreprise enverrait le pétrole brut à une raffinerie qui est une importante base militaire régionale du gouvernement soudanais et un point de relais pour les opérations militaires dans les monts Nuba et dans le Sud du Soudan, alimentant ainsi la guerre civile.

L'image du Canada est désormais une source de préoccupation. Voulons-nous vraiment que des entreprises canadiennes soient en exploitation à deux pas de l'endroit où, selon l'UNICEF, l'esclavage est activement pratiqué? Le gouvernement du Soudan permettra-t-il au Sud de se séparer si cela signifie que les champs pétrolifères appartiendront au Sud? Comment la richesse sera-t-elle répartie, si toutefois elle l'est? Est-il vrai que de 20 000 à 150 000 barils par jour seront pompés d'ici au mois de juin? Que risque de faire le Sud pour interrompre la prospection s'il juge que l'oléoduc alimente la guerre civile? Le pétrole commencera à couler en juin. Cela veut-il dire que la partie sera terminée? Si, avec la participation de la Talisman, le gouvernement du Soudan arrive à exporter du pétrole et à générer les recettes prévues d'ici à la fin de 1999, la guerre pourrait favoriser le gouvernement. Si cela se savait, la Talisman pourrait être accusée d'avoir fourni au gouvernement soudanais les moyens de poursuivre la guerre avec toute la complicité et tout l'appui du Canada.

Pour vérifier l'authenticité de la volonté de paix du gouvernement soudanais, le Canada pourrait-il presser celui-ci de fournir immédiatement et régulièrement une aide humanitaire aux régions des monts Nuba sous contrôle des rebelles? En outre, le Canada pourrait-il insister pour que la Talisman établisse des pourparlers non seulement avec le SRRA, l'aile de développement de l'opposition du Sud, mais aussi avec le leadership politique de l'opposition, l'APLS?

Vous aurez sans doute compris comme moi que la situation au Soudan est complexe et urgente et qu'il est urgent de mettre un processus de paix en place.

(Sur la motion du sénateur Prud'homme, le débat est ajourné.)

Affaires étrangères

Autorisation au comité d'étudier la modification du mandat de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition), conformément à l'avis du 18 mars 1999, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à examiner pour en faire rapport les ramifications pour le Canada:

1. de la modification apportée au mandat de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et au rôle du Canada dans l'OTAN depuis la dissolution du pacte de Varsovie, de la fin de la guerre froide et de l'entrée récente dans l'OTAN de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque; et

2. du maintien de la paix, surtout la capacité du Canada d'y participer sous les auspices de n'importe quel organisme international dont le Canada fait partie.
Que le comité entende, entre autres témoins, le ministre des Affaires étrangères, le ministre de la Défense nationale et le chef d'état-major de la Défense;

Que le comité soit autorisé à siéger pendant les séances et les congés du Sénat;

Que le comité soit autorisé à permettre la diffusion électronique de ses délibérations publiques; et

Que le comité dépose son rapport final au plus tard le 29 octobre 1999.

(1830)

- Honorables sénateurs, depuis ses débuts, il y a 50 ans, comme alliance défensive qui devait faire contrepoids à la menace de l'Union soviétique, qui ne cachait pas ses visées expansionnistes et ne renonçait pas à utiliser au besoin la force militaire pour parvenir à ses fins, l'OTAN s'est profondément transformée au gré de l'évolution politique en Europe et en Asie.

Les événements qui ont mené à des changements au sein de l'OTAN sont extraordinaires - la chute du mur de Berlin en novembre 1989, l'unification de l'Allemagne en octobre 1990, l'effondrement de l'Union soviétique en décembre 1991 et les transformations survenues par la suite en Europe centrale et en Europe de l'Est.

La guerre froide qui avait mené à la création de l'OTAN était terminée; pourtant, l'OTAN survivait. À des rencontres à Londres en 1990, puis à Rome un an plus tard, l'alliance a commencé à se transformer pour s'adapter à la situation politique qui évoluait. Elle s'est redéfinie en fonction d'un partenariat entre l'Est et l'Ouest, plutôt qu'en fonction d'un affrontement.

Tendant la main vers l'Est, l'OTAN a mis sur pied le Conseil de coopération nord-atlantique - qui englobe tous les pays membres de l'OTAN, les pays du pacte de Varsovie et les États successeurs de l'Union soviétique - en mettant l'accent sur la coopération en matière de sécurité. Il a conclu des accords de partenariat pour la paix avec 30 pays, y compris la Russie, pour offrir des programmes conjoints de planification, de formation et d'exercices concernant le rétablissement et le maintien de la paix.

Comme d'autres l'ont mentionné, la Hongrie, la Pologne et la République tchèque ont récemment été admises en tant que membres à part entière, et le Canada est d'accord pour que l'OTAN accepte également parmi ses membres la Roumanie et la Slovénie.

Toutefois, le changement le plus fondamental est survenu en 1995, lorsque l'OTAN a assumé la responsabilité des opérations militaires de maintien de la paix et dirigé la force multinationale de stabilisation déployée en Bosnie. Cela débordait du cadre normal des responsabilités de l'OTAN telles que définies en 1949. Cela donnait également à l'alliance l'occasion d'étendre son champ d'activité au-delà de la défense régionale, nationale et territoriale et d'être au centre de la création d'un nouveau système de sécurité eurasien.

Nous en sommes maintenant au point où l'OTAN, après avoir redéfini son mandat, s'apprête à jouer un rôle militaire actif dans une guerre civile qui secoue la Yougoslavie. Voici comment l'ambassadeur du Canada à l'OTAN, David Wright, décrivait il y a environ un mois la situation au Kosovo:

Un gouvernement qui fait la guerre à ses propres citoyens sous prétexte de lutter contre le terrorisme. Un gouvernement qui, aux dires de certains, a, par ses actions, perdu sa légitimité et renoncé à toute prétention en ce qui a trait aux principes de souveraineté et de non-ingérence.

Depuis des mois, l'OTAN, qui est dominée par les États-Unis, menace de procéder à des raids aériens si aucun accord ne vient mettre un terme à la crise au Kosovo. Par ailleurs, l'organisation a annoncé qu'elle enverrait 28 000 militaires pour faire appliquer toute entente conclue entre les Serbes et les Kosovars. On sait qu'il n'y a toujours aucun accord, et les bombardements deviennent de plus en plus probables d'heure en heure. Si l'OTAN passe aux actes, elle montrera qu'elle prend parti, contrairement à ce que disait l'ambassadeur Wright, dans ce qui constitue, en regard du droit international, une guerre civile où des rebelles contestent l'autorité légitime de l'État.

Mes propos ne visent pas à cautionner les activités haineuses des Serbes au Kosovo, ni à nier les aspirations légitimes que les Kosovars fondent sur l'histoire. Je veux plutôt soulever une question fondamentale et pertinente: le Canada croit-il que les nouvelles responsabilités militaires de l'OTAN lui permettent de lancer des attaques contre un gouvernement avec lequel elle est en violent désaccord?

Certains rappelleront le cas de la Bosnie, où l'OTAN a effectué des bombardements et a forcé les Serbes à accepter l'accord de Dayton, que 30 000 militaires de l'OTAN réussissent plus ou moins bien à faire respecter. La motion dont nous sommes saisis aurait assurément dû être présentée au Sénat à ce moment, mais un accord a été conclu. Cette fois-ci, l'histoire ne se répétera peut-être pas. Quoi qu'il en soit, des éclaircissements concernant la politique de l'OTAN s'imposent et nous devons certainement comprendre dans quelle mesure le Canada participe à cette politique et l'appuie.

Honorables sénateurs, la contribution du Canada au maintien de la paix a été exemplaire et s'est toujours inspirée de la solution proposée par M. Lester Pearson à la crise de Suez en 1956. Toutefois, le terme «maintien de la paix» créé par M. Pearson est employé à mauvais escient aujourd'hui. Nous sommes loin de Suez, de Chypre et des hauteurs du Golan. De nombreuses personnes remettent en question l'envoi de troupes dans la région du Golfe, en Somalie, et aujourd'hui au Kosovo. Ces missions n'étaient pas des missions de maintien de la paix ou de pacification, mais bien une participation à des guerres.

Un débat public sur le rôle du Canada dans ce contexte nouveau et plus dangereux s'impose d'urgence, et sa capacité de faire pleinement face à la situation, de façon responsable, n'a pas encore été démontrée. Au moment où l'OTAN se prépare à célébrer ses 50 ans d'existence, ne serait-il pas approprié pour le Canada d'examiner en profondeur les nouvelles orientations stratégiques de l'alliance et le rôle du Canada à cet égard? C'est le but de la motion à l'étude, qui propose d'examiner les changements survenus dans la vocation de l'OTAN et les ressources en personnel et en matériel que le Canada peut ou ne peut pas fournir.

Honorables sénateurs, je n'ai aucun doute que, fort de sa compétence, le comité sénatorial permanent des affaires étrangères a tout ce qu'il faut pour examiner la question de façon compétente et soumettre des recommandations dans l'intérêt de tous les Canadiens.

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur Stewart, qui a appuyé la motion, et au nom de qui j'ai agi il y a quelques minutes, me faisait part, avant de quitter la Chambre, de son ferme appui à cette résolution et de son désir de voir le comité des affaires étrangères entamer l'étude que le sénateur Lynch-Staunton recommandait au Sénat. À moins que d'autres sénateurs ne veuillent prendre la parole au sujet de cette motion, je propose de la mettre rapidement aux voix.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: J'aimerais poser une question au sénateur Lynch-Staunton. Le comité des affaires étrangères, présidé par le sénateur Stewart, a décidé de demander l'avis de la Chambre pour étudier deux questions: le Fonds monétaire international - sans mon appui, mais je n'ai pas voté - et les relations du Canada avec la Russie et l'Ukraine.

[Traduction]

Je ne suis pas contre cette motion, mais nous accumulons les questions à soumettre au comité. Quelles questions devraient avoir la priorité? Je suis très sympatique à cette cause. J'ai des doutes quant à l'expansion de l'OTAN.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le sénateur Lynch-Staunton a-t-il la permission de répondre? Le sénateur Carstairs ayant pris la parole, les questions ne peuvent être adressées qu'au sénateur Carstairs, conformément au Règlement.

Le sénateur Lynch-Staunton a-t-il la permission de répondre?

Des voix: D'accord.

[Français]

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, le sénateur Prud'homme peut être assuré que j'ai consulté le sénateur Stewart avant de déposer ma motion.

[Traduction]

Lui-même m'a assuré que, même si cela venait encore alourdir le calendrier déjà fort chargé du comité pour les mois à venir, lui et son comité avaient conclu d'en faire une question prioritaire. Il est en mesure de modifier le calendrier des autres projets du comité de telle façon qu'en temps opportun, avant qu'il nous quitte en tout cas, cette affaire sera menée à bien et que les deux autres seront en bonne voie de l'être. Il croit pouvoir trouver le temps, l'énergie et les ressources dont son comité a besoin pour aborder ces trois questions.

L'honorable J. Michael Forrestall: Alliez-vous passer à la motion d'ajournement, sénateur Carstairs?

Le sénateur Carstairs: Non.

Le sénateur Forrestall: Dans ce cas, puis-je dire quelques mots? J'ai dûment rappelé à mes collègues que le pouvoir d'intervention est passé de la sphère politique aux autorités militaires. Un état d'urgence a été déclenché dans l'ancienne Yougoslavie et des frappes sont attendues. Honorables sénateurs, nous sommes donc en guerre et nous n'avons même pas discuté de ce problème.

(1840)

Je tiens à offrir mon appui à la motion du sénateur Lynch-Staunton. Chers collègues, nous parlons de maintien de la paix, mais nous ne sommes pas dans un mode de maintien de la paix en l'occurrence. Nous sommes dans une situation de maintien de la paix où une intervention militaire s'inscrit dans une alliance militaire défensive.

À ce que je sache, cette question n'a vraiment été examinée nulle part. Elle n'a été discutée ni dans l'autre endroit, ni au Sénat.

Ces questions concernant les implications de cette nouvelle ligne de conduite de l'OTAN et notre capacité de donner suite à l'opération au Kosovo sont importantes. À mon avis, nous avons l'occasion d'examiner cette question d'un oeil critique. Nous avons parmi nous des personnes qui ont de l'expérience dans ce domaine, comme le sénateur Rompkey, le sénateur Kenny, le sénateur Andreychuk pour les affaires étrangères, et le leader de mon parti, le sénateur Lynch-Staunton qui s'intéresse à ces questions depuis plusieurs années.

Ce qui m'inquiète, honorables sénateurs, c'est nos capacités militaires et les écarts flagrants dans la mise en oeuvre du livre blanc de 1994. Ce livre blanc était issu du rapport d'un comité parlementaire mixte sur la défense du Canada. Il s'agit de deux documents fort respectés, non seulement par les parlementaires mais par l'armée et par les milieux universitaires. Nos moyens d'action présentent des lacunes qu'il faut absolument combler, à mon avis, et de préférence avant le début de notre engagement en Yougoslavie - enfin, il a déjà commencé.

La Yougoslavie a une force militaire généralement bien armée qui dispose de chasseurs modernes, comme le MIG-29, d'excellents missiles sol-air, tels le missile à lanceur mobile SA-6, et de chars de combat principaux T-72. Il ne fait aucun doute que les forces de l'OTAN et du Canada vont subir des pertes. Pour cette raison et beaucoup d'autres, les sénateurs des deux côtés du Sénat veulent qu'un comité composé de sénateurs ayant à c9ur la défense du Canada étudie les questions de sécurité nationale.

Honorables sénateurs, des ratés dans la mise en oeuvre du livre blanc de 1994 pourraient compromettre notre aptitude à entreprendre diverses opérations militaires, y compris notre participation aux opérations de l'OTAN. Je crois que le comité sénatorial permanent des affaires étrangères doit examiner ce problème dans le cadre de son étude, surtout si nous devons nous engager à fond dans ce pays divisé.

Le gouvernement actuel a défini sa politique de défense dans le livre blanc sur la défense de 1994, qui réaffirmait l'engagement du Canada de maintenir des forces terrestres, maritimes et aériennes modernes et aptes au combat, qui puissent participer à tout l'éventail d'opérations possibles sur la scène internationale. Pour réaliser nos objectifs nationaux en matière de sécurité, le gouvernement a demandé aux Forces canadiennes de déployer un quartier général de forces opérationnelles interarmées, ainsi que un ou plusieurs des éléments suivants: un groupe opérationnel naval composé d'un maximum de quatre navires de guerre de surface et d'un navire de soutien, et doté d'un appui aéronaval approprié; trois groupements tactiques distincts ou un groupe-brigade; une escadre de chasseurs avec soutien approprié; un escadron d'aéronefs de transport; pour un total de 10 000 militaires qui pourraient être déployés à l'étranger en tout temps, le tout à partir de nos ressources actuelles au Canada. Ce plan a été réalisé avec une force permanente régulière d'environ 60 000 membres. En faisant des calculs, on est arrivé à des résultats intéressants, en constatant selon nous qu'il faudrait au moins 66 700 militaires canadiens pour appuyer des effectifs aussi nombreux sur le terrain.

Pour ce qui est de la marine, le gouvernement a affirmé qu'on avait un «besoin urgent» de nouveaux hélicoptères maritimes pour remplacer les Sea King vieillissants. Cela devait être fait avant la fin de la décennie. Le livre blanc promettait aussi qu'on examinerait la possibilité d'acheter des sous-marins de type Upholder. Dernièrement, le gouvernement a dit qu'il envisagerait le remplacement de nos vieux navires de soutien opérationnel.

On a promis à l'armée du Canada trois groupes-brigades adéquatement équipés et quelque 3 000 soldats de plus dans trois bataillons d'infanterie légère. Dans le livre blanc, on a recommandé de nouveaux véhicules de transport de troupes pour remplacer la flotte de M-113 obsolètes. Il a aussi été question, dans des termes flous, d'un éventuel remplacement des véhicules de tir d'appui direct.

On a promis à la force aérienne la modernisation de sa flotte de chasseurs CF-18 et l'acquisition de nouveaux hélicoptères de recherche et de sauvetage. Le gouvernement a aussi déclaré son intention de réduire de 25 p. 100 la flotte de chasseurs du Canada, mais de doter le reste des chasseurs de nouvelles munitions à guidage de précision pour assurer un appui près du sol.

Finalement, comme toujours, le livre blanc de la défense de 1994, c'était beaucoup de promesses, mais peu d'actions. La marine canadienne attend toujours un nouvel hélicoptère. Tout le monde sait qu'une fois la commande passée, il faut environ trois ans avant que le premier appareil soit livré. Il faudra au moins trois autres années avant que le dernier de ces nouveaux hélicoptères ne soit livré. Le taux de disponibilité des vieux Sea King n'est maintenant que de 30 à 40 p. 100 et les missions échouent dans 50 p. 100 des cas. Cet hélicoptère non fiable nuit sérieusement aux opération de la flotte de l'OTAN et aux opérations maritimes de maintien de la paix. On a peu discuté de la proposition visant des navires de soutien polyvalents et du manque de moyens de ravitaillement stratégique par mer qui fait que notre armée est en grande partie confinée sur terre.

D'autre part, il faudrait féliciter le gouvernement d'avoir acheté des sous-marins de la classe Upholder. En outre, les forces armées ont commencé à recevoir leurs nouveaux véhicules de transport blindés, les LAV-25. Bientôt, nous en aurons suffisamment pour équiper une nombre raisonnable d'escadrons de reconnaissance blindés affectés à quelques régiments. On a aussi créé trois bataillons d'infanterie légère d'environ 3 000 soldats.

Malheureusement, il n'est pas fait mention d'un nouveau char de combat principal qui remplacerait le Leopard devenu désuet. Je ne sais pas si nous en avons vraiment besoin, mais on n'a pas parlé de remplacer ce char. Malheureusement, sans char de combat principal, les forces armées sont actuellement incapables de mener des opérations de choc ou de se défendre. Pour pallier à ce manque, le gouvernement a toutefois, et c'est tout à son honneur, examiné l'achat d'un véhicule à tir direct qui pourrait combler le manque de chars et bien fonctionner pour une force militaire d'intervention rapide.

De plus, dans «l'évaluation stratégique» qu'il a rendue publique dernièrement, le Congrès des associations de la défense met en doute la valeur de l'organisation militaire canadienne et notre capacité de soutenir nos forces en Bosnie avec nos effectifs actuels. En outre, le ministre a dit que nos ressources seraient «utilisées au maximum» s'il fallait envoyer encore 800 militaires au Kosovo, qui s'ajouteraient aux 2 000 qui se trouvent déjà à l'étranger. Il faudrait peut-être réorganiser notre armée en fonction de ces opérations. Nous devrions peut-être créer une brigade de haute technologie pour l'OTAN, une brigade polyvalente qui pourrait entrer en action pour appuyer le groupe de haute technologique et un groupe de réaction rapide ou d'infanterie légère. Nos réservistes pourraient peut-être s'occuper davantage d'engagements plus discrets ici même au Canada, allégeant la tâche des forces permanentes. Peut-être que cela permettrait de régler en bonne partie nos problèmes de rotation et de réentraînement.

J'estime que le comité sénatorial permanent des affaires étrangères devrait examiner ces lacunes relatives à la capacité et ces préoccupations organisationnelles.

Il importe de ne pas oublier, dans ce débat, que les armées nazies ont essayé de pacifier la Yougoslavie en 1941 et qu'au cours des quatre années suivantes, elles ont échoué. C'est ensanglantées et défaites qu'elles ont quitté ce pays. Ceux qui ne connaissent pas assez le passé sont condamnés à le répéter. C'est pourquoi j'appuie cette motion qui tombe à point nommé.

J'espère que le comité l'adoptera avant qu'il y ait prorogation ou quelque chose du genre. Il devrait trouver un moyen de continuer son travail advenant la prorogation du Parlement. Fait plus important, il y a une volonté. Je compte sur le fait qu'il y aura une volonté de trouver pareil moyen si le Parlement ne siège plus officiellement.

Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à mon bon ami du comité des affaires étrangères et de la défense nationale de la Chambre des communes. Anciennement, pendant de nombreuses années, j'ai cru qu'il valait mieux n'avoir qu'un comité des affaires étrangères et de la défense nationale afin que tous les parlementaires connaissent le point de vue des uns et des autres. Les gens préoccupés par la sécurité seraient alors exposés aux problèmes touchant les affaires internationales, les affaires étrangères et l'ACDI.

(1850)

Au Sénat, nous avons un comité des affaires étrangères. Mon collègue, qui est un expert depuis longtemps dans le domaine de la défense nationale, croit-il que le moment est peut-être venu d'avoir à nouveau un comité des affaires étrangères et de la défense nationale ou qu'il faut, comme à l'heure actuelle, avoir un comité des affaires étrangères, qui est maintenant présidé par le sénateur Stewart, et un comité distinct pour la défense nationale?

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, comme le sénateur Prud'homme le sait, nous avons essayé les deux façons à l'autre endroit. Nous avons jugé que la répartition des efforts et des responsabilités laissait à désirer. L'idéal, c'est quand il y a de bons comités actifs en matière de défense et d'affaires extérieures qui travaillent conjointement. Cela peut se produire sans trop d'ingérence.

Une autre solution consisterait à avoir un organisme distinct et indépendant chargé de suivre les questions de la défense nationale. Je suis un partisan de cette solution étant donné que je pense qu'elle aurait plus de chances d'être acceptée.

En fin de compte il ne convient pas de demander à un comité des affaires extérieures d'examiner la politique de défense nationale. De par sa nature même, on exclut les gens qui ont des intérêts à long terme dans le domaine de la défense ou des affaires étrangères. Les affaires étrangères sont une notion beaucoup plus large que la défense.

Oui, je souhaiterais que nous ayons notre propre comité. Cependant, je suis très heureux avec le sénateur Stewart. Certaines des personnes que j'ai mentionnées, et le sénateur Prud'homme est parmi ceux-là, savent que nous avons tenu le coup pendant un certain temps.

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, étant donné que les événements se précipitent au Kosovo et dans l'ancienne Yougoslavie, j'ai décidé d'intervenir sur cette question.

Le sénateur Kinsella a présenté d'excellentes idées, à l'instar du sénateur Forrestall. J'interviens aujourd'hui pour voir dans quelle mesure nous pouvons, au Canada, inciter les Nations Unies à éviter une intervention militaire.

Durant les années 60, j'ai travaillé pendant environ six ans dans l'ancienne Yougoslavie et dans les montagnes du Kosovo. Je participais à une étude géologique commandée par le maréchal Tito. Je l'ai rencontré pour la première fois en 1960, et il a retenu mes services quelques années plus tard.

Le maréchal Tito était un Croate qui dirigeait en Yougoslavie le mouvement communiste appuyé par la Russie. Le mouvement de droite, qui se trouvait surtout en Croatie, a essayé de prendre le contrôle du pays. Tito l'a emporté. Étant un Croate qui bénéficiait de l'appui des Serbes, il a réussi à maintenir ensemble les républiques du Monténégro, de la Macédoine, de la Croatie, de la Serbie et de la Slovénie. La Slovénie était la plus riche.

Ayant passé une assez longue période dans les montagnes du Kosovo et dans le sud du pays dans le cadre de l'étude géologique, j'appuie la notion évoquée par le sénateur Forrestall, selon lequel l'armée allemande a constaté qu'il était impossible d'occuper la Yougoslavie. Il est presque impossible de s'imaginer qu'une force militaire puisse progresser au sol dans quelque direction que ce soit. D'un point de vue militaire, c'est probablement une des pires régions que l'on puisse imaginer dans le monde.

Comme le sénateur Kinsella l'a mentionné, à l'époque, la seule porte de sortie de Staline en Europe était l'Albanie. On considérait que le maréchal Tito était un révisionniste. Les Albanais opprimaient fortement leur population, et Tito accueillait assez bien les Albanais qui franchissaient la frontière pour trouver refuge au Kosovo. C'est ce qui fait que des 50 p. 100 qu'elle représentait à l'époque, la population albanaise atteint aujourd'hui le niveau des 80 ou 90 p. 100. En aidant les réfugiés albanais à fuir le communisme dur de l'ère stalinienne, Tito a, dans une certaine mesure, créé ce problème.

J'ignore ce que nous pourrions faire en tant que sénateurs ou simples citoyens canadiens. Cependant, je crois que l'attaque est la chose à ne pas faire. Cela n'a pas trop bien marché avec Saddam Hussein, et j'ai aussi beaucoup travaillé en Iran.

Lorsque vous attaquez le dirigeant d'un pays, tout ce que vous faites, c'est de raffermir sa poigne sur le peuple. L'idée que l'on puisse bombarder un peuple jusqu'à le convaincre de se débarrasser de ses dirigeants est une folie. Si vous tenez absolument à choisir cette voie, vous devez conquérir le pays, et ce pays est impossible à conquérir.

Le sénateur Kinsella nous a donné la meilleure description de la situation que j'aie entendue jusqu'à maintenant. Son intervention devrait être publiée dans tous les journaux du Canada.

Notre gouvernement, notre ministre des Affaires étrangères et les autres devraient réfléchir sérieusement avant de reprendre une stratégie qui n'a fait que raffermir Saddam Hussein dans son poste. J'aimerais que le discours du sénateur Kinsella soit publié et diffusé dans tout le Canada. S'il y a des bombardements, nous pouvons être certains que des innocents souffriront. Ce seront les civils innocents qui deviendront suffisamment en colère pour garder le dictateur en place et conserver le système dont nous voulons tous nous débarrasser.

Son Honneur le Président: Si aucun autre honorable sénateur ne veut prendre la parole, je mettrai la motion aux voix.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

La position internationale concurrentielle dans le domaine des communications

Autorisation au comité des transports et des communications à reporter la date de son rapport final

L'honorable Lise Bacon, conformément à l'avis de motion du jeudi, 18 mars 1999, propose:

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 1er décembre 1998, le Comité permanent des transports et des communications, autorisé à examiner, pour en faire rapport, la position internationale concurrentielle du Canada dans le domaine des communications en général, et notamment à étudier l'importance des communications au Canada sur les plans économique, social et culturel, soit habilité à présenter son rapport final au plus tard le 30 mai 1999; et

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer son rapport auprès du greffier du Sénat, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.

Honorables sénateurs, nous avions prévu présenter le rapport sur notre étude de la position internationale concurrentielle du Canada dans le domaine des communicaitosn le 9 avril. Nous en sommes, me dit la présidente du comité, à la phase finale de la rédaction du rapport. Il est possible que la présentation du rapport soit retardée un peu après le 9 avril. Nous voulions donner assez de temps au sous-comité des communications pour rédiger son rapport final et le présenter.

[Traduction]

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je voudrais poser une question à la présidente du comité. Prévoit-on que la prolongation sera coûteuse? En d'autres mots, le comité aura-t-il besoin d'un gros budget pour terminer ses travaux?

Le sénateur Bacon: Non.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 24 mars 1999, à 13 h 30.)


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